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Le président fait à la députation une courte réponse; il la félicite de son zèle, lui annonce que ses vœux sur l'armée révolutionnaire ont été prévenus, que le courage et la justice sont à l'ordre du jour.

Robespierre prend le fauteuil. Une députation de la section de l'Unité demande la destitution des nobles et des prêtres qui occupent des emplois civils et militaires, l'exécuplus sévère des lois contre l'agiotage et l'accaparement, le jugement prompt et définitif de la veuve Capet, de Brissot et des autres députés détenus, l'institution d'une armée révolutionnaire, et de douze tribunaux révolutionnaires ambulants, autorisés à juger sur-le-champ, sans autres formes que celles qu'ils jugeront nécessaires à leur propre conviction.

Enfin, cette section demande que la convention reste à son poste jusqu'à ce que la constitution soit faite et consolidée.

Drouet. « Les mouvements du peuple, la fermentation qu'il manifeste, annoncent son indignation et sa fureur. Elle est sans doute provoquée par des motifs légitimes. On vous demande de grandes mesures. Mandataires du peuple, ce serait trahir la justice que de méconnaître son droit à une vengeance éclatante contre ses ennemis. Depuis assez long-temps on abuse de la générosité du peuple français. Votre loyauté et votre indulgence provoquent de toutes parts des trahisons. N'avez-vous pas épargné des hommes qui se flattaient autrefois d'être des modérés, et qui, après avoir tramé dans l'ombre, et sous le voile de l'hypocrisie, leurs complots, lèvent l'étendard de la révolte, se coalisent avec les tyrans et assassinent le peuple ? A quoi vous a servi votre modération? Soyez généreux après la victoire, mais terribles tant que dure le combat. Le jour est venu d'être d'autant plus inflexibles que vous avez été faibles. C'est le moment de verser le sang des coupables. Qu'avons-nous besoin de notre réputation en Europe? Notre générosité a passé pour faiblesse; elle a enhardi les traîtres et provoqué de nouveaux crimes; elle nous en a

donc rendus les complices...» (Plusieurs voix : C'est vrai.) Entraînés par des vues de philosophie, vous avez épargné les traîtres; vous demandiez, pour ainsi dire, des preuves par acte notarié, des conspirations dont le témoignage de l'Europe entière attestait l'existence, comme si les conjurés laissaient survivre des traces matérielles à leurs complots! Quel a été le succès de cette aveugle clémence que vous preniez pour de la magnanimité? Vous en a-t-on moins calomniés de tous côtés ne vous appelle-t-on pas des scélérats, des brigands, des assassins? Eh bien! puisque notre vertu, notre modération, nos idées philosophiques, ne nous ont servi de rien, soyons brigands pour le bonheur du peuple; soyons brigands... (Il s'élève de violents murmures. On demande que l'orateur soit rappelé à l'ordre.)

>>> Ce mot effraie votre vertu. Je ne vous propose pas en effet de faire des actes de brigands; c'est votre justice que je réclame; mais je ne veux point de demi-justice je veux que votre impassibilité brave les calomnies. On demande que nous élevions nos mesures à la hauteur de la révolution qu'elles doivent étayer. Eh bien! osez en prendre l'attitude, nous serons révolutionnaires, sans cesser d'être justes; et si les tyrans de l'Europe prétendent qu'être révolutionnaires, c'est être brigands, n'importe, vous aurez fait périr les traîtres, vous aurez sauvé la patrie.

» Vous venez de prendre une mesure de sûreté qui sa• tisfait à l'indignation publique mais ce n'est pas assez. Vous avez ordonné que les gens suspects seraient arrêtés. Je voudrais que vous déclarassiez à ces hommes coupables que si par impossible la liberté était en péril, vous les massacreriez impitoyablement (Un murmure sourd se fait entendre et couvre presque la voix de l'orateur. -On demande que la discussion soit fermée.-Thuriot annonce qu'il parlera après Drouet. Le silence se rétablit); que vous ne rendrez aux tyrans la terre de la liberté que couverte de cadavres... Faites cette déclaration solennelle... que les hommes suspects répondront sur leurs têtes des malheurs de l'état. Cette mesure paraîtra exa

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gérée; n'importe, je vous la propose; la France jugera.

» Je demande que le conseil général d'une commune, ou un comité révolutionnaire, en déclarant un homme suspect, n'ait pas besoin de donner ses motifs.

» Je demande que pour que la loi soit strictement exécutée, les représentants du peuple qui sont dans les départements usent avec la plus grande rigueur du plein pouvoir qui leur a été donné pour épurer les administrations fédéralistes, malveillantes ou faibles.»

Thuriot s'élance à la tribune. Il se fait un grand silence, au milieu duquel quelques applaudissements se font entendre.

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Thuriot. « On ne peut pas être divisé dans la convention sur la question de savoir si les têtes des hommes criminels qui trahissent la patrie doivent tomber sur l'échafaud; mais gardons-nous d'accueillir aucune de cesidées qui pourraient être avancées par des calculs criminels, par des hommes qui favoriseraient nos ennemis. (Il s'élève de nombreux applaudissements.)

