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de route leur seront expédiées jusqu'au lieu de leur résidence, et leurs appointements ou soldes seront acquittés jusqu'au 1er floréal.

» Quant à l'artillerie, cette partie fortement républicaine de nos armées, et qui est dépositaire incorruptible de la foudre nationale, les canonniers de Paris ont montré dans ces circonstances difficiles, comme dans toutes les crises. de la révolution, qu'ils ne formaient de vœux et ne connaissaient d'obéissance que pour le peuple et ses représentants. Les conjurés avaient osé concevoir des espérances; mais cette injurieuse pensée ne devait pas même les atteindre, ils vous l'ont prouvé avec énergie. Nous vous proposons de décréter qu'il ne sera rien innové quant à l'artillerie parisienne, attachée à l'armée révolutionnaire. Leur courage et leur fidélité seront en réquisition permanente pour le service extraordinaire que nécessite le foyer des conspirations, au milieu duquel nous fabriquons tous les jours la liberté. Mais il est essentiel de dire que le conseil exécutif ne pourra disposer d'aucune de ses parties, sans un arrêté du comité de salut public.

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» Citoyens, que ne puis-je ici élever ma voix et faire entendre vos intentions honorables à tous les bons citoyens qui composent l'armée révolutionnaire ! je leur dirais : Vous avez abandonné vos foyers et vos familles pour réprimer ou punir les ennemis de votre patrie; eh bien! un ennemi secret s'éfait placé à votre tête, et avait voulu abuser, en faveur du despotisme, du courage et des sacrifices que vous avez résolu de n'employer qu'en faveur de la liberté. Bri- · sons l'instrument de dommage qu'il avait formé. Les armes qui vous ont été confiées ont été près de nuire à la république; les fonctions militaires qui vous ont été confiées ne sont que des témoignages momentanés de confiance, que la nation continue, retire ou modifie suivant ses besoins. Servez votre pays dans quelque poste, dans quelque armée · qu'il vous place, et apprenez à tous vos concitoyens à ne mettre jamais en balance un homme ou une institution et la patrie. »

Voici le projet de décret que je vous propose.

La convention nationale, après avoir entendu le rapport de son comité de salut public, décrète :

« Art. 1. L'armée révolutionnaire est licenciée; les volontaires qui la composent, et qui voudront rentrer dans leurs foyers, remettront les chevaux, armes et effets d'équipements militaires qui leur ont été fournis par la république. Il leur sera expédié des feuilles de route pour se rendre au lieu de leur résidence; les soldes et appointements seront néanmoins payés jusqu'au 1er floréal prochain.

» 2. Ceux qui voudront continuer leur service seront incorporés individuellement, et à leur choix, dans les anciens cadres d'infanterie et troupes à cheval des différentes armées de la république.

» 3. Il n'est rien innové quant à l'artillerie parisienne, attachée à l'armée révolutionnaire, et à son emploi actuel; elle demeure en réquisition pour le service extraordinaire, et cependant le conseil exécutif provisoire ne pourra disposer d'aucune de ses parties, sans un arrêté particulier du comité de salut public. »

Ce projet de décret est adopté.

SÉANCE DU TRENTE-UN MARS (11 germinal).

Arrestation de Danton, de Camille Desmoulins, etc. Rapport de Saint-Just sur les modérés.

Legendre. « Citoyens, quatre membres de cette assemblée sont arrêtés de cette nuit. Je sais que Danton en est un, mais j'ignore les noms des autres : qu'importent leurs noms, s'ils sont coupables! Mais, citoyens, je viens demander que les membres arrêtés soient traduits à la barre, où vous les entendrez, et où ils seront accusés ou absous par vous. Citoyens, je ne suis que le fruit du génie de la liberté ; je suis uniquement son ouvrage, et je ne développerai qu'avec une grande simplicité la proposition que je vous fais : mon éducation n'est pas l'ouvrage des hommes; elle

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n'est que l'ouvrage de la nature; n'attendez de moi que l'explosion d'un sentiment.

» Citoyens, je le déclare, je crois Danton aussi pur que moi, et je ne pense pas que qui que ce soit me puisse reprocher un acte qui blesse la probité la plus scrupuleuse..... (Murmures, agitation.)

» Je n'apostropherai aucun membre des comités de salut public et de sûreté générale ; mais j'ai le droit de craindre que des haines particulières et des passions individuelles n'arrachent à la liberté des hommes qui lui ont rendu les plus grands et les plus utiles services. Il m'appartient de dire cela de l'homme qui en 1792 fit lever la France entière par les mesures énergiques dont il se servit pour ébranler le peuple, de l'homme qui fit décréter la peine de mort contré quiconque ne donnerait pas ses armes ou n'irait pas en frapper l'ennemi.

» L'ennemi était alors aux portes de Paris : Danton vint, et ses idées sauvèrent la patrie.

