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Danube ne fut point méprisée dans un sénat corrompu: on peut donc oser tout vous dire, à vous les amis du peuple et les ennemis de la tyrannie! Où en serions-nous, citoyens, si c'était la vérité qui dût se taire et se cacher, et si c'était le vice qui pût tout oser avec impunité? Que l'audace des ennemis de la liberté soit permise à ses défenseurs! Lorsqu'un gouvernement libre est établi il doit se conserver par tous les moyens équitables; il peut employer légitimement beaucoup d'énergie; il doit briser tout ce qui s'oppose à la prospérité publique ; il doit dévoiler hardiment les complots. Nous avons le courage de vous annoncer, et d'annoncer au peuple, qu'il est temps que tout le monde retourne à la morale, et l'aristocratie à la terreur; qu'il est temps de faire la guerre à la corruption effrénée, de faire un devoir de l'économie, de la modestie, des vertus civiles, et de faire rentrer dans le néant les ennemis du peuple, qui flattent les vices et les passions des hommes corrompus pour créer des partis, armer les citoyens contre les citoyens, et au milieu des discordes civiles relever le trône et servir l'étranger.

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Quelque rude que soit ce langage, il ne peut déplaire qu'à ceux à qui la patrie n'est point chère, qui veulent ramener le peuple à l'esclavage et détruire le gouvernement libre. Il y a dans la République une conjuration ourdie par l'étranger, dont le but est d'empêcher par la corruption que la liberté ne s'établisse. Le but de l'étranger est de créer des conjurés de tous les hommes mécontens, et de nous avilir, s'il était possible, dans l'univers par le scandale des intrigues. On commet des atrocités pour en accuser le peuple et la révolution : c'est encore la tyrannie qui fait tous les maux que l'on voit, et c'est elle qui en accuse la liberté. L'étranger corrompt tout. Son but, depuis que la simplicité des habits est établie, est d'appliquer toute l'opulence à la voracité des repas, aux débauches, à la ruine du peuple, et de tenir tous les crimes à sa solde.

» Aussi, depuis les décrets qui privent de leurs biens les ennemis de la révolution, l'étranger a senti le coup qu'on lui portait, et a excité des troubles pour inquiéter et ralentir le gouvernement.

>> Nous ne connaissons qu'un moyen d'arrêter le mal; c'est de mettre enfin la révolution dans l'état civil, et de faire la guerre à toute espèce de perversité, comme suscitée parmi nous à dessein d'énerver la République et de saper sa garantie; c'est d'abjurer contre ceux qui attaquent l'ordre présent des choses toute espèce d'indulgence, et d'immoler sans pitié sur la tombe profane du tyran tout ce qui regrette la tyrannie, tout ce qui est intéressé à la venger, et tout ce qui peut la faire revivre parmi nous. Le projet de l'étranger n'a pas été seulement de corrompre et d'abandonner la République à ses longues convulsions; la suite de ce discours vous apprendra qu'un complot était préparé pour tout briser soudain, et substituer le gouvernement royal à celui-ci : aux effets de la corruption un coup audacieux, combiné par tous les gouvernemens, devait succéder, et renverser la démocratie.

>> Nous ne trahirons point le peuple dans cette occasion, où nous lui répondons de son salut. Qui plus que vous est intéressé à le sauver et ne le point trahir? Qui plus que vous est intéressé à son bonheur? Votre cause est inséparable : vous ne pouvez être heureux sans lui; vous ne pouvez survivre à la perte de la liberté : la cause populaire et vous devez avoir ou le même char de triomphe, ou le même tombeau.

C'est donc une politique insensée que celle qui par des intrigues ravit au peuple l'abondance pour vous en accuser

vous

s-mêmes. Seriez-vous les amis des rois, ô vous qui les avez tous fait pâlir sur le trône, vous qui avez constitué la démocratie, vous qui avez vengé le meurtre du peuple par la mort du tyran, et qui avez pris l'initiative de la liberté du monde !

"

Quels amis avez-vous sur la terre, si ce n'est le peuple tant qu'il sera libre, et la cigüe quand il aura cessé de l'être? » Je vous annonce donc qu'il y a dans la République une conjuration conduite par l'étranger, qui prépare au peuple la famine et de nouveaux fers. Un grand nombre de personnes paraissent servir la conjuration : là on a enterré des comestibles, intercepté les arrivages par l'inquiétude; là on a aigri les citoyens par des discours séditieux. Il y a des hommes d'intelligence avec l'étranger; il y en a d'autres abusés par différens

prétextes. On a mis en courroux les vengeances des uns; on a mis à profit l'ambition des autres; on a profité du désespoir de ceux qui sont démasqués depuis longtemps pour les porter à tout risquer afin d'échapper au supplice; on a irrité le dégoût pour la vertu des hommes tarés qui n'espèrent point de bonheur et de fortune si la République s'établit. C'est la ligue de tous les vices armés contre le peuple et contre le gouvernement. Nous sommes avertis que depuis longtemps ce noir complot se prépare; il éclate, et nous éclatons avec lui, pour que le peuple, frappé, saisi de la vérité, confonde pour jamais ses ennemis. Le premier auteur du complot est le gouvernement anglais. Voici quelques paroles proférées dans le conseil d'état deux jours avant la rentrée du parlement :

» Si nous faisons la guerre le gouvernement convulsif de la France prendra de nouveaux moyens d'autorité de notre résistance; si nous faisons la paix elle aura la guerre civile: corrompons cette République. On ajouta même : que toutes nos séances s'ouvrent par ces mots : corrompons cette République ! Il fut dit qu'il fallait préparer la guerre, mais retarder la campagne; qu'on en recueillerait le double avantage et de comprimer le peuple anglais, et de ne rien risquer contre nous.