>> Citoyens, ce n'est pas pour le crime que se font les révolutions, c'est pour le triomphe de la vertu. (Les plus vifs applaudissements s'élèvent à la fois dans toutes les parties de la salle. - Un grand nombre de membres prolongent plusieurs instants leurs battements de mains, les exclamations de l'enthousiasme et de l'approbation.) Ne disons pas que c'est pour la France, c'est pour l'humanité que nous travaillons. C'est ainsi qu'en consommant notre ouvrage, nous nous couvrirons d'une gloire éternelle. Loin de nous l'idée que la France soit altérée de sang; elle n'est altérée que de justice. (Des applaudissements universels interrompent chaque phrase de l'orateur.) L'homme qui combat à la face du monde pour une révolution qui a pour but l'égalité, la justice, le bonheur des hommes, veut qu'à l'instant où il prend les armes, aucun être sur la surface de la terre n'ait le moindre reproche à lui faire. Il faut que cette révolution, qui est l'ouvrage d'un génie extraordinaire, déifie tous les Français;

il faut que la France s'honore de chacune de vos actions, qu'on lise dans l'histoire avec tendresse tous les actes qui ont accompagné cette révolution. Citoyens, ne nous enlevons pas la jouissance la plus belle, la plus douce, celle d'avoir une âme pure, de porter avec soi une conscience irréprochable. Citoyens, si malheureusement, cédant à une impulsion étrangère ou à la terreur des puissances en- nemies, le peuple se livrait au plus léger mouvement, vos ennemis, qui veillent partout, s'en empareraient pour le tourner à leur profit; les administrations perfides qui ont calomnié Paris tireraient parti de ces mouvements désordonnés pour poursuivre leur atroce système. Tout doit être calculé lorsqu'on a à s'occuper de la liberté d'une grande nation, du bonheur universel; aucun évènement ne doit être transmis dans les annales de la révolution, quel on ne puisse assigner un motif louable.

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» Lors ́ même que vous prenez une mesure impérieuse, déterminée par le courage, par la pureté des intentions, la calomnie est à côté de vous, le poignard à la main. Jugez par là des funestes résultats d'une fausse mesure qui réellement donnerait quelque prise à la calomnie. Forçons nos ennemis mêmes à rendre hommage à la grandeur de notre conduite. (Applaudissements.) Il y a ici une grande vérité à proclamer; il est impossible de se la dissimuler : c'est que l'homme qui a tramé contre l'intérêt national, et dont la tête tombe, en vertu d'un jugement, sous le glaive de la loi, est forcé lui-même, au moment où le couteau fatal tranche le cours de sa vie, de rendre hommage aux grands principes. Sentons notre dignité. Il faut s'armer la liberté. Eh bien! armons-nous ; pour mais que la loi marche toujours avec nous; et comportons-nous de manière que, loin de nous diviser par des craintes mutuelles, nous puissions à chaque instant, par des baisers fraternels, donner le spectacle de l'union et de la force. »

Drouet. « Je demande qu'on ne puisse assommer un Prussien que la loi à la main. »

Barrère, au nom du comité de salut public. « Depuis

plusieurs jours tout annonçait un mouvement dans Paris. Des lettres interceptées, soit des étrangers, soit des aristocrates de l'intérieur, annonçaient les efforts constants. que faisaient leurs agents pour qu'il y eût incessamment, dans ce qu'ils appellent la grande ville, un mouvement. Eh bien! ils l'auront, ce dernier mouvement... (Il s'élève de vifs applaudissements.) Mais ils l'auront organisé, régularisé par une armée révolutionnaire, qui exécutera enfin ce grand mot, que l'on doit à la commune de Paris : « Plaçons la terreur à l'ordre du jour. » C'est ainsi que disparaî tront en un instant, et les royalistes, et les modérés, et la tourbe révolutionnaire qui vous agite. Les royalistes veulent du sang: eh bien! ils auront celui des Brissot, des Marie-Antoinette ; ils veulent préparer un mouvement;'eh bien! ils vont en éprouver les effets! Ce ne sont pas vengeances illégales; ce sont les tribunaux extraordinaires qui vont l'opérer. Vous ne serez pas étonnés des moyens que nous vous présenterons, lorsque vous saurez que du fond de leurs prisons ces scélérats conspirent encore, et qu'ils sont les points de ralliement de nos ennemis. Brissot a dit et a imprimé qu'avant que sa tête tombât, celles d'une partie des membres de la convention ne seraient plus, et que la montagne serait anéantie. C'est ainsi qu'ils cherchent à vous arrêter par la terreur dans votre marche révolutionnaire.

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» Les royalistes veulent troubler les travaux de la convention... Conspirateurs... elle troublera les vôtres. (Vifs applaudissements.)

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Ils veulent faire périr la montagne !... Eh bien! la montagne vous écrasera !

» Dès demain le comité vous proposera les moyens d'avoir une armée révolutionnaire de six mille hommes dans Paris, et de mille deux cents canonniers. (On applaudit)

» ils voudraient, disent-ils, égorger Pache et les municipaux ; eh bien ! il vivra pour servir le peuple, pour déjouer leurs infâmes manoeuvres sur les subsistances. Je dois dire que depuis deux mois j'ai été témoin de la sollicitude con

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