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chrétienne dans l'histoire. Il convient d'y ajouter encore l'ouvrage spécial consacré, à cette occasion, par notre éminent collaborateur, M. Godefroid Kurth, au héros de ces fêtes, à Clovis 1. Nous nous proposons d'en donner prochainement une notice, une appréciation un peu étendue. Mais nous ne voulons pas tarder plus longtemps à féliciter notre savant ami de l'heureux tour de force par lequel il a su convertir en avantage la principale difficulté de son sujet, la pénurie des documents authentiques sur l'illustre roi des Francs Saliens. Il a, en effet, été amené par là à élargir sa matière, et son livre, par le fait, est une histoire des origines, de la fondation et de la mission civilisatrice du royaume des Francs, destiné à devenir la France très chrétienne.

Oui, la science doit avoir sa large part dans l'œuvre de régénération de la patrie française. Pour qu'elle la remplisse utilement, il faut nous attacher de toutes nos forces à rompre le détestable lien qui n'est d'ailleurs qu'un odieux mensonge trop longtemps établi dans les esprits entre elle et les erreurs doctrinales dont s'inspirent les sectes antichrétiennes, pour lesquelles la science n'est qu'un instrument de destruction religieuse, philosophique, morale et sociale. A la science cultivée ou exploitée avec des intentions mauvaises opposons la science cultivée, répandue, mise en usage avec des intentions pures et des sentiments chrétiens. Mais, d'ailleurs, ne nous laissons vaincre par personne pour la solidité de nos connaissances, l'exactitude et la profondeur de nos recherches, la saine rigueur de nos raisonnements et de nos conclusions. Que chacun, selon ses aptitudes, choisisse son labeur. Aux uns, la recherche et l'exposé scientifiques proprement dits. Aux autres, et c'est plus particulièrement, quoique non exclusivement, le fait du clergé, le travail apologétique, montrant soit l'accord, soit l'absence de désaccord entre la vérité humaine, certainement ou probablement acquise, et la vérité révélée de Dieu. La science loyale est apologétique par elle-même. L'apologétique, loyalement et méthodiquement pratiquée, a, on peut le dire, un caractère scientifique.

Nous avons déjà noté, et nous insistons volontiers sur ce point, l'utilité réciproque dont peuvent être l'une pour l'autre la théologie et la science profane, en particulier la science historique. La profonde ignorance de la plupart de nos contemporains en matière religieuse est l'une des plaies de notre époque. Aussi devons-nous applaudir aux conférences inaugurées cette année, à l'Institut catholique de Paris, par le R. P. de la Barre, professeur à la Faculté de théologie. Le but

Tours, Alfred Mame et fils, in-4, illustré de huit compositions en héliogravure et de 130 gravures sur bois.

en est ainsi défini par le docte religieux : « Les questions théologiques revivent. Des formules, que l'on croyait vouées à l'oubli, ont reconquis tout au moins un intérêt de circonstance. Dans une société toute laïque, bien des esprits réclament, ne fût-ce que pour les discussions courantes, une notion exacte du dogme et des motifs rationnels qui conduisent à l'accepter. Mais les anciens cours officiels demeurent supprimés. Les cours destinés au clergé ne répondent pas au même genre d'exigences. La science des manuels n'offre que l'appareil rebutant d'une terminologie technique. Dans ces conditions, des conférences théologiques, fournissant une méthode d'étude et des points de vue directeurs, semblent répondre au vou des meilleurs esprits. Elles pourront aussi satisfaire la curiosité du grand public, tenue en éveil par les plus récentes phases du mouvement religieux. » Les six conférences de cette année (12 février-17 mars) ont été consacrées aux préliminaires scientifiques et philosophiques de la théologie. Les conférences du P. de la Barre font, d'ailleurs, partie d'un ensemble de cours et conférences libres, à l'usage du grand public, inauguré l'an dernier et continué cette année par l'Institut catholique. Nous signalerons notamment le cours d'apologétique, professé par le R. P. Largent, et les conférences suivantes: M. l'abbé Rousselot: L'Origine du langage (24 février); Origine de la langue française (16 mars); M. l'abbé Beurlier: Les Juifs et les apòtres (2 mars); La première église chrétienne en dehors de la Palestine (9 mars).

