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douze ans, et les législateurs six ans par la possibilité d'une réélection continuelle, et par les dix-huit nominations dont nous venons de parler, on a enlevé aux électeurs l'influence même la plus éloignée sur la composition du Conseil-d'État; le peuple sera tenu de subir à vie les administrateurs qu'il jugerait le moins dignes de sa confiance. 4o Le réfus de renouveler intégralement la Chambre actuelle, pour mettre fin à une organisation flétrie par l'opinion publique, par les orateurs du Grand-Conseil, et par le Rapport même du Conseil-d'État (n° 192), a été aggravé encore par une loi transitoire qui, du moins, aurait dû être un compromis entre l'ancien système électoral et le nouveau, tandis qu'elle n'est qu'un moyen de conserver l'ancien dans le cadre du nouveau, et de transmettre à la Chambre à venir les funestes traditions du passé. 5° La sanction de la réforme constitutionnelle par les assemblées électorales, reconnue nécessaire pour l'avenir, a été éludée pour le présent, au mépris de la logique, et au détriment de la force morale de la constitution. 6° Il est vrai qu'un article de la nouvelle charte, clairement commenté par le Rapport du Conseil-d'État (n° 192), par le Rapport de la Commission du Grand-Conseil (n°195), et par quelques orateurs de la majorité législative, annonce, dans une loi de forme, de vigoureuses garanties contre tout changement futur, et n'en donne aucune pour les améliorations lentes et successives que le tems pourra faire juger convenables. 7° Enfin, je crains que, par un antécédent que les générations futures déploreront, le Grand-Conseil ne se soit laissé dépouiller par le conseil d'État de l'initiative en matière de changement à la constitution.

Les hommes qui, après avoir opiniâtrément repoussé toute idée de réforme constitutionnelle, viennent de faire accepter précipitamment celle qui leur convenait, ont fait un calcul habile, non point pour la gloire de leur patriotisme, mais pour un intérêt présent et éphémère. Quinze jours de réflexion de la part du public eussent suffi pour qu'il comprît et repoussât les périls cachés sous une première apparence. Le pays aurait été réduit à déplorer le mécompte du pouvoir exécutif rentré dans ses limites naturelles : au lieu de cela, si l'on écoute le vœu de quelques pétitionnaires reconnaissans, le pays sera réduit à fêter annuellement une nouvelle extension de ce pouvoir, et l'inamovibilité de fait de ses membres, C. MONNARD,

ITALIE.

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* Statistica agraria della Val-di-Chiana, etc. 194. Statistique agraire de la province de Val-di Chiana, par Giuseppe GIULI, professeur d'histoire naturelle à l'Université de Sienne. Tom. 1". Pise, 1828; imprimerie de Nicolo Capurro.. In-8° de 270 pages, avec une carte topographique du cours de la Chiana.

Quoique nous n'ayons encore que le premier volume de cet ouvrage, nous ne voulons point différer de lui rendre la justice qu'il mérite. L'auteur est bien pourvu des connaissances générales et locales qu'exigeait le sujet qu'il a traité : propriétaire d'un domaine dans le pays qu'il décrit, il y a recueilli, pendant 18 ans, des observations sur le climat, le sol et ses productions, la géologie, l'histoire physique et industrielle, en un mot, sur tous les élémens de la statistique qu'il a rédigée. De plus, il avait compté sur les secours de tous les amis des connaissances utiles, et il ne s'était point trompé : on s'est empressé de lui fournir des faits intéressans, des observations qu'il n'avait point été à portée de faire, des lumières encore peu répandues, et qui ne seraient peut-être pas arrivées jusqu'à lui. Avec des matériaux aussi abondans et choisis avec tant de soin, il ne pouvait faire qu'un bon ouvrage. Ajoutons que le sujet répondait fort bien aux soins qui lui étaient prodigués, et devenait réellement plus digne d'attention à mesure qu'il était plus étudié. La géographie physique de cette partie de la Toscane a des traits remarquables qu'on ne rencontre que très-rarement à la surface de la terre; une vallée de plus de vingt lieues de longueur, aboutissant à deux fleuves entre lesquels elle partage ses eaux; de grands travaux de desséchement et d'assainissement opérés avec succès; de vastes marais convertis en terres cultivables, l'homme établissant sa demeure dans ces lieux mêmes qui répandirent autrefois à une grande distance leurs exhalaisons mortelles : voilà des objets dignes d'être connus et médités, de puissans encouragemens pour entreprendre dans les contrées marécageuses ces travaux qui ont produit de si bons effets entre le Tibre et l'Arno. Nous en avons même à peu de distance de Paris; des marais empestent l'air que respirent quelques-unes de nos garnisons, et causent annuellement des pertes d'hommes que l'on eût évitées, soit en renonçant à ces postes si malsains et sans importance militaire, soit en procurant l'écoulement des eaux stagnantes qui rendent ces lieux si dangereux

