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cependant si vivaces, même à Paris'. A propos des fripiers et des merciers, il faudrait parler de leurs luttes contre les métiers, luttes qui ont tant de fois occupé les États et les Parlements3. C'est l'histoire de ces professions qui fait le mieux comprendre comment s'est disloqué l'ancien organisme économique. La conclusion de tout cela, c'est que l'entreprise tentée par M. Franklin n'est pas de celles qu'un homme seul puisse mener à bien. Le Dictionnaire n'en reste pas moins comme le monument d'un patient et laborieux effort. J'ai pensé que le critiquer de près était encore la meilleure façon de lui rendre hommage.

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VI. HISTOIRE PROVINCIALE. M. Pierre Boré s'est donné pour sujet d'étude les Abeilles, la cire et le miel en Lorraine jusqu'à la fin du XVIIIe siècle. Comment les diligentes ouvrières furent assimilées par le droit féodal tantôt au trésor caché, lantôt à l'épave sans

1. Art. Corporations. A Statuts, il n'est pas absolument exact d'écrire que « les métiers demeurés libres relevaient seulement des règlements de police >; il y a, dès le XIII° siècle, des métiers libres et qui ont cependant des statuts. Il fallait décrire le mécanisme de l'homologation. Métiers concédés : donner les dates. Édit de mars 1673 et de mars 1691: pourquoi pas ceux de 1581 et

1597?

2. Rois des merciers, très insuffisant sur les mesures prises par François I. 3. Rien même (lacune étonnante sous la plume de l'auteur) sur la littérature spéciale aux merciers, sur l'organisation secrète des «< Coesmes ».

4. Voici maintenant une série de menues critiques, destinées à montrer à M. F. avec quel soin et quel intérêt j'ai dépouillé son livre. Apothicaires : citer (sur le quiproquo) les Ballieux d'ordures de 1609 et le Cahier des garçons apothicaires de 1614 (pourtant publié par M. G. Picot), si important pour l'histoire de l'oligarchie capitaliste. Acier citer Montchrestien. Affichage : rappeler les placards de 1534. Automates: au lieu de astomates, lire aftomates dans Furetière. Banquiers, très insuffisant. Cabinets (d'anatomie) à propos de celui de M. Biberon, rappeler Diderot qui en parle, notamment dans ses lettres à Catherine II. Caisse de Poissy: Turgot est oublié. Carrossiers: parler de la concession faite par Henri IV à Mme de Bueil et procès qui s'ensuivirent. Colportage, colporteurs insuffisant. Chaudronniers : anachronisme étrange, Charles VII plus d'un demi-siècle après le Téméraire. Commission du commerce citer Champollion et, à Conseil, Bonnassieux. A côté de compagnes, noter la forme compagnonnes. Drapeaux: manque le sens primitif de vieux draps. Draps d'or et de soie: il ne fallait pas dire, puisqu'on sortait de Paris, que la fabrique de Tours disparaît au xvI° siècle (très prospère sous Richelieu), ni passer sous silence les deux créations successives et jusqu'à l'existence de celle de Lyon. Draps (noms divers donnés aux) : il manque drap de meunier. Enfants rouges : pas la date de création. Paveurs : une histoire du « pavé » plutôt que des « paveurs », sur lesquels Delamarre est cependant riche. Rôleurs (de tabac), mais rien sur les roleurs (compagnonnage). Servantes: noter le sens « ouvrières ». Soies: saute de 1470 à 1582. Inspecteurs : il manque: Inspecteurs de la librairie ».

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maitre; comment se constitua, au profit des seigneurs, le droit d'abeillage, exercé par des officiers spéciaux, maîtres des mouchettes ou briseurs jurés; avec quelle lenteur progressa la technique apicole; quelle place tenait le miel aux époques où le sucre était une denrée de luxe, la cire en un temps où le luminaire était rare; comment le paiement de redevances en cire pour franchises el sauvegardes créa une bourgeoisie de cire, telles sont les questions variées, d'économie rustique, de droit, d'histoire sociale que M. Boyé passe en revue, sans parler même de quelques pages consacrées au rôle joué par les abeilles dans le folk-lore lorrain.

