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sur l'organisation judiciaire et les réductions qu'elle amènerait dans le personnel de la magistrature (Voyez plus loin). Provisoirement, M. le ministre de la Justice prit l'engagement de se conformer aux vues de l'Assemblée, en se faisant une loi de ne pourvoir aux vacances que dans les limites rigoureusement nécessaires pour ne pas entraver l'administration de la justice. C'était là une concession bien grave: on maintenait ainsi les suspensions prononcées par le gouvernement provisoire contre un certain nombre de magistrats. Et cependant, la Constitution avait proclamé le principe de l'inamovibilité.

Sur le budget de la Guerre, comme sur presque tous les autres, les propositions de la commission modifiaient profondément les chiffres portés au projet de budget; elles reposaient sur une diminution considérable de l'effectif présent sous les drapeaux.

Le budget de la guerre, présenté par le Gouvernement, montait à 354 millions; cette somme n'était pas seulement inférieure aux dépenses effectuées pendant l'année 1848, qui avait absorbé 429 millions, mais qui doit être considérée comme une année anor. male, elle était encore au-dessous des dépenses des années 1847 et 1846, qui avaient été pour la première, de 375 millions, et, pour la seconde, de 360; et cependant, sur la somme de 354 millions, demandée par le Gouvernement pour 1849, la commission proposait d'opérer des réductions montant à 40 millions, ce qui le ramènerait à 314 millions; elle produisait, en outre, un aperçu qui la ferait tomber à 280 millions pour 1850. Le rapport de M. Gré→ terin s'attachait à développer cette opinion, qu'il importe moins d'entretenir en permanence une armée considérable que de se ménager une réserve pour pourvoir aux éventualités de la guerre. Il voulait qu'on fit passer plus d'hommes sous les drapeaux, et qu'on les y laissât moins longtemps. En conséquence de ce système destructeur, voici la réduction immédiate que proposait d'effectuer la commission on sait que le nombre actuel des troupes, par suite des circonstances politiques, dépassait celui de 381,000 hommes, qui avait servi de base au projet présenté par le Gouvernement. Au 1er février 1848, l'excédant était de 75,000 hommes et de 8,000 chevaux; nous avions 383,000 hommes en Francé et 72,000 en Algérie. Pour revenir à l'effectif du budget,

il faudrait donc renvoyer la classe de 1842, forte de 61,500 hommes, et 15,500 soldats de la classe de 1843. Mais ce n'était pas tout. La commission n'entendait pas que l'on conservât ces 381,000 hommes passé le 1er juin. Elle voulait qu'à partir de cette époque, l'effectif fùt ramené, tant en France qu'en Algé ree, à 284,000 hommes et à 68,000 chevaux, de telle sorte qu'on devrait congédier les classes de 1843 et de 1844 et n'appeler que 40,000 hommes du contingent de 1848. Si l'on déduisait de ce chiffre de 284,000 hommes les états-majors, la gendarmerie et les vétérans, il en résultait que l'armée serait réduite à 258,000 hommes n'ayant en moyenne qu'environ deux années de service. En comparant cette situation à celles de 1844, 1845 et 1846, on aurait en France une diminution de 40,000 hommes, dont 25,000 hommes d'infanterie, 9,500 de cavalerie, 3,500 d'artillerie, 1,450 du génie, et 1,050 des équipages militaires.

A côté de la force numérique des corps, vient se placer, pour son influence dans les dépenses de l'armée, la composition des cadres. Le nombre de nos régiments d'infanterie était actuellement de cent, non compris dix bataillons de chasseurs à pied. La commission était d'avis de conserver les cent régiments, mais de réduire le nombre des bataillons de trois à deux par régiment en temps de paix, et de supprimer en outre les dix bataillons de chasseurs à pied. Si cette combinaison était adoptée, un tiers des officiers des régiments deviendrait disponible. Ils seraient détachés à tour de rôle, disait le rapport, pour le recrutement et pour les revues de la réserve, ainsi que pour divers emplois des places qui n'exigent pas une instruction spéciale. Indépendamment de ces propositions, qui touchaient au personnel des officiers, la commission demandait s'il ne serait pas possible de retrancher plusieurs emplois dans les régiments, de réunir les fonctions d'adjoint au trésorier et de porte-drapeau, de faire remplir celles du lieutenant-colonel et du major par le même officier, ou du moins de donner au major les attributions actuelles du trésorier. Enfin, la commission insistait pour qu'on entrat, dès à présent, dans la voie qu'elle indiquait en laissant au moins un emploi sur trois sans y pourvoir et en réduisant à deux cents au plus les admissions nouvelles à l'école de Saint-Cyr. En

ce qui concernait la cavalerie, le rapport concluait à la suppression des quatre escadrons de cavalerie légère créés en 1840, et de cinq escadrons de guides créés en 1848. Pour l'artillerie, la commission réclamait la suppression de 26 batteries; elle demandait qu'on fit porter la réduction sur le nombre des régiments, parce qu'il en résulterait une plus grande réduction dans le nombre des officiers, des canonniers et des chevaux ; elle voulait aussi diminuer le train des parcs des pontonniers de deux compagnies par escadron. Quant aux travaux extraordinaires de l'artillerie et du génie, qui embrassent les travaux de défense et ceux de casernement, la commission les réduisait de 17 millions à 9 millions, en émettant le vœu qu'à l'avenir les projets fussent établis de manière à ne pas excéder une allocation annuelle de 8 millions, qui serait suffisante, d'après le rapport, pour terminer en quatre ou cinq ans l'ensemble des travaux entrepris.