» Ainsi vous n'êtes plus surpris des nouveaux orages qu'on avait préparés. C'est par suite de ces maximes que les riches dans Paris devaient le nécessaire du peuple, et qu'il s'y est fait des repas à cent écus par tête. Les conjurés ont des signes de reconnaissance dans les spectacles, dans les lieux où ils se rencontrent, dans ceux où ils mangent.

» Le gouvernement anglais a pris ce double parti et de préparer vivement la guerre en apparence, et de mettre le feu aux passions de tous les hommes ambitieux, avides et corrompus. Chargés par vous du soin de veiller sur le bonheur de la patrie, nous avons tout mis en usage pour pénétrer les desseins de nos ennemis. Leur projet est donc, puisqu'ils n'ont pu nous empêcher de vaincre, de confondre toutes nos idées de droit public, de nous donner des mœurs lâches, de nous inspirer uné cupidité effrénée, afin qu'engourdis par les vices, las des affaires et entraînés vers les jouissances, la nécessité d'un chef

se fit sentir par la paresse universelle, et que, tout étant préparé, le chef fut porté en triomphe; et cette idée d'un chef a saisi l'espoir ridicule de quelques personnages qui croient déjà se voir sur le pavoi : la patrie est déjà partagée entre les conjurés, flattés tous par l'espoir d'une grande fortune. Ainsi l'étranger a su caresser et les folies, et les ridicules, et la corruption de chacun.

» Ce plan de conjuration, le plus atroce qui se puisse concevoir, puisqu'il immole la vertu et l'innocence pour l'intérêt du crime, ce plan s'exécute ainsi.

» Des Italiens, des banquiers, des Napolitains, des Anglais sont à Paris, qui se disent persécutés dans leur patrie. Ces nouveaux Sinons s'introduisent dans les assemblées du peuple; ils y déclament d'abord contre les gouvernemens de leurs pays; ils s'insinuent dans les antichambres des ministres; ils épient tout; ils se glissent dans les sociétés populaires; bientot on les voit liés avec des magistrats qui les protègent. Vous aviez rendu une loi contre les étrangers : le lendemain on vous propose une exception en faveur des artistes; le lendemain tous vos ennemis sont artistes, même les médecius; et si l'on poursuit ces fabricateurs de complots, on est tout étonné de les voir en crédit. Les hommes qu'ils ont corrompus les défendent, parce que leur cause est commune. Attaquez-les, vous les trouvez unis; interlocuteurs apprêtés, ils s'interpelleront; l'un joue Caton, l'autre Pompée. L'affaire de Chabot vous apprendra qu'après des scènes concertées avec les partisans de l'étranger on y riait de l'importance qu'ils avaient su se donner en public.

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Cette scène a été renouvelée plusieurs fois. Les nobles, les étrangers, les oisifs, les orateurs vendus, voilà les instrumens de l'étranger, voilà les conjurés contre la patrie, contre le peuple. Nous déclarons la guerre à ces tartuffes en patriotisme; nous les jugerons par leur désintéressement, par la simplicité de leurs discours, par la sagesse des conseils, et non par l'affectation.

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L'esprit imitatif est le cachet du crime. Les contre-révolutionnaires d'aujourd'hui, n'osant plus se montrer, ont pris plus d'une fois les formes du patriotisme. Un Marat était dans

Nancy il y a quelque mois, qui pensa y allumer une autre Vendée un Marat était à Strasbourg; il s'appelait le Marat du Rhin; il était prêtre et autrichien; il y avait fait la contrerévolution. Il n'y eut qu'un Marat; ses successeurs sont des hypocrites dont rougit son ombre. On n'imite point la vertu; mais on est vertueux à sa manière, ou l'on est hypocrite. Si Pitt venait en France espionner le gouvernement il prendrait tes formes d'un honnête homme pour n'y être point reconnu. Il en est de même de ceux qui ont la modestie d'usurper les noms des grands hommes de l'antiquité; cette affectation cache un sournois dont la conscience est vendue.

» Un honnête homme qui s'avance au milieu du peuple avec l'audace et l'air tranquille de la probité n'a qu'un nom, comme il n'a qu'un cœur. Cette dépravation est le fruit de la conspiration de l'étranger: c'est sous ces noms qu'il faut chercher une partie des conjurés.

» Le simple bon sens, l'énergie de l'âme, la froideur de l'esprit, le feu d'un cœur ardent et pur, l'austérité, le désintéressement, voilà le caractère dn patriote au contraire, l'étranger a tout travesti. Un patriote de ce jour a rougi du nom de son père, et a pris le nom du héros qu'il n'imite en rien : le héros tua un tyran, et vécut modeste; il défendit le peuple; il sortit pauvre des emplois : son imitateur est un effronté qui tue la patrie, qui s'enrichit, dont la vie est dégoûtante d'indignités, qui cache son nom pour échapper à la mémoire de ses attentats. Que veut-il? Faire parler de lui, acquérir du pouvoir, et se vendre demain plus cher.

» Il semble qu'on voudrait introduire parmi nous ce trafic de quelques membres du parlement anglais, qui se font insolens pour devenir ministres. Parmi nous une classe d'hommes prend un air hagard, une affectation d'emportement, ou pour que l'étranger l'achète, ou pour que le gouvernement le place.

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Quoi! notre gouvernement serait humilié au point d'être la proie d'un scélérat qui a fait marchandise de sa plume et de sa conscience, et qui varie, selon l'espoir et le danger, ses couleurs, comme un reptile qui rampe au soleil! Fripons, allez aux ateliers, allez sur les navires, allez labourer la

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