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aux excès qui en étaient la suite; mais une telle démarche présentait trop d'écueils, et la coalition était là qui épiait le législateur pour interpréter ses vues, torturer ses expres

sions.

« Nos ennemis, dit Robespierre, se sont proposé un double but en imprimant ce mouvement violent contre le culte catholique: le premier de recruter la Vendée, d'aliéner les peuples de la nation française, et de se servir de la philosophie pour détruire la liberté; le second, de troubler la tranquillité de l'intérieur, et de donner ainsi plus de force à la coalition de nos ennemis.

» Je pourrais prouver jusqu'à l'évidence la conspiration dont je viens de vous montrer les principales bases, si je voulais mettre à nu ceux qui en ont été les premiers agents. Je me contenterai de vous dire qu'à la tête il y a des émissaires de toutes les puissances qui nous font la guerre, qu'il y a des ministres protestants.

» Qu'avez-vous à faire dans ces circonstances? Parler en philosophes? Non, mais en législateurs politiques, en hommes sages et éclairés. Vous devez protéger les patriotes contre leurs ennemis, leur indiquer les piéges qu'on leur tend, et vous garder d'inquiéter ceux qui auraient été trompés par des insinuations perfides; protéger enfin ceux qui veulent un culte qui ne trouble pas la société. Vous devez encore empêcher les extravagances, les folies qui coïncident avec les plans de conspiration. Il faut corriger les écarts du patriotisme; mais faites-le avec le ménagement qui est dû à des amis de la liberté qui ont été un instant égarés.

» Je demande que vous défendiez aux autorités particulières de servir nos ennemis par des mesures irréfléchies, et qu'aucune force armée ne puisse s'immiscer dans ce qui appartient aux opinions religieuses, sauf dans le cas où elle serait requise pour des mesures de police.

» Enfin je vous propose une mesure digne de la convention, c'est de rappeler solennellement tous les citoyens à l'intérêt public, de les éclairer par vos principes, comme

vous les animez par votre exemple, et de les engager à mettre de côté toutes les disputes dangereu ses pour ne s'occuper que du salut de la patrie. »

La proposition de Robespierre fut adoptée, et décrétée le lendemain en ces termes :

La convention nationale, considérant ce qu'exigent d'elle les principes qu'elle a proclamés au nom du peuple français, et le maintien de la tranquillité publique, décrète:

Art. 1. Toutes violences et mesures contraires à la liberté des cultes sont défendues.

>> 2. La surveillance des autorités constituées et l'action de la force publique se renfermeront à cet égard, chacune pour ce qui les concerne, dans les mesures de police et de sûreté publique.

>> 3. La convention, par les dispositions précédentes, n'entend déroger en aucune manière aux lois ni aux précautions de salut public contre les prêtres réfractaires ou turbulents, ou contre tous ceux qui tenteraient d'abuser du prétexte de la religion pour compromettre la cause de la liberté. Elle n'entend pas non plus improuver ce qui a été fait jusqu'à ce jour en vertu des arrêtés des représentants du peuple, ni fournir à qui que ce soit le prétexte d'inquiéter le patriotisme, et de ralentir l'essort de l'esprit public.

>> La convention invite tous les bons citoyens, au nom de la patrie, à s'abstenir de toutes disputes théologiques ou étrangères au grand intérêt du peuple français, pour concourir de tous leurs moyens au triomphe de la république et à la ruine de tous ses ennemis.

>> L'adresse en forme de réponse au manifeste des rois ligués contre la république, décrétée par la convention nationale le 15 frimaire, sera réimprimée par les ordres des administrations de district, pour être répandue et affichée dans l'étendue de chaque district. Elle sera lue, ainsi que le présent décret, au plus prochain jour de décadi, dạns les assemblées de commune et de section par les officiers municipaux ou les présidents de section. »

SÉANCE DU VINGT-CINQ DÉCEMBRE.

Principes du gouvernement révolutionnaire.

Robespierre, au nom du comité de salut public. « Citoyens représentants du peuple, les succès endorment les âmes faibles; ils aiguillonnent les âmes fortes.

» Laissons l'Europe et l'histoire vanter les miracles de Toulon (1), et préparons de nouveaux triomphes à la liberté.

» Les défenseurs de la république adoptent la maxime de César; ils croient qu'on n'a rien fait, quand il reste quelque chose à faire. Il nous reste encore assez de dangers pour occuper tout notre zèle.

>> Vaincre des Anglais et des traîtres est une chose assez facile à la valeur de nos soldats républicains : il est une entreprise non moins importante et plus difficile, c'est de confondre par une énergie constante les intrigues éternelles de tous les ennemis de notre liberté, et de faire triompher les principes sur lesquels doit s'asseoir la prospérité publique.