Il faut répandre la bonne science, et notamment la bonne science historique, non seulement dans le public lettré, mais dans toutes les classes de la nation, si souvent trompées par la propagande de l'impiété révolutionnaire. On ne saurait trop approuver, trop encourager les cours et conférences populaires entreprises à cet effet par des hommes de cœur. Le Bulletin de la Société bibliographique (février 1896) nous fournit à cet égard un exemple que nous voudrions voir beaucoup imiter: «Notre confrère le comte Amédée de Bourmont fait, depuis un an, des conférences à Paris-Charonne, au patronage Sainte-Anne. Voici en quels termes M. Encoignard, rapporteur des Écoles chrétiennes du soir, a fait connaître le résultat de ces conférences pour 1895: « M. le comte de Bourmont a continué cette année la série de ses conférences sur l'histoire de France. Il a dû être satisfait de son auditoire, s'élevant à plus de soixante-dix jeunes gens. De notre côté, nous pouvons aflirmer que le public était enchanté de son conférencier, qui a fait revivre devant lui les épopées de Charlemagne, de saint Louis et de Du Guesclin. Grâce aux anciennes chroniques, citées à chaque instant, nous avons même pu connaître des détails fort curieux sur la vie privée de ces grands hommes. Une conférence sur la chevalerie, d'après le livre de M. Léon Gautier, a com

plété la série. En remerciant ici M. le comte de Bourmont, nous exprimons le vœu que son concours nous soit longtemps continué. »

Le but principal de nos efforts, dans l'application sociale du labeur scientifique et littéraire, doit être la purification, l'assainissement de l'atmosphère intellectuelle, empoisonnée par la contagion persistante du philosophisme du siècle dernier, d'où, parmi bien des contradictions et des incohérences, procède encore aujourd'hui le mal qui nous consume. Il ne sera pas d'une médiocre utilité pour cette patriotique entreprise de se rendre un compte exact des racines historiques de la maladie, c'est-à-dire de connaître et de juger, avec une netteté et une équité vengeresses, les mauvais génies qui ont été les auteurs responsables de cet empoisonnement intellectuel et moral. C'est à quoi peuvent singulièrement contribuer des ouvrages tels que celui dont nous avons sous les yeux les bonnes feuilles, et sommes heureux d'annoncer la prochaine apparition Voltaire et le voltairianisme, par M. Nourrisson, membre de l'Institut 1. « Étourderies, vilenies, mensonges, faiblesses et bassesses, faiblesses d'esprit et bassesses de cœur, il n'y a rien, dit l'éminent académicien, que ne pardonne à Voltaire l'indulgence de ses sectateurs. Voltaire a contribué à miner sourdement les institutions plusieurs fois séculaires; surtout, il a livré au christianisme des assauts où toute arme lui a été bonne, même l'infamie. Ce leur est assez pour que, libres penseurs, ils révèrent en lui un promoteur immortel de la libre pensée. C'est trop peu dire. Les soi-disant libres penseurs qui se figurent, parce que Voltaire ôte aux passions leur frein, avoir été affranchis par Voltaire, sans soupçonner tous les esclavages auxquels Voltaire les conduit, les soi-disant libres penseurs n'admettent même pas, en ce qui touche Voltaire, qu'on ose penser librement. On peut discuter les religions et les philosophies; il n'est pas permis de soumettre Voltaire à l'examen! On peut critiquer les Ecritures; il n'est pas licite de juger les pamphlets de Voltaire! Goûter faiblement Voltaire, c'est déjà se rendre suspect; le contredire, c'est s'accuser soi-même d'ignorance ou d'imbécillité; le combattre, c'est devenir coupable, ou, du moins, se trouver rangé désormais parmi les suppôts de sacristie.... Quoi done! serait-il vrai que, même de nos jours, il fallût, de toute nécessité, être pour ou contre Voltaire? La postérité n'aurait-elle plus, relativement à Voltaire, la liberté de la justice, quand, presque jusqu'à

1 Librairie Lethielleux, in-8. - L'ouvrage est ainsi divisé : Voltaire. Chapitre I. Les Jeunes années. II. Cirey. III. Potsdam. IV. Ferney. V. Les Rivalites. VI. Les Travaux. VII. La Patrie. VIII. L'Humanité. IX. La Tolérance. X. La Destinée de Voltaire. - Le Vollairianisme. Chapitre I. La Philosophie. II. Les Philosophes. III. Les Idées. IV. L'Ame. V. La Liberté. VI. Dieu. VII. La Morale. VIII. La Politique. - Conclusion.

