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nation française, marchant d'un pas rapide et ferme vers le bonheur public, dévouée à la cause du peuple et au triomphe de l'égalité, digne de donner au monde le signal de la liberté et l'exemple de toutes les vertus !

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Achevez, citoyens, achevez vos sublimes destinées ! Vous nous avez placés à l'avant-garde pour soutenir le premier effort des ennemis de l'humanité; nous mériterons cet honneur, et nous vous tracerons de notre sang lá route de l'immortalité. Puissiez-vous déployer constamment cette énergie inaltérable dont vous avez besoin pour étouffer tous les monstres de l'univers conjurés contre vous, et jouir ensuite en paix des bénédictions du peuple et du fruit de vos vertus! »

DECRET. (Voté par acclamation.)

« La Convention nationale décrète que le discours du citoyen Robespierre sera inséré dans le bulletin; il sera imprimé aussi dans la forme ordinaire, et traduit dans toutes les langues. Il en sera donné six exemplaires à chaque membre de la Convention. »

Le 7 prairial avait été un grand jour pour Robespierre ; le 20 il partagea en quelque sorte les hommages rendus à la Divinité.

L'unanimité des suffrages de ses collègues l'appela le 16 au fauteuil cette unanimité avait-elle été concertée, solli citée ? ne faut-il y voir qu'une nouvelle marque d'intérêt donnée à celui que menaçaient tous les poignards de l'Europe? ou bien était-elle un acte de déférence envers celui qui avait proposé le décret du 18 floréal? Quoi qu'il en soit, la solennité fixée au 20 prairial par ce décret se trouvait pour ainsi dire légalement comprise dans les jours de sa présidence; il dut, sans paraître l'usurper, y prendre la première place. Pendant les quinze jours que le fauteuil lui resta dévolu, il n'y siégea pas une seule fois ; il l'abandonna à des ex-présidens, ainsi que le lui permettait le réglement.

Mais le 20 prairial, marchant d'un pas orgueilleux à la tête de la représentation nationale, affectant de laisser entre Jui et ses collègues une distance remarquable, la tête haute et le regard superbe, il se montra dans tout l'éclat de sa gloire :

organe de la France entière, il éleva sa voix jusqu'au créateur de toutes choses. Il était l'auteur de cette fête fameuse à l'Étre supreme; il en fut aussi le grand-prêtre. Mais, semblable aux triomphateurs de l'antiquité, au milieu des honneurs qui l'entouraient il ne put éviter les traits de l'âpre censure et du ridicule mordant. La jalousie républicaine ne mesura qu'avec effroi la hauteur où il s'était placé; l'envie, la haine sourit à son ivresse, et jura en secret sa perte dès lors on vit se former l'orage qui le renversa.

Voici les deux discours que Robespierre prononça dans la journée du 20 prairial, comme président de la Convention nationale :

1o Au peuple réuni pour la fête de l'Étre supréme.

"Français républicains, il est enfin arrivé ce jour à jamais fortuné que le peuple français consacre à l'Etre suprême! Jamais le monde qu'il a créé ne lui offrit un spectacle aussi digne de ses regards. Il à vu régner sur la terre la tyrannie, le crime et l'imposture : il voit dans ce moment une nation entière, aux prises avec tous les oppresseurs du genre humain, suspendre le cours de ses travaux héroïques pour élever sa pensée et ses vœux vers le grand Etre qui lui donna la mission de les entreprendre, et la force de les exécuter !

» N'est-ce pas lui dont la main immortelle, en gravant dans le cœur de l'homme le code de la justice et de l'égalité, y traça la sentence de mort des tyrans? N'est-ce pas lui qui dès le commencement des temps décréta la République, et mit à l'ordre du jour, pour tous les siècles et pour tous les peuples, la liberté, la bonne foi et la justice?

» Il n'a point créé les rois pour dévorer l'espèce humaine ; il n'a point créé les prêtres pour nous atteler, comme de vils animaux, au char des rois, et pour donner au monde l'exemple de la bassesse, de l'orgueil, de la perfidie, de l'avarice, de la débauche et du mensonge: mais il a créé l'univers pour publier șa puissance ; il a créé les hommes pour s'aider, pour s'aimer mutuellement, et pour arriver au bonheur par la route de la

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C'est lui qui plaça dans le sein de l'oppresseur triom

phant le remords et l'épouvante, et dans le cœur de l'innocent opprimé le calme et la fierté ; c'est lui qui force l'homme juste à haïr le méchant, et le méchant à respecter l'homme juste ; c'est lui qui orna de pudeur le front de la beauté pour l'embellir encore ; c'est lui qui fait palpiter les entrailles maternelles de tendresse et de joie ; c'est lui qui baigne de larmes délicieuses les yeux du fils pressé contre le sein de sa mère ; c'est lui qui fait taire les passions les plus impérieuses et les plus tendres devant l'amour sublime de la patrie; c'est lui qui a couvert la nature de charmes, de richesses et de majesté. Tout ce qui est bon est son ouvrage, ou c'est lui-même : le mal appartient à l'homme dépravé qui opprime ou qui laisse opprimer ses semblables.

» L'auteur de la nature avait lié tous les mortels par une chaîne immense d'amour et de félicité : périssent les tyrans qui ont osé la briser!