La ville d'Épernay était au xvI° siècle une bien petite ville, dont l'incendie de 4544 réduisit encore l'importance. Elle ne possédait pas de mairie, c'est-à-dire que la compétence de l'assemblée des habitants était peu étendue. Cependant, les registres municipaux', publiés avec autant de soin érudit2 que de somptuosité par MM. R. CHANDON DE BRIAILLES et H. BERTAL, présentent un réel intérêt pour l'histoire économique. Les deux éditeurs ont accompagné leur publication d'un exposé de l'évolution d'Épernay, la lente conquête du terroir par la vigne, qui lutte d'abord contre la forêt vers les crêtes et contre le marais de la Marne, puis contre le blé; d'un résumé démographique où s'inscrivent les conséquences des événements politiques et des changements économiques; d'une étude sur les historiens d'Épernay, et, en particulier, sur Bertin du Rocheret, type assez amusant de robin de petite ville, parlementaire, libertin et franc-maçon 3. Cette publication, qui sera continuée, peut être donnée comme modèle aux érudits locaux*.

Les historiens du xvIe siècle ont consacré quelques pages à la révolte de la gabelle de 1548-1549. Mais, éblouis par les scènes tra

1. Sources de l'histoire d'Épernay. 1r série, t. I : Archives municipales d'Épernay (XVI° siècle). H. Leclerc, 1906, in-8°, xcvI-448 p. Index, 12 pl. et grav. Les registres publiés vont de 1540 à 1570. La série prochaine ne commencera qu'en 1619, et une nouvelle lacune la coupe malheureusement en 1639. Les auteurs donneront ensuite (non plus in extenso, mais sous forme de calendars, avec reproduction de documents types) les archives ecclésiastiques, puis celles des seigneurie et juridiction (les plus riches en données économiques).

2. Les manchettes marginales permettent de se reconnaître facilement au milieu des délibérations. P. xxxv: « De 1550 à 1554 », ne faut-il pas lire : « De 1650 à 1654 »?

3. Aux pièces, des documents sur l'histoire de la maçonnerie, comme sur l'histoire des luttes parlementaires.

4. L'affaire du maître d'école Nicol Cathier, nommé le 3 juillet 1552, révoqué le 19 novembre 1553, et contre lequel (avec trois prêtres) les religieux et la ville intentent un procès en 1554, ne sent-elle point le fagot?

giques dont Bordeaux fut le théâtre, ils ont négligé les débuts de l'insurrection, qui commence au printemps de 1548 dans l'Angoumois et la Saintonge, c'est-à-dire au voisinage des marais salants. M. S.-C. GIGON a repris le sujet dans son ensemble'. Certes M. Gigon n'est pas absolument rompu aux méthodes historiques, il ne cite pas, il ignore peut-être des prédécesseurs qui auraient pu le renseigner sur des points spéciaux2; il indique insuffisamment même les sources originales sur lesquelles on voit qu'il a travaillé, et si ses recherches à la Bibliothèque nationale paraissent avoir été complètes, on est en droit de se demander s'il a épuisé les fonds provinciaux, en particulier celui du parlement de Guyenne. Ces défauts n'empêchent pas son travail d'être extrêmement précieux: il est complètement neuf, nous le disions tout à l'heure, en ce qui concerne les débuts; il montre que la révolte fut géographiquement très étendue; politiquement, ce ne fut pas un simple soulèvement dirigé contre quelques gabelous trop exigeants, mais bien une insurrection populaire, une sorte de fédération révolutionnaire des communes rurales, avec des chefs et un programme. La correspondance du « colonel de Guyenne »*, lettres écrites « de par le commung populaire »>, est à cet égard des plus significatives, et les réclamations présentées par les communes d'Angoumois au roi sont un véritable cahier de doléances où l'on réclame non pas seulement la réduction de la gabelle, « taxe en horreur au peuple, mais la réforme des tailles, la suppression de la vénalité, la réforme de la gendarmerie, etc. Dans l'ensemble, l'insurrection reste loyaliste. Cependant, sur les relations de quelques chefs, - particulièrement des chefs bordelais, - avec l'Angleterre, il y a dans la correspondance de de Selves des probabilités un peu plus fortes que ne semble l'admettre M. Gigon. Il émet la très vraisemblable hypothèse que la révolte d'abord, la répression ensuite, ont dû favoriser en Guyenne la diffusion du calvinisme. Nous en

