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l'espère. Si nous échouions, ce serait un grand malheur; mais, permettez-moi cependant de vous dire une chose en finissant : Nous ne serions pas les seuls, depuis deux ans, qui n'aurions pas réussi.

(Vive hilarité et marques nombreuses d'approbation à droite.)

(L'orateur, de retour au banc de la commission, reçoit les félicitations d'un grand nombre de membres.)

L'amendement Wallon fut rejeté, et l'art. 7 fut adopté tel qu'il avait été proposé par la commission.

CLXII

DISCOURS

DANS LA DISCUSSION DU PROJET DE LOI

SUR

L'INSTRUCTION PUBLIQUE

(AMENDEMENT LASTEYRIE)

PRONONCÉ LE 23 FÉVRIER 1850

A L'ASSEMBLÉE LÉGISLATIVE

Au cours de la deuxième délibération, et au moment où l'assemblée allait aborder la discussion du titre 3 concernant l'instruction secondaire, M. Ferdinand de Lasteyrie proposa un article nouveau ainsi conçu : « L'enseignement secondaire comprend l'instruction morale et religieuse, l'étude de la langue française, des langues anciennes et modernes, de l'histoire, de la géographie, des sciences mathématiques et physiques qui servent de préparation au baccalauréat et aux examens d'admission dans les écoles spéciales. »

A l'appui de cette disposition supplémentaire, M. de Lasteyrie fit observer que son but, en la proposant, était de retrancher les études philosophiques du programme de l'enseignement secondaire. La vraie place de ces études, en effet, était dans l'enseignement supérieur. Là seulement on pouvait leur consacrer tout le soin et le temps qu'elles comportaient, tandis qu'ébauchées dans l'enseignement secon

daire, elles ne pouvaient que fausser l'esprit des enfants et inquiéter ainsi la conscience de beaucoup de familles.

La proposition fut combattue par M. Thiers dans les termes suivants:

Messieurs,

Je viens, au nom de la Commission, vous exprimer très brièvement son avis sur l'amendement qu'a proposé hier M. Ferdinand de Lasteyrie.

On a paru s'étonner de ce que la Commission avait demandé le renvoi et n'avait pas exprimé immédiatement son avis sur ce grave sujet. Le motif en est bien simple c'est qu'aucun amendement de ce genre n'avait été présenté à la Commission, et qu'aucun de ses membres ne s'était imaginé que l'enseignement philosophique pût être, en France, retranché de l'enseignement secondaire...

M. FERDINAND DE LASTEYRIE. Il y a seize jours que l'amendement est imprimé et distribué.

M. THIERS. L'avis de la Commission, en tout cas, après une courte délibération, l'avis de la Commission est formel il est pour le maintien de l'enseignement philosophique dans l'enseignement secondaire. (A gauche. Très bien!) Je vais dire à quelle condition, dans quelle limite et par quels motifs. Je crois que la cause principale de l'erreur qu'on commet à ce sujet est dans la manière d'entendre les divisions de l'en

seignement. Ce qu'on appelle l'enseignement supérieur étant considéré, en général, comme l'enseignement le plus élevé, il semble que l'enseignement de la philosophie, qui est une science abstraite, profonde, difficile, féconde en contestations redoutables, il semble, à quelques esprits au moins, que cet enseignement serait plus naturellement placé dans ce qu'on appelle l'enseignement supérieur.

Eh bien, cela tient à une erreur : l'enseignement qu'on appelle supérieur en France serait plus exactement défini si on l'appelait l'enseignement spécial. Ainsi, lorsque les jeunes gens, après avoir, dans les écoles secondaires, appris tout ce qui doit composer le savoir de l'homme éclairé, veulent se destiner à telle ou telle carrière, à la magistrature, à l'armée, aux travaux publics, on les envoie dans des écoles spéciales, où on leur apprend des choses plus élevées que celles qu'on enseigne dans l'enseignement secondaire, mais on leur apprend spécialement certaines choses. Dans les écoles de droit, on apprend spécialement les lois; à Saint-Cyr, à Metz, on apprend spécialement la science militaire; dans les écoles de médecine, on apprend spécialement la médecine; dans les écoles de théologie, on apprend spécialement la science des choses religieuses. Mais, dans l'enseignement secondaire, on doit apprendre tout ce qui compose le savoir de l'homme éclairé chez les nations civilisées.

Eh bien, je vous le demande, croiriez-vous que la

jeunesse, en France, aurait appris tout ce qu'elle doit savoir, si, en sortant des collèges de l'État, elle ne savait pas, d'une manière générale, avec une prudence dont je tàcherai tout à l'heure de tracer les limites, quelles sont les grandes questions qui ont agité l'esprit humain, et si, par exemple, lorsque vous prononcez les mots de scepticisme, de dogmatisme, vos jeunes gens ne savaient ce que veulent dire ces grands mots que par ouï-dire, ou parce qu'en lisant tel ou tel livre, ils les auraient rencontrés? Non, il faut que la jeunesse française, qui, comme cela s'est fait dans tous les temps et chez toutes les nations, a appris les belles-lettres, sache que l'esprit humain s'est préoccupé de telles ou telles questions, qu'il y a des écoles dans lesquelles on affirme, d'autres dans lesquelles on doute. Celles dans lesquelles on affirme sont des écoles dogmatiques, celles dans lesquelles on doute sont des écoles sceptiques. Il faut qu'elle puisse attribuer les grands génies, dont l'histoire de l'esprit humain a donné tant et de si éclatants modèles dans le monde, à telle ou telle école; en un mot, que votre jeunesse sache ce que doit savoir l'homme éclairé.

Eh bien, véritablement, les études seraient abaissées en France si l'enseignement philosophique disparaissait de l'enseignement secondaire.

Nous avons voulu faire une loi sévère, cela est vrai; nous avons voulu faire une loi qui rassurât la société contre les dangers d'un enseignement irré

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