pour toute la population qui y séjourne, ou qui en approche de trop près. On sait que l'Italie est la terre classique des sciences hydrauliques, et quoique ces sciences soient actuellement répandues partout, elles ne se plaisent pas moins aux lieux de leur origine; les ingénieurs italiens d'aujourd'hui ont eu soin de les y conserver.

La préface de M. Giuli est une introduction qu'il faut lire : l'auteur y expose les principales divisions de son ouvrage, et fait une courte analyse de chacune. «J'ai distribué en cinq livres toutes les matières que j'avais à traiter, Le premier contient l'histoire des révolutions physiques dont on retrouve les traces dans le pays que je décris; j'y expose l'état du ciel, le climat, les météores, les propriétés des eaux, de l'air, etc. Le second livre entre, pour chaque commune, dans quelques détails topographiques, géologiques, et de statistique agricole et industrielle; j'y joins un sommaire de l'histoire civile de la commune... Le troisième livre expose ce qui appartient spécia lement à l'administration agricole, à ses ressources, aux animaux qu'elle emploic, à sa législation.... Les procédés de culture et les manipulations de quelques-uns de ses produits seront l'objet du quatrième livre.... Enfin, le cinquième qui est une sorte d'épilogue exposera les résultats, et sera précédé de tableaux synoptiques de la population, du nombre des bestiaux.... On verra donc que mon but a été de faire connaître le terrain sur lequel nos cultivateurs exercent leur industrie, les procédés locaux, et les succès qui sont le fruit des travaux et des sueurs de l'homme des champs, il faut que toutes ces choses soient bien connues, afin que les autres nations puissent juger de ce qui est à leur convenance et de ce qu'elles pourront exécuter avec succès, »

Le premier volume ne renferme que les deux premiers liVres; et, comme on l'a vu, l'auteur débute par la géographie et la géologie du Val-di- Chiana, considérée dans son ensemble. Il n'a pas de peine à prouver que toute cette contrée fut couverte autrefois par les eaux de la mer; outre les bancs de pierre calcaire coquillière, on trouve en abondance des nautiles, des ammonites, etc., d'une belle conservation; on a trouvé, près d'Arezzo, une n:âchoire de baleine enfouie sous une couche de galets. A la rigueur, les témoignages des historiens ne peuvent rien ajouter à la certitude qui résulte de ces monumens de l'ancienne nature; mais l'histoire peut fournir quelques lumières sur l'époque de ces bouleversemens dont la date est totalement perdue. Quelques passages de Strabon semblent indiquer qu'une branche de l'Arno tombait autrefois dans le

Tibre, et qu'elle s'est desséchée à mesure que la branche dirigée vers la mer a creusé son lit, reculé ses bords, et reçu un plus grand volume d'eau : l'art aida peut-être la nature dans ce travail, comme on l'a vu dans d'autres contrées, des époques plus rapprochées de nous.

