Slike stranica
PDF
ePub

loin, pour que l'influence de la France ne se borne. pas au Rhin et aux Pyrénées, mais pour aller à 2 et à 3,000 lieues faire ce que font les Anglais, nous faire respecter. Pourquoi donc ces 120 millions consacrés à notre marine, si vous déclarez que, parce que l'outrageur est loin de nous il peut impunément égorger et spolier vos nationaux ? Si votre marine est impuissante à les protéger, supprimez le budget de la marine. Quant à moi, je suis profondément convaincu, et ce n'est pas comme homme d'opposition que je le dis, c'est comme homme de gouvernement, quant à moi, je déclare que vous pouvez agir efficacement, sans difficulté aucune, sans complication aucune avec l'Europe.

Oh! si une complication était à craindre avec l'Europe, sur-le-champ je me rallierais à tous vos sentiments, et, permettez-moi d'ajouter un mot sans vous blesser, même à ce que j'appellerai vos préjugés. Je deviendrais partisan de la paix presque sans mesure, si l'on pouvait aujourd'hui troubler le monde; oui, dans l'état du monde, il faut éviter la moindre commotion. Mais il y a un nécessaire à faire partout. Quand il s'agit de notre commerce, de nos nationaux, il faut être comme les Anglais, qui, pour un matelot blessé, ont entrepris de grandes guerres; il faut que partout où votre pavillon se trouve, s'il y a un Français molesté, ce pavillon puisse apparaître pour le faire respecter.

On parle du commerce par la paix. Oui, le com

1

merce a besoin de la paix, cela est incontestable; ce sont de ces choses qu'on n'aurait pas besoin de dire même à l'école; mais, outre cela, le commerce a besoin d'être protégé. Et qui aurait osé dire à l'admirable bailly de Suffren, quand il était dans les mers de l'Inde, sur lesquelles il a failli établir l'influence de la France; quand il livrait ses admirables batailles qui sont la plus grande gloire de notre nation sous le rapport maritime, qui aurait osé lui dire qu'avec la paix on fonde le commerce, et non avec la guerre? Il aurait souri de pitié, s'il avait pu imaginer que les descendants des Français d'alors pourraient dire et entendre un jour de pareilles choses. (Très bien! Très bien!)

Je veux la paix. Elle n'a pas eu, ici, dans cette enceinte, quand c'était bien plus difficile qu'aujourd'hui, quand nous n'étions pas en majorité, elle n'a pas eu de plus chaleureux défenseur que moi. Elle me trouvera toujours pour défenseur, lorsque, dans l'état du monde, on viendra sérieusement l'ébranler; mais quand, sous le mot de paix, on cache une politique que je ne veux pas blâmer (je ne veux rien blâmer dans le pouvoir aujourd'hui), une politique sans résolution, sans idée, sur ce sujet au moins, oh! la paix ne doit pas couvrir de telles choses! Il est impossible qu'en envoyant un négociateur armé, avec des navires et quelques hommes, on aboutisse à la guerre. Rendez aux mots leur véritable sens; ce n'est pas la guerre, la guerre dont la crainte ébranle justement

beaucoup d'esprits; c'est la guerre avec Rosas. Ce n'est pas une guerre plus considérable que celle que nous avons faite à Saint-Jean-d'Ulloa et au Maroc; c'est une de ces guerres que les nations maritimes doivent savoir faire quand elles veulent se faire respecter dans le monde.

(Approbation prolongée. Aux voix ! Aux voix!)

Après une réplique de M. Rouher, l'Assemblée, à la majorité de 338 voix contre 300, adopta un ordre du jour motivé présenté par M. de Rancé et ainsi conçu :

« Considérant que le traité Le Prédour n'a pas été soumis à l'Assemblée nationale; considérant que le Gouvernement déclare qu'il entend continuer les négociations dans le but de garantir l'honneur et les intérêts de la république, et que nos nationaux seront sérieusement protégés contre toutes les éventualités sur les rives de la Plata, l'Assemblée passe à l'ordre du jour. »

CLIX

DISCOURS

SUR

L'INSTRUCTION PUBLIQUE

(DISCUSSION GÉNÉRALE DU PROJET DE LOI)

PRONONCÉ LE 18 JANVIER 1850

A L'ASSEMBLÉE LÉGISLATIVE

L'article 9 de la Constitution du 4 novembre 1848 portait que l'enseignement est libre, en ajoutant, toutefois, que la liberté de l'enseignement s'exerce selon les conditions de moralité et de capacité déterminées par la loi, sous la surveillance de l'État, et que cette surveillance s'étend à tous les établissements d'éducation et d'enseignement, sans aucune exception.

En vue de se conformer à ces prescriptions constitutionnelles, M. de Falloux, ministre de l'instruction publique, avait réuni, sous la présidence de M. Thiers, une commission dont faisaient partie des membres éminents de l'Université, MM. Cousin, Saint-Marc Girardin, Dubois de la Loire-Inférieure; plusieurs membres du clergé, MM. Dupanloup, Sibour; des notabilités parlementaires, MM. de Montalembert, de Corcelle, Freslon, etc., etc., et des délibérations de cette commission était sorti un projet de loi que le ministre avait déposé le 8 juin 1849 sur le bureau de l'Assemblée législative. Ce projet de loi instituait d'abord un conseil supérieur de

VIII.

25

l'instruction publique composé de 24 membres dont la double mission était, disait l'exposé des motifs, d'assurer l'indépendance de l'enseignement libre et de maintenir celui de l'État en harmonie avec les traditions de l'esprit national qui avaient fait, siècle par siècle, la grandeur et l'unité de la France. L'Université, le clergé, la magistrature, l'enseignement libre, devaient être représentés dans ce conseil, et, en outre, dans chaque chef-lieu de département devait être organisé un conseil académique composé d'éléments de même nature et chargé d'exercer une surveillance et une action plus directes sur l'enseignement local. Quant à l'inspection des établissements publics ou privés prescrite par la Constitution, elle devait être faite par des inspecteurs généraux de l'instruction publique, des inspecteurs d'académie, des inspecteurs d'instruction primaire, et par les délégués des conseils académiques départementaux. Après avoir ainsi établi l'autorité et la surveillance de l'État, le projet de loi réglait les conditions de l'enseignement primaire et reconnaissait le droit d'exercer les fonctions d'instituteur public ou libre à tout individu âgé de vingt et un ans, muni du brevet de capacité et n'ayant pas subi de condamnation le rendant indigne de professer, à la condition de déclarer, au préalable, le lieu et le local où il entendait enseigner. En ce qui concernait l'enseignement secondaire, cet enseignement pouvait être également donné par tout Français âgé de vingt-cinq ans, n'ayant subi aucune condamnation le rendant indigne de professer, à la condition. d'être pourvu du diplôme de bachelier ou du brevet de capacité délivré par un jury de l'État, ou bien encore de justifier qu'il avait rempli pendant cinq ans les fonctions de professeur ou de surveillant dans un établissement d'instruction secondaire public ou privé. Mais le projet de loi ne contenait aucune disposition relative à l'enseignement supérieur, et le ministre, en faisant connaître dans l'exposé

« PrethodnaNastavi »