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THERMIDOR

D'APRÈS LES SOURCES ORIGINALES

ET LES DOCUMENTS AUTHENTIQUES

DEUXIÈME ÉDITION

PARIS

ERNEST FLAMMARION, ÉDITEUR

26, RUE RACINE, PRÈS L'ODEON

1897

Tous droits réservés.

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PREFACE

Scribitur ad narrandum ET PROBANDUM.

La pièce, récemment représentée au Théâtre-Français sous le titre de Thermidor, a réveillé l'attention publique sur un des événements les plus controversés de la Révolution française: la chute de Maximilien Robespierre.

Des innombrables discussions auxquelles a donné lieu la pièce de M. Sardou, il est résulté pour moi cette conviction, à savoir que presque personne, parmi ceux qui ont la prétention de bien connaître la Révolution, ne sait le premier mot de la basse intrigue qui a amené la catastrophe du 9 thermidor.

Pour un certain nombre de républicains de nos jours, peu d'accord avec la grande école républicaine de 1830, avec les Armand Carrel, les Godefroy Cavaignac, les Garnier-Pagès, les Buchez, les Raspail, les Armand Barbès et tant d'autres, Robespierre est resté l'incarnation de la Terreur. On a beau leur rappeler le mot que prononçait Barère, au nom du comité de Salut public, dans la séance du 10 thermidor, mot qui donna à la tra gédie de ce jour sa véritable signification « Robespierre a péri pour avoir voulu arrêter le cours terrible, majestueux de la Révolution », rien n'y fait. Il n'y a pires sourds que ceux qui ne veulent entendre.

Comme le disait si bien Henry Maret, il y a quelques mois, avec son bon sens gaulois : « C'est le vieux pré

jugé, la vieille légende persistante, qui fait de Robespierre un bouc émissaire, chargé de tous les méfaits de la Terreur ».

Songez donc, c'est si commode! Chacun s'est débarrassé de sa part de responsabilité en rejetant tout sur les vaincus qui, muets dans leur tombe, n'étaient plus là pour répondre. Et malheur à qui eût osé élever la voix pour les défendre; on lui aurait fait voir que le règne de la guillotine n'était point passé. Aussi la légende a-t-elle pu s'établir avec une facilité merveilleuse. Il y a même de graves docteurs qui vous disent qu'il n'y a point d'intérêt à la détruire; que chacun a le droit d'édifier sur elle tous les contes en l'air que peut enfanter une imagination maladive ou perverse, comme si la vérité n'était pas d'un intérêt supérieur à tout.

S'il faut en croire certains publicistes qui présentent plaisamment M. de Robespierre comme « le plus noir scélérat des temps modernes », les choses sans lui se seraient passées le plus doucement du monde. Otez Robespierre de la Révolution, et les principes de 1789, qu'il n'avait pas peu contribué à faire proclamer, se seraient défendus tout seuls. Pas d'émigration, pas de manifeste de Brunswick; Louis XVI et Marie-Antoinette se seraient agenouillés devant la Révolution; la Vendée ne se serait pas soulevée; soixante départements ne se seraient pas insurgés contre la Convention; l'armée de Condé n'aurait pas bivouaqué sur nos frontières dès les premiers mois de 1792; toute l'Europe ne se serait pas levée en armes contre nous; les millions de l'Angleterre n'auraient pas servi à alimenter la coalition; Danton enfin ne se serait pas cru obligé de réclamer l'établissement du tribunal révolutionnaire et de faire mettre la

« PrethodnaNastavi »