Enfin l'administration de l'Algérie serait diminuée de 32 à 28 millions, diminution qui porterait sur les différentes branches des services civils.

Tel était l'ensemble des combinaisons de la commission, dont l'effet inévitable serait la complète désorganisation de l'armée.

La discussion, ouverte le 3 mai, porta sur le point le plus important la réduction des cadres de l'armée active. Cette proposition soulevait deux objections graves, l'une de pure forme, l'autre essentiellement politique. La constitution des cadres de l'armée est une question organique, et précisément une de celles qui se rattachent à l'organisation générale de l'armée. Or, était-il possible de discuter une question semblable dans la loi du budget, au moment même où on allait voter sur l'organisation de la force publique? (Voyez le chapitre suivant ). D'un autre côté proposer de réduire les cadres de l'armée, c'était proposer le désarmement, c'était décider que toutes chances de guerre et de complications antérieures s'étaient évanouies. C'est à ce point de vue que la proposition fut combattue par une incontestable autorité, celle du général de Lamoricière. M. Mauguin appuya cette éloquence spéciale par une revue un peu trop générale de la politique européenne. Le débat finit par un ajournement qui fut voté sur la

proposition du général Cavaignac et appuyé par M. le ministre de la guerre. En d'autres termes c'était décider que les cadres de l'armée active seraient fixés, comme le prescrivait la Constitution, par une loi spéciale à présenter dans le délai d'un an.

Les réductions proposées sur le traitement des généraux de division et des généraux de brigade commandant en Afrique, n'eurent pas l'assentiment de l'Assemblée. Elle rejeta également une réduction sur les indemnités accordées aux capitaines qui commandent des troupes en état de rassemblement (5 mai).

On s'occupa ensuite de la gendarmerie mobile que la commission proposait d'incorporer dans la garde municipale, afin d'obtenir une économie de 300,000 francs; le général Baragueyd'Hilliers combattit cette proposition, en invoquant les services rendus par ce corps et en insistant sur la nécessité de le maintenir dans son organisation actuelle; il parvint à faire prévaloir son opinion, et la réduction demandée par la commission fut repoussée.

Le chapitre des frais de justice militaire souleva une question grave; la commission proposait la suppression de l'indemnité allouée aux officiers en retraite qui remplissent les fonctions de commissaires et de rapporteurs; c'eût été, en réalité, l'abrogation du décret du Gouvernement provisoire, qui avait enlevé ces fonctions aux officiers en activité pour les confier à des officiers en retraite; la commission n'avait vu qu'une affaire d'économie, là où il s'agissait à la fois de bonne administration et de bonne justice; heureusement l'Assemblée rejeta cette proposition; les officiers de l'armée ne seraient plus enlevés désormais à leurs occupations actives, et les officiers en retraite, appelés près des conseils de guerre, formeraient un parquet permanent qui conserverait les bonnes traditions.

Vint ensuite la question qui dominait tout le budget de la guerre, la question de l'effectif. Nous avons déjà fait connaître les propositions de la commission : elle demandait qu'à dater du 1er juin notre effectif fût ramené à 284,000 hommes; c'était 97,000 hommes de moins que l'effectif porté au projet de budget; c'était 168,000 hommes de moins que celui qui est actuellement sous les drapeaux. Il est inutile de faire ressortir les funestes con

séquences qu'une pareille réduction de l'armée aurait entraînées dans les circonstances actuelles; jamais peut-être la politique extérieure n'avait présenté autant d'embarras et de difficultés. A l'intérieur, on avait à protéger la société contre des ennemis qui ne prenaient pas seulement la peine de déguiser leurs projets. C'était surtout de l'armée française qu'on pouvait dire qu'elle est l'armée de la civilisation. Envisagée sous le point de vue de notre organisation militaire, la réduction proposée par la commission n'aurait pas eu des résultats moins déplorables; pour ramener l'effectif au chiffre indiqué, il aurait fallu renvoyer les hommes appartenant aux quatre classes les plus anciennes. On aurait ainsi privé l'armée de ses vieux soldats, c'est-à-dire de sa plus grande force, et comme les sous-officiers et les caporaux sortent de leurs rangs, il s'en serait suivi qu'on aurait vu des régiments se trouver sans un sous-officier et un caporal.

Il était difficile de répondre à ces arguments pratiques que fit valoir M. le ministre de la guerre, que développèrent après lui M. Jules de Lasteyrie, M. de Lamartine, M. le général de Lamoricière. Un membre de la commission, M. Guichard, révéla assez imprudemment la pensée véritable cachée derrière ces économies funestes: on n'avait pas méconnu la gravité des circonstances, mais l'administration actuelle n'avait pas les sympathies d'une partie de l'Assemblée. Ainsi, on portait la perturbation dans l'armée pour satisfaire des rancunes personnelles (8 mai).

La Chambre se refusa encore à ratifier la plupart des réductions proposées sur le matériel de l'artillerie, ainsi qu'une économie de 50,000 francs sur le personnel des poudres et salpêtres, qu'elle rejeta au scrutin de divison, par 282 voix contre 247 (9 mai).

Une diminution de 700,000 francs, demandée sur les places fortes fut également repoussée.

Sur le chapitre de l'Algérie, la Chambre consentit à réduire à 12,000 francs le traitement du gouverneur-général (12 mai). Nous renvoyons au chapitre spécial sur les colonies le débat qui s'engagea sur les résultats obtenus en Algérie dans les colonies de 1848.

Avec le budget de la guerre était complété le budget des dé

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