» J'avoue que je ne puis le croire coupable, et ici je veux rappeler le serment que nous nous fîmes en 1790, qui engagea celui de nous deux qui verrait l'autre survivre à son attachement pour la cause du peuple à le poignarder sur-le-champ, et dont j'aime à me souvenir aujourd'hui. Je le répète, je crois Danton aussi pur que moi. Il est dans les fers depuis cette nuit; on a craint sans doute que ses réponses ne détruisissent les accusations dirigées contre lui. Je demande en conséquence qu'avant que vous entendiez aucun rapport, les détenus soient mandés et entendus.»>

Fayau combat la motion de Legendre, et la discute longuement; quelques membres cependant demandent qu'on la mette aux voix. Tout-à-coup Robespierre paraît: sa présence impose à l'assemblée. Il monte à la tribune, et s'exprime ainsi :

« A ce trouble depuis long-temps inconnu qui règne dans cette assemblée, aux agitations qu'ont produites les premières paroles de celui qui a parlé avant le dernier opinant, il est aisé de s'apercevoir en effet qu'il s'agit ici d'un

grand intérêt, qu'il s'agit de savoir si quelques hommes aujourd'hui doivent l'emporter sur la patrie. Quel est donc ce changement qui paraît se manifester dans les principes des membres de cette assemblée, de ceux surtout qui siègent dans un côté qui s'honore d'avoir été l'asile des plus intrépides défenseurs de la liberté ? Pourquoi une doctrine qui paraissait naguère criminelle et méprisable est-elle reproduite aujourd'hui ? Pourquoi cette motion, rejetée quand elle fut proposée par Danton, Bazire, Chabot et Fabre d'Églantine, a-t-elle été accueillie tout à l'heure par une portion des membres de cette assemblée? Pourquoi? Parcequ'il s'agit aujourd'hui de savoir si l'intérêt de quelques hypocrites ambitieux doit l'emporter sur l'intérêt du peuple français. (Applaudissements.)

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Eh quoi! n'avons-nous donc fait tant de sacrifices héroïques, au nombre desquels il faut compter ces actes d'une sévérité douloureuse, n'avons-nous fait ces sacrifices que pour retourner sous le joug de quelques intrigants qui prétendaient dominer?

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Que m'importent à moi les beaux discours, les éloges qu'on se donne à soi-même et à ses amis! Une trop longue et trop pénible expérience nous a appris le cas que nous devons faire de semblables formules oratoires. On ne demande plus ce qu'un homme et ses amis se vantent d'avoir fait dans telle époque, dans telle circonstance particulière de la révolution; on demande ce qu'ils ont fait dans tout le cours de leur carrière politique. (Applaudissements.)

» Legendre paraît ignorer les noms de ceux qui sont arrêtés; toute la convention les sait. Son ami Lacroix est du nombre de ces détenus. Pourquoi feint-il de l'ignorer? Parcequ'il sait bien qu'on ne peut sans impudeur défendre Lacroix. Il a parlé de Danton, parcequ'il croit sans doute qu'à ce nom est attaché un privilége... Non, nous n'en voulons point de priviléges! nous n'en voulons pas d'idoles ! (Applaudissements réitérés. )

» Nous verrons dans ce jour si la convention saura briser une prétendue idole pourrie depuis long-temps, ou si dans

sa chute elle écrasera la convention et le peuple français ! Plus il a trompé les patriotes qui avaient eu confiance en lui, plus il doit éprouver la sévérité des amis de la liberté.

» Ce qu'on a dit de Danton ne pouvait-il pas s'appliquer à Brissot, à Pétion, à Chabot, à Hébert même, et à tant d'autres, qui ont rempli la France du bruit fastueux de leur patriotisme trompeur? Quel privilége auraient-ils donc? En quoi Danton est-il supérieur à ses collègues? A Chabot, à Fabre d'Eglantine, son ami et son confident, dont il a été l'ardent défenseur? en quoi est-il supérieur à ses concitoyens ? Est-ce parceque quelques individus trompés, et d'autres qui ne l'étaient pas, se sont groupés autour de lui pour marcher à sa suite, à la fortune et au pouvoir ?

la

» Citoyens, c'est ici le moment de dire la vérité. Je ne reconnais à tout ce qu'on a dit que le présage sinistre de la ruine de la liberté et de la décadence des principes. Quels sont en effet ces hommes qui sacrifient à des liaisons personnelles, à la crainte peut-être, les intérêts de la patrie! qui au moment où l'égalité triomphe osent tenter de l'anéantir dans cette enceinte ! On veut vous faire craindre les abus du pouvoir, de ce pouvoir national que vous avez exercé, et qui ne réside pas dans quelques hommes seulement... Qu'avez-vous fait que vous n'ayez fait librement, qui n'ait sauvé la république, qui n'ait été approuvé par France entière ! On veut vous faire craindre que le peuple périsse victime des comités, qui ont obtenu la confiance publique, qui sont émanés de la convention nationale, et qu'on veut en séparer, car tous ceux qui défendent sa dignité sont voués à la calomnie; on craint que les détenus ne soient opprimés... On se défie donc de la justice nationale, des hommes qui ont obtenu la confiance de la convention nationale; on se défie de la convention qui leur a donné cette confiance, de l'opinion publique qui l'a sanctionnée. Je dis que quiconque tremble en ce moment est coupable; car jamais l'innocence ne redoute la surveillance publique. (Applaudissements. )

» Je dois ajouter ici qu'un devoir particulier m'est imposé

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