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ture des choses parlerait toute seule. Lorsque celui qui désire un objet en a plus besoin que celui qui doit le lui céder, c'est celui qui le désire et qui le demande qui paye plus cher. Eh bien, tous les jours on dit que le capital tyrannise le travail. Cela veut dire que le travail a encore plus besoin du capital que le capital n'a besoin du travail; cela veut dire que, lorsque le travail demande des capitaux, c'est lui qui en a le plus grand besoin, c'est lui qui dès lors paye la différence de prix, si vous en créez une par la loi. Je vais citer une autre preuve.

Si vous étiez conséquents..... (Interruption.)

-

M. LE PRÉSIDENT. — N'interrompez pas; demandezmoi la parole, je vous l'accorderai; mais n'interrompez pas l'orateur.

M. THIERS. Si vous étiez conséquents, vous proposeriez d'autres impôts sur les capitaux mobiliers, et vous n'y avez pas même pensé. Dites-moi pourquoi, au milieu d'une assemblée qui assurément n'a pas d'aversion pour les idées nouvelles, après une révolution dont la prétention a été d'inaugurer beaucoup d'idées jusque-là repoussées, pourquoi il ne s'est présenté à l'esprit de personne de proposer un impôt sur les rentes; et cependant, durant les dix-huit années qui ont précédé la révolution du 24 février, on avait quelquefois songé à un impôt sur les rentes. Pourquoi ne l'a-t-on pas proposé cette fois ? C'est que tout le monde a compris que créer un impôt sur les rentes, ce n'est pas, en réalité, percevoir un impôt.

C'est tout simplement, en prenant une rente 5 pour cent pour exemple, comme si vous ne donniez plus que 4 pour cent d'intérêt en faisantun emprunt. On vous verserait un capital proportionné au nouvel intérêt. Il est donc bien vrai que, si vous frappez le capital mobilier d'un impôt, à l'instant même c'est l'intérêt du capital que vous élevez. Or, dans aucun pays initié aux véritables principes financiers, il n'est entré dans l'esprit de personne de frapper les capitaux, parce que c'est élever le taux de l'intérêt; et l'on ne peut pas causer à un travail, à une industrie auxquels on s'intéresse, de plus grand mal que d'élever le taux de l'intérêt, car les capitaux sont le principal instrument. J'affirme donc que, dans aucune époque, dans aucun pays où quelques lumières président à l'administration, on n'a songé à imposer le capital mobilier. A quoia-t-on pensé ? On a pensé à l'impôt sur le revenu ; ce qui est tout autre chose. Si c'était un projet d'impôt sur le revenu qu'on eût la prétention de nous apporter, nous examinerions; nous examinerions, sans toutefois nous engager, car, sous un gouvernement nouveau, tout impòt nouveau a de grandes difficultés, et celui-ci en présente de particulièrement grandes. Cependant j'ai déclaré devant le comité des finances, dont j'ai l'honneur de faire partie, que, parmi tous les impôts nouveaux, c'est celui qui mérite d'être le plus sérieusement examiné et même essayé. Lorsqu'il sera apporté ici, je le discuterai, pour ma part, en toute bonne foi, car je reconnais que c'est un

essai qui mérite d'être pris en sérieuse considération.

Mais l'impôt sur le revenu n'est pas une chose arbitraire : il est parfaitement connu, il a existé en France avant 1789, il existe en Angleterre aujourd'hui sous le nom d'income-tax, et il a des caractères qui ne permettent pas de le confondre avec un impôt sur le capital mobilier.

Ces caractères, je vous prie de me permettre de les tracer en peu de mots, et vous verrez que, si l'impôt sur le revenu est parfaitement juste, parfaitement bien entendu, l'impôt sur le capital mobilier est à la fois barbare et contraire à toute science financière. Le premier caractère de l'impôt sur le revenu, c'est d'être un impôt extrême, pour les circonstances urgentes et difficiles. De ce que c'est un impôt extrême pour les circonstances difficiles, ce n'est pas une raison pour l'écarter aujourd'hui ; au contraire, nos finances réclament les plus grandes ressources du pays, les dernières ressources du pays. (Non! Non! -Mouvements divers. Mais si Agitation.) !

Non! non! je le veux bien. Vous m'entendrez tout à l'heure, et vous verrez que, loin de vouloir atteindre le crédit public en exagérant l'état de nos finances, je tiens, au contraire, à lui prêter secours.

Je répète donc que, de ce qu'il est un impôt extrême, ce n'est pas une raison pour le repousser aujourd'hui; au contraire. Cet impôt, dans notre ancienne histoire, a figuré, sous les noms de vingtième et de

dixième, dans les temps les plus difficiles. Il a été imaginé pour la première fois lors de la guerre de la succession d'Espagne ; il a reparu lors de la succession d'Autriche, et encore dans la guerre de Sept ans, et il avait pour but de frapper tous les revenus sans exception.

En Angleterre, il a été imaginé par M. Pitt pour suffire aux frais de la guerre ; il a été mal accueilli, mais la nécessité l'a fait supporter; et tout récemment M. Peel, considérant, quoique en temps de paix, que le long déficit des finances anglaises réclamait une ressource extrême, l'a présenté. Il a été l'objet d'une sorte de réprobation; et cependant le bon sens de l'Angleterre, en reconnaissant la nécessité, a fini par l'admettre.

Son premier caractère est donc d'être une mesure extrême; le second, c'est de s'adresser à tous les genres de revenus sans exception.

y a le travail pauvre, il y

Ainsi, par exemple, s'il y a le travail a aussi le travail riche; s'il y a le capital riche, il y a aussi le capital pauvre ; et il ne faut pas croire qu'on frappe le pauvre en frappant le travail, et le riche en frappant le capital, car il y a des riches et des pauvres dans le travail, comme il y a des riches et des pauvres dans le capital.

Exemple Vous allez, par l'impôt sur les hypothèques, frapper un pauvre rentier qui aura peut-être 12 ou 1,500 francs de rente et auquel vous demanderez le cinquième de son revenu. Mais à côté de cela, il y

a le riche commerçant qui fait des bénéfices importants de 100 à 200,000 francs par an; il y a le riche banquier, le riche médecin, le riche avocat, auxquels vous ne demandez aucune part de leurs profits, de leur fortune annuelle; et c'est pour cela que, dans l'impôt sur le revenu, on a eu la précaution de s'adresser à tous les genres de profits, sans exception. Aussi, en Angleterre et en France, lorsque le dixième ou le vingtième existait, voici comment on procédait. On s'adressait à la situation de l'individu tout entière; on ne lui disait pas : Vous êtes propriétaire d'une maison qui rapporte tant de mille livres, vous êtes propriétaire de tant de rentes sur l'État; on lui disait: D'après la notoriété, vous avez à dépenser par an 50,000 francs; eh bien, vous donnerez 3, 4, 5, 6 pour cent de votre

revenu.

En agissant ainsi, outre qu'il y a justice à s'adresser à la situation tout entière de l'individu, c'est-àdire à toutes ses facultés, il y a prudence financière, car on ne fait pas monter l'intérêt des capitaux lorsqu'on s'adresse à un individu et qu'on lui dit : Vous avez 50,000 francs de revenu, vous nous abandonnerez tant pour cent de ce revenu. Comme on ne s'adresse ni à ses rentes, ni à ses créances hypothécaires, ni à ses actions, on n'agit pas sur l'intérêt des capitaux, et on a le double avantage d'être juste d'abord, en frappant toutes les facultés du contribuable, et secondement de ne pas agir sur le taux de l'intérêt, de ne pas faire monter le prix des capitaux mobiliers. (Très bien !)

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