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1. Contribution à l'histoire de l'impôt sous l'ancien régime. La révolte de la gabelle en Guyenne, 1548-1549. H. Champion, 1906, in-8°, IX-298 p. Appendice et 58 pièces justificatives, carte.

2. MM. Dupont-Ferrier, par exemple, et Boissonnade.

3. La liste en est bien donnée au début, mais sans qu'on nous renseigne sur leur importance.

4. Voy. aux Pièces justificatives, n° 1, 4: ordre d'insurrection adressé aux paroisses par le « coronel de la commune de Guyenne »; n° 2: réponse (obéissante) des habitants de Guêtres; n° 8: sommation du capitaine Tallemagne au capitaine de Blaye.

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6. Voy. p. 146 la lettre citée par M. Gigon lui-même tout ce que l'on peut dire, c'est qu'il n'y eut pas proprement un complot.

avons dit assez pour qu'on voie l'intérêt que présente ce travail'. M. REGNAULT DE BEAUCARON a suivi l'exemple de ces batailleurs d'autrefois qui, la vieillesse venue, l'arquebuse pendue au croc, contaient à leurs enfants les prouesses de leurs aïeux. S'il y a dans ses Souvenirs anecdotiques et historiques d'anciennes familles champenoises et bourguignonnes (1175-1906) bien de l'inutile et du déjà vu3, on n'y lira pas sans plaisir des notes sur la Révolution dans le Châtillonnais, sur l'ile de Bourbon, sur l'influence française au Mexique après 1830; un journal, tenu par des enfants, de l'occupation prussienne à Blois, document d'une simplicité et d'une vivacité rares; une étude sur le rôle joué par le père de l'auteur comme intendant militaire de la garde nationale parisienne pendant le siège, histoire d'un honnête homme qui, mal soutenu par des ministres faibles, a peine à défendre les biens les plus sacrés contre l'âpreté des convoitises et contre le gaspillage.

Le procès de Claude de La Vallée, prévôt gruyer de Clermont-enArgonne, poursuivi en 1535 en Lorraine, appelant en 1537 au Parlement de Paris, posait la grave question des frontières entre le royaume et l'Empire. C'est pourquoi il a servi à MM. Henri STEIN et Léon LE GRAND' de prétexte pour étudier ce problème depuis ses origines jusqu'à sa solution, depuis le traité de Verdun jusqu'à la réunion du Clermontois à la France. En fait, le conflit de juridiction né de l'affaire La Vallée resta lié à l'histoire de la frontière jusqu'en 1651. On verra, en parcourant les abondantes pièces réunies par les deux auteurs, combien les concepts de souveraineté et de frontière étaient vagues et flottants avant le milieu du XVIIe siècle. C'est seulement la politique de Louis XIV qui leur donnera quelque clarté.

M. Kleinclausz, alors qu'il était titulaire de la chaire d'histoire de Bourgogne à l'Université de Dijon, avait eu l'excellente idée de faire

1. P. 219, sur l'entrée du connétable à Bordeaux, il suffit, pour lever toute difficulté, de remplacer dans le texte de de Thou « Ixbres» par viibres ». La lettre de George Cobham (pièce 17, p. 245) a été copiée par quelqu'un qui ne savait pas l'anglais. Je ne vois point que M. Gigon ait fait usage des Calendars.