Les travaux pour le desséchement de la vallée de la Chiana ne commencèrent qu'au xiv siècle, et alors, cette vallée était partout marécageuse. On commença par faire écouler vers 'Arno les eaux du territoire d'Arezzo. Les Médicis continuèrent ces améliorations jusqu'aux environs de Monte Pulciano, par divers procédés qui sont exposés dans ce livre; mais ce fut sous le règne du grand-duc Léopold I" que l'on obtint enfin les résultats les plus importans; et, qu'en employant avec habileté les moyens de desséchement et d'atterrissement, on parvint à substituer une vaste étendue d'excellentes terres à des marais non-seulement inutiles, mais très-pernicicux. La province allait recueillir les fruits de cette longue persévérance dans la voie d'une sage administration, lorsque les commotions politiques en Europe exigèrent d'autres soins : la Chiana fut à peu près oubliée jusqu'en 1814. Enfin, après un nivellement général de la vallée, les pentes ont été réglées pour que les eaux de la rivière ne soient stagnantes nulle part, et les atterrissemens sont dirigés de manière que le sol se consolide et se dessèche autant qu'il le faut, et dans le tems le plus court. C'est à M. le chevalier Fossombroni qu'on est redevable de ces dispositions qui achèveront de procurer à ce pays tout le bien qui peut résulter d'une heureuse application des sciences hydrauliques.

Ce bien n'est pas encore entièrement obtenu, quoique les améliorations soient immenses; le fond de la vallée expose encore les habitans à des fièvres intermittentes et à des dyssenteries qu'on attribue au froid humide des nuits. Les eaux y sont presque partout chargées de sels calcaires, en sorte que l'on est obligé de recourir aux citernes. M. Giuli recommande l'usage des filtres de charbon qu'il a déjà fait connaître dans la 2o édition de son traité de Chimie économique, et sur lesquels il donne ici des détails pratiques, afin de les mettre à la portée de tout le monde, et de faire apprécier le peu de dépense et d'embarras qu'ils entraînent.

Le second livre est beaucoup plus étendu que le premier, ct il devait l'être, en raison des détails dans lesquels l'auteur est entré sur chaque commune de la province de Val-di-Chiana. Pour chacune, il décrit le territoire, non-seulement à la ma

nière des agronomes, mais suivant les méthodes de la topographie et de la géologie; vient ensuite la statistique civile et ecclésiastique, puis celle des arts et manufactures, et enfin un sommaire historique. Il faut remarquer que les communes, sous le gouvernement actuel de la Toscane, sont à peu près l'équivalent de nos cantons.

Le mouvement de la population, dans la commune d'Arezzo, confirme une observation faite en France sur les effets de la centralisation du gouvernement. Le grand-duc Léopold Ier, dont la Toscane bénit encore la mémoire, s'était attaché à faire refluer vers les campagnes les citadins dont le nombre commençait à surcharger les villes, et il avait réussi : la population d'Arezzo croissait, mais lentement, et celle de son territoire allait beaucoup plus vite. Depuis que les formes du gouvernement de Napoléon ont été introduites en Toscane et à peu près conservées depuis la restauration, Arezzo est devenu chef-lieu d'une province, et croît à vue d'œil, aux dépens de ses environs; l'ordre établi par Léopold est changé en sens contraire.

Quant au nombre des ecclésiastiques, la France diffère encore beaucoup de l'Italie. Dans la petite province dont il s'agit, on compte 4 évêchés et 6 collégiales sur une surface qui n'est pas la moitié d'un département français, et dont la population est au-dessous de 110,000 habitans. La ville de Monte Pulciano a un évêque, un séminaire, deux couvens d'hommes et deux de femmes, outre l'église de Saint-Blaise qui peut être considérée comme une collégiale. La population de tout le diocèse est au-dessous de 10,000 habitans, et la ville n'en a pas 2,500. L'étendue territoriale de l'évêché équivaut, tout au plus, aux deux tiers de celle du département de la Seine.

La statistique de la commune de Cartona, autre évêché, mérite l'attention des lecteurs par les détails géologiques dans lesquels M. Giuli est entré, par la description des murs de cette ville, monument des anciennes constructions étrusques, et par une discussion sur la campagne d'Annibal contre le présomptueux et malhabile Flaminius. Les militaires y remarqueront quelques erreurs dans lesquelles l'auteur est peut-être tombé; il pense qu'Annibal n'a pu employer deux ou trois journées à traverser un marais de six à sept lieues de largeur, ou que son armée aurait tellement souffert dans ce passage qu'elle se fût exposée à une destruction totale: il n'en est pas ainsi, et le général carthaginois ne l'ignorait point.

M. Giuli regrette de n'avoir pu donner une notice plus

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