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Français républicains, c'est à vous de purifier la terre, qu'ils ont souillée, et d'y rappeler la justice, qu'ils en ont bannie! La liberté et la vertu sont sorties ensemble du sein de la Divinité l'une ne peut séjourner sans l'autre parmi les hommes. Peuple généreux, veux-tu triompher de tous tes ennemis? Pratique la justice, et rends à la Divinité le seul culte digne d'elle. Peuple, livrons-nous aujourd'hui sous ses auspices aux transports d'une pure allégresse! Demain nous combattrons encore les vices et les tyrans; nous donnerons au monde l'exemple des vertus républicaines, et ce sera l'honorer encore ! »

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2° Au moment où l'athéisme, consumé par les flammes, a disparu, et que la sagesse apparaît à sa place aux regards du peuple.

« Il est rentré dans le néant ce monstre que le génie des rois avait vomi sur la France! Qu'avec lui disparaissent tous les crimes et tous les malheurs du monde ! Armés tour à tour des poignards du fanatisme et des poisons de l'athéisme, les rois conspirent toujours pour assassiner l'humanité : s'ils ne peuvent plus défigurer la Divinité par l'assola superstition pour

cier à leurs forfaits, ils s'efforcent de la bannir de la terre pour y régner seuls avec le crime.

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Peuple, ne crains plus leurs complots sacrileges; ils ne peuvent pas plus arracher le monde du sein de son auteur que le remords de leurs propres cœurs! Infortunés, redressez vos fronts abattus; vous pouvez encore impunément lever les yeux vers le ciel Héros de la patrie, votre généreux dévouement n'est point une brillante folie; si les satellites de la tyrannie peuvent vous assassiner, il n'est pas en leur pouvoir de vous anéantir tout entiers! Homme, qui que tu sois, tu peux concevoir encore de hautes pensées de toi-même; tu peux lier ta vie passagère à Dieu même et à l'immortalité! Que la nature reprenne donc tout son éclat, et la sagesse tout son empire! L'Etre suprême n'est point anéanti.

» C'est surtout la sagesse que nos coupables ennemis voulaient chasser de la République : c'est à la sagesse seule qu'il appartient d'affermir la prospérité des empires ; c'est à elle de nous garantir les fruits de notre courage. Associons-la donc à toutes nos entreprises! Soyons graves et discrets dans nos délibérations, comme des hommes qui stipulent les intérêts du monde; soyons ardens et opiniâtres dans notre colère contre les tyrans conjurés; imperturbables dans les dangers, patiens dans les travaux, terribles dans les revers, modestes et vigilans dans les succès, soyons généreux envers les bons, compatissans envers les malheureux, inexorables envers les méchans, justes envers tout le monde; ne comptons point sur une prospérité sans mélange, et sur des triomphes sans obstacles, ni sur tout ce qui dépend de la fortune ou de la perversité d'autrui; ne nous reposons que sur notre constance et sur notre vertu, seuls, mais infaillibles garans de notre indépendance; écrasons la ligue impie des rois par la grandeur de notre caractère, plus encore que par la force de nos armes.

>>

Français, vous combattez les rois ; vous êtes donc dignes d'honorer la Divinité! Être des êtres, auteur de la nature, l'esclave abruti, le vil suppôt du despotisme, l'aristocrate perfide et cruel t'outragent en t'invoquant ; mais les défenseurs de la liberté peuvent s'abandonner avec confiance dans tou sein paternel!

Être des êtres, nous n'avons point à t'adresser d'injustės prières tu connais les créatures sorties de tes mains; leurs besoins n'échappent pas plus à tes regards que leurs plus secrètes pensées. La haine de la mauvaise foi et de la tyrannie brûle dans nos cœurs avec l'amour de la justice et de la patrie; notre sang coule pour la cause de l'humanité: voilà notre prière, voilà nos sacrifices, voilà le culte que nous t'offrons! »>

Cette fête, sublime par son objet, ordonnée avec grandeur, célébrée dans un ordre imposant et majestueux, fut encore admirable par le recueillement du peuple, par sa joie douce et respectueuse, par le concert de toutes les voix et de tous les cœurs. En voici le plan, qui peut en être regardé comme le récit par l'exactitude avec laquelle il fut suivi, jusque dans la manifestation présumée des sentimens de tous les citoyens.

PLAN de la FÊTE A L'ÊTRE SUPRÊME, par David; décrété par la Convention nationale pour être exécuté le 20 prairial an 2 de la Répu blique, (8 juin 1794.)

« L'aurore annonce à peine le jour, et déjà les sons d'une musique guerrière retentissent de toute part, et font succéder au calme du sommeil un réveil enchanteur.

» A l'aspect de l'astre bienfaisant qui vivifie et colore la. nature, amis, frères, époux, enfans, vieillards et mères s'embrassent, et s'empressent à l'envi d'orner et de célébrer la fête de la Divinité.

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>> On voit aussitôt les banderoles tricolores flotter à l'extérieur des maisons; les portiques se décorent de festons dé verdure la chaste épouse tresse de fleurs la chevelure flottante de sa fille chérie, tandis que l'enfant à la mamelle presse le sein de sa mère, dont il est la plus belle parure: le fils bras vigoureux, se saisit de ses armes ; il ne veut recevoir le baudrier que des mains de son père : le vieillard, souriant de plaisir, les yeux mouillés des larmes de la joie, sent rajeunir son âme et son courage en présentant l'épée aux défenseurs de la liberté.

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