2. Plon, 1906, in-8°, 619 p. Index.

3. Notamment un résumé des Mémoires du baron Hue.

4. La Frontière d'Argonne (843-1659). Procès de Claude de La Vallée (1535-1651). Alph. Picard, 1905, in-8°, ví-626 p. Index, mais pas de table des chapitres.

5. Le texte s'arrête à la p. 93. Les pièces (1345-1728) vont de 95 à 309. P. 36, no 4, intéressants détails sur la diffusion de l'instruction dans les campagnes au XVIe siècle.

6. Cf. Rev. hist., t. XC, p. 363 (examen de la brochure de M. Overmann).

faire par ses élèves des monographies relatives à la Réforme et à la Ligue en Bourgogne'. Deux seulement de ces monographies ont paru: celle de M. VIARD sur le président Bégat, l'auteur des célèbres Remonstrances de 1563 contre l'édit d'Amboise et le commentateur de la coutume de Bourgogne; celle de M. GALMICHE sur Baillet de Vaugrenant, lui aussi président au Parlement, mais d'une espèce particulière conseiller gendarmé », disait Tavanes, gouverneur de Saint-Jean-de-Losne, et l'un des chefs du parti catholique royaliste dans la province. Ces deux travaux sont des mémoires de licence.« C'est reconnaitre d'avance que des reproches pourront leur être adressés », comme le dit M. Kleinclausz dans une préface qui n'a, elle-mème, la prétention que d'être une vue très générale2. Le travail de M. Viard ne manque pas de solidité, mais il est plus intéressant sur Bégat jurisconsulte que sur Bégat ligueur3. Celui de M. Galmiche est plus mince; l'auteur n'a étudié que superficiellement

1. Etudes sur la Réforme et les guerres de religion en Bourgogne, 1TM série: le Président Bégat. Le président Baillet de Vaugrenant, par MM. Viard et Galmiche, avec une préface de M. Kleinclausz, professeur à l'Université de Lyon. Dijon et Paris, 1905, in-8°, 188 p. (t. XV, no 4, de la Revue bourguignonne). On remarquera que le titre porte « 1" série. » Mais la préface, qui semble promettre d'autres études, est datée, non de Dijon, mais de Lyon. Nous touchons là au vice congénital des chaires créées dans les Universités par les corps locaux : les titulaires ne pouvant recevoir de promotions sur les fonds de l'État, le souci légitime de leurs intérêts leur fait considérer comme un simple passage ce qui devrait être un établissement durable. Une seule dérogation, à ma connaissance, est apportée à ce principe, et précisément en faveur de la seule Université qui n'en avait pas besoin sa richesse lui permet de promouvoir sur ses ressources propres ses titulaires de chaires locales, et il n'est pas à craindre qu'ils la quittent. La pratique suivie partout ailleurs rend très précaire et très restreinte l'action scientifique des Universités.

2. Est-ce par ironie que M. Kleinclausz écrit (p. 5) que le « souvenir... du rôle de Clotilde servit à les préserver [les Bourguignons] des atteintes de l'hérésie »? D'ailleurs, l'histoire des débuts de la Réforme en Bourgogne est plus importante que ne semble le dire ici l'auteur. Il se place trop au point de vue de 1560 pour juger de ce qui précède. Un dépouillement, même rapide, de l'inventaire des archives communales de Dijon ne permet pas de considérer comme une quantité négligeable la Réforme bourguignonne, et M. Viard luimême montre (p. 40) que, sans l'effort de Bégat et de quelques autres, la province courait grand risque d'être infectée par l'hérésie. - P. 14: Dans le Morvan, la place de Flavigny; il serait plus exact de dire aux portes du Morvan, car Flavigny est nettement en Auxois.

3. Aux Pièces justificatives, nous aurions aimé trouver une réimpression au moins partielle des Remonstrances. M. Viard ne s'est pas demandé de qui pouvait être l'Apologie qui répondit à Bégat. Les épreuves ont été insuffisamment corrigées dates fantaisistes d'une édition (1555, p. 25, no 1) et de l'ouvrage de Saint-Julien de Balleure (p. 44, n° 5).

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