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la dernière heure, tous ses contemporains ont largement usé, à son égard, de la liberté du mépris? Alors que nous sommes fiers d'avoir rompu les liens de toute espèce de superstition, serions-nous éternellement condamnés à subir le fétichisme de Voltaire ? Ou serait-ce vouloir ramener la France en arrière et se montrer absurdement hostile à ses progrès autant qu'insensible à sa grandeur, que de repousser l'arbitraire et décevante association d'idées, qui rattache au nom de Voltaire tout ce qui honore le plus notre race et illustre notre histoire. Certes, on peut chérir sa patrie, aimer l'humanité, tenir pour inviolable le droit, pour souveraine la nation, pour inalienables et plus précieuses que la vie toutes les libertés, notamment la liberté de conscience, et ne pas éprouver le besoin de placer tant et de si saintes choses sous le patronage du frivole Arouet. Effectivement, en dépit de la passion ardente avec laquelle fréquemment il semble les revendiquer, Voltaire, au XVIIIe siècle, les a plutôt compromises qu'il ne les a servies. Or, si l'on veut s'en convaincre, il suffit, mais il est nécessaire de se demander, sans parti pris d'aucune sorte, ce que fut Voltaire, ce qu'il fut comme homme, et ce qu'il fut comme penseur. Et sans doute, afin de répondre pertinemment à cette double question, ne saurait-on guère se dispenser de tenir compte, sinon de tous les travaux qu'a suscités Voltaire, du moins des plus marquants et des plus récents. Aussi, quelque nombreux qu'ils pussent être, ne les avons-nous pas négligés. Mais, de toute évidence, pour être exact, ce qui importait encore bien davantage, c'était d'avoir, d'un bout à l'autre, et sans rien omettre, étudié dans leur contexte toutes les œuvres de Voltaire. Lourde tâche, surtout quand on songe à tant de pièces dispersées, dont se sont incessamment accrues les éditions primitives et déjà si volumineuses de ses écrits; tâche fatigante ou même rebutante, quand on considère les fréquentes redites de l'auteur, l'étincellement continu de son style, les railleries perpétuelles qui sont devenues comme des tics de son esprit, le cynisme sans gaieté, où naturellement se joue son génie luxurieux. Nous avons dû néanmoins nous imposer ce pénible labeur. C'est donc sur des informations précises, et pièces originales en mains, que nous entreprenons de faire connaître d'abord la vie de Voltaire, ensuite sa philosophie. >>

Nos lecteurs peuvent juger par ces pages de l'Introduction quel est le caractère du livre de M. Nourrisson. Il nous semble qu'il doit appeler leur attention tant par sa valeur et son intérêt propres que comme un riche arsenal de faits et de textes à utiliser dans la lutte contre la propagande du mal. Dans l'œuvre d'assainissement dont nous parlions tout à l'heure, l'éminent académicien pourra réclamer à bon droit sa part de mérite, car sa verte et infatigable vieillesse

n'hésite pas, on le voit, à y réclamer sa part de labeur. Puisse la jeunesse spiritualiste et chrétienne imiter ce noble exemple, s'inspirer, dans les œuvres de lumière et de bon combat où l'appelle la voix du Saint-Père, de cette vive et vaillante ardeur, de ce zèle agissant, efficace, pour la cause sacrée des vérités éternelles, d'où sortiront le salut et la régénération de la France!

II.

L'Académie des inscriptions et belles-lettres, dans sa séance du 6 décembre, a reçu communication, par M. Héron de Villefosse, d'une inscription trouvée dans les ruines romaines d'Altava (La Moricière), par M. le commandant Demaeght. Cette inscription fournit de nouveaux renseignements sur l'insurrection des Maures qui éclata en 253 et ne fut réprimée définitivement qu'en 260; elle montre que l'insurrection s'étendit à l'ouest de la province, et que la seconde cohorte des Sardes fut parmi les troupes qui la combattirent. Les scarabées découverts à Eleusis et dans lesquels M. Maspero avait espéré trouver la confirmation des idées de M. Foucart ne sont que des amulettes de l'époque ptolémaïque, sans importance pour le sujet. M. Senart a proposé ensuite une explication de l'inscription du roi indien Kanichka (Ier siècle de notre ère), qui est conservée au cabinet des médailles.

Le 13 décembre, après l'éloge du regretté vicomte Hersart de La Villemarqué, prononcé par le président, M. Maspero, MM. Barbier de Meynard et Clermont-Ganneau ont entretenu l'Académie des découvertes d'inscriptions faites en Syrie par M. Van Berchem, dans le Djôlan et le Djedour par M. Fossey. M Clermont-Ganneau a ensuite commenté deux inscriptions palmyréniennes retrouvées en Syrie, et dont la seconde est particulièrement intéressante, parce qu'elle nous fait connaître un nouveau mois.

Les fouilles faites à Collo, en 1893-1894, par M. le commandant Hélo et dont M. Ph. Berger a entretenu l'Académie dans la séance du 20 décembre, ont mis au jour toute une nécropole dont les tombes les plus anciennes remontent à la fin de la période punique. M. Foucart a ensuite communiqué une note de M. Nicole sur les papyrus découverts dans le Fayoum en 1893; ils comprennent la correspondance, pour les années 343 à 350 de notre ère, de Flavius Abumius, commandant une aile de cavalerie campée près d'Arsinoé.

Dans les séances du 3, du 10 et du 17 janvier, M. Clermont-Ganneau a poursuivi la lecture de son mémoire sur les inscriptions palmyréniennes. Complétées par les autres documents, ces inscriptions lui ont permis de renverser les hypothèses jusqu'ici proposées sur T. LIX. 1er AVRIL 1896.

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