» Tels sont les premiers devoirs que vous avez imposés à votre comité de salut public.

» Nous allons développer d'abord les principes et la nécessité du gouvernement révolutionnaire; nous montrerons ensuite la cause qui tend à le paralyser dans sa nais

sance.

>>> La théorie du gouvernement révolutionnaire est aussi neuve que la révolution qui l'a amené. Il ne faut pas la chercher dans les livres des écrivains politiques, qui n'ont point prévu cette révolution; ni dans les lois des tyrans,

(1) On venait d'annoncer la reprise de cette ille par les armées de la république.

qui, contents d'abuser de leur puissance, s'occupent peu d'en rechercher la légitimité; aussi ce mot n'est-il pour l'aristocratie qu'un sujet de terreur ou un texte de calomnie, pour les tyrans qu'un scandale, pour bien des gens qu'une énigme il faut l'expliquer à tous pour rallier au moins les bons citoyens aux principes de l'intérêt public. La fonction du gouvernement est de diriger les forces morales et physiques de la nation vers le but de son institution.

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» Le but du gouvernement constitutionnel est de conserver la république ; celui du gouvernement révolutionnaire est de la fonder.

>> La révolution est la guerre de la liberté contre ses ennemis; la constitution est le régime de la liberté victorieuse et paisible.

>> Le gouvernement révolutionnaire a besoin d'une activité extraordinaire, précisément parcequ'il est en guerre. Il est soumis à des règles moins uniformes et moins rigoureuses, parceque les circonstances où il se trouve sont orageuses et mobiles, et surtout parcequ'il est forcé à déployer sans cesse des ressources nouvelles et rapides pour des dangers nouveaux et pressants.

>> Le gouvernement constitutionnel s'occupe principalement de la liberté civile, et le gouvernement révolutionnaire de la liberté publique. Sous le régime constitutionnel, il suffit presque de protéger les individus contre l'abus de la puissance publique; sous le régime révolutionnaire la puissance publique elle-même est obligée de se défendre contre toutes les factions qui l'attaquent.

» Le gouvernement révolutionnaire doit aux bons citoyens toute la protection nationale; il ne doit aux ennemis du peuple que la mort.

D

» Ces notions suffisent pour expliquer l'origine et la nature des lois que nous appelons révolutionnaires. Ceux qui les nomment arbitraires ou tyranniques sont des sophistes stupides ou pervers qui cherchent à confondre les contraires : ils veulent soumettre au même régime la paix et la guerre,

la santé et la maladie, ou plutôt ils ne veulent que la résurrection de la tyrannie et la mort de la patrie; s'ils invoquent l'exécution littérale des adages constitutionnels, ce n'est que pour les violer impunément: ce sont de lâches assassins, qui, pour égorger sans péril la république au berceau, s'efforcent de la garrotter avec des maximes vagues dont ils savent bien se dégager eux-mêmes.

>> Le vaisseau constitutionnel n'a point été construit pour rester toujours dans le chantier; mais fallait-il le lancer à la mer au fort de la tempête, et sous l'influence des vents contraires? C'est ce que voulaient les tyrans et les esclaves, qui s'étaient opposés à sa construction; mais le peuple français vous a ordonné d'attendre le retour du calme. Ses vœux unanimes, couvrant tout-à-coup les clameurs de l'aristocratie et du fédéralisme, vous ont commandé de le délivrer d'abord de tous ses ennemis.

» Les temples des dieux ne sont pas faits pour servir d'asile aux sacriléges qui viennent les profaner, ni la constitution pour protéger les complots des tyrans qui cherchent à la détruire.

» Si le gouvernement révolutionnaire doit être plus actif dans sa marche et plus libre dans ses mouvements que le gouvernement ordinaire, en est-il moins juste et moins légitime? Non! Il est appuyé sur la plus sainte de toutes les lois, le salut du peuple; sur le plus irréfragable de tous les titres, la nécessité.

» Il a aussi ses règles, toutes puisées dans la justice et dans l'ordre public. Il n'a rien de commun avec l'anarchie ni avec le désordre; son but au contraire est de le réprimer, pour amener et pour affermir le règne des lois. Il n'a rien de commun avec l'arbitraire; ce ne sont point les passions particulières qui doivent le diriger, mais l'intérêt public.

» Il doit se rapprocher des principes ordinaires et généraux dans tous les cas où ils peuvent être rigoureusement appliqués sans compromettre la liberté publique. La mesure de sa force doit être l'audace ou la perfidie des conspirateurs. Plus il est terrible aux méchants, plus il doit être

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