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ordre du conseil exécutif, que j'ai rédigé la proclamation signée du général Biron.

Leprésident audit accusé. En supposant que le conseil exécutif vous eût ordonné de rédiger la proclamation relative à un traité d'alliance, il ne vous avait pas autorisé à prendre, dans votre famille, tous ceux qui devaient concourir à ce pacte; c'est ainsi que par un acte de despotisme, une usurpation de pouvoir, vous avez porté l'alarme dans tout ce pays, qui venait de secouer le joug de la tyrannie ecclésiastique dans la personne de son évêque; et craignait de retrouver en vous et votre neveu, des tyrans de même trempe; c'est ainsi que vous avez fait manquer le plan de république projeté avec la France; vous aviez sans doute vos desseins pour écarter ce plan, puisque vous écriviez qu'il n'en fallait pas moins se réunir pour convenir d'une nouvelle forme de gouvernement; n'avez-vous pas cherché à vous emparer de l'autorité du prince? n'avez-vous pas convoqué des assemblées pour le faire destituer, et convertir la principauté en gouvernement populaire?

R. Mon neveu et moi étions les amis du peuple de Porentruy; nous lui avions donné, en plusieurs rencontres, des preuves de notre attachement à ses intérêts ; il ne pouvait redouter en nous des tyrans; et nous étions tellement les amis sincères de la liberté, connus pour tels par les Prussiens et Autrichiens, que nous avions été menacés d'être saisis au corps, pour avoir insurgé le peuple et perdu toute notre fortune à l'électriser : il est vrai qu'au moment de la convocation des assemblées, pour changer la forme de gouvernement, quelques malintentionnés m'accusèrent de vouloir me faire nommer évêque; mais cette accusation n'avait aucun fondement, puisque que le chef de l'église n'était attaqué que dans sa principauté, et était conservé dans ses fonctions épiscopales: quant aux oppositions des intérêts du prince avec ceux du peuple, en pareil cas, le prince de Porentruy était assez juste pour délier mon neveu, son secrétaire, du serment de fidélité qu'il lui avait prêté, et le dégager de toutes ses obligations de subordonné, pour répondre à la confiance des

habitans, qui reconnaissaient dans ce neveu un protecteur de leurs droits.

L'un des jurés observe qu'il est de notoriété, à Porentruy, que l'accusé Gobel et son neveù étaient redoutés dans le pays comme de nouveaux dominateurs, qui voulaient établir leur règne sur la destruction de l'évêque leur ci-devant maître ; et que l'un et l'autre ont provoqué au bruit du canon, avec tout son appareil, la dissolution de la société populaire, qui leur demandait compte de leurs rapines et exactions, et dont ils ne pouvaient se justifier.

» Il n'est pas moins notoire, ajoute le même juré, qu'il se tenait à l'évêché des conciliabules avec Brissot, Guadet, Luckner, et autres, qu'il s'y donnait des repas somptueux, des soupers trèsprolongés dans la nuit, où était admise toute la horde des députés et généraux conspirateurs contre leur patrie, et notamment Luckner, et que les liaisons dudit accusé avec ces traîtres étaient fréquentes, et que c'est le cas de l'interpeller sur ces faits.

Le président à l'accusé Gobel. ›Avez-vous, de concert avec votre neveu, provoqué au son du canon, la dissolution de la société populaire de Porentruy; est-ce pour vous dispenser de rendre compte de vos pillages dans le château?

» J'ai déjà répondu à ce fait, en disant que mon neveu et moi, avions sacrifié toute notre fortune pour procurer la liberté aux habitans de Porentruy; que les dépouilles du château nous appartenaient bien légitimement à titre d'indemnités, et que nous ne pouvions, sous aucun rapport, être considérés comme des loups, se couvrant de la peau de l'agneau pour dévorer plus facilement leur proie.

Le président à l'accusé. Ce fait, comme vous l'observez fort bien, est suffisamment éclairci, il vous serait impossible de le détruire par de nouvelles impostures; il s'agit maintenant de répondre sur les conciliabules qui se tenaient chez vous avec les ennemis de la patrie; sur vos liaisons fréquentes avec les députés et généraux déjà frappés du glaive de la loi, et de nous dire pour

quoi vous les traitiez si splendidement dans votre palais ci-devant épiscopal?

> R. Il ne s'est jamais tenu de conciliabules chez moi, jamais je n'ai admis de conspirateurs; j'ai vu, à la vérité, mais très-publiquement, Brissot, Guadet et Luckner, sans jamais avoir eu avec eux aucunes liaisons particulières, je n'ai cessé d'être l'ami du peuple.

› Le président à l'accusé. Et ces soupers très-reculés dans la nuit, quel pouvait en être le motif, comment les justifiez-vous?

› R. Ces soupers ne pouvaient être suspects, parce que j'y ai admis des citoyens dont tout le patriotisme est bien connu, et qui pourraient rendre compte des matières qui y ont été agitées.

» L'accusateur public à l'accusé. N'avez-vous pas fait des déclarations dans l'affaire de Luckner, où vous avez été appelé comme témoin; n'avez-vous pas dit que vous ignoriez ce qui s'était passé dans les conciliabules tenus chez vous?

R. Il s'agissait d'une explication relative à La Fayette machinant la ruine de sa patrie, et de savoir s'il y avait eu entre ce dernier et Luckner des intelligences; mais, étant occupé à recevoir et conduire mon monde, il m'est échappé bien des choses, et je n'ai pu saisir que des phrases sans suite. Je crois avoir entendu dire à Luckner, si Dumourier venait, je l'étrillerais de bonne importance.

» Le président à l'accusé. Prenez garde, ce n'est plus comme témoin que vous allez répondre, c'est comme accusé; c'est dans votre propre cause que vous êtes interpellé, et les réponses évasives que vous nous avez précédemment faites dans l'affaire de Luckner, et que vous voulez maintenant réitérer, ne sont plus de saison. Dites-nous donc bien positivement ce dont on s'occupait dans vos conciliabules, si vous voulez que nous ayons quelque confiance en vous?

R. Il s'agissait de savoir si La Fayette devait faire marcher sur Paris, de concert avec Luckner; mais je dois observer au 19.

T. XXXII.

tribunal que dans le langage allemand de Luckner, marcher sur Paris, c'était dire venir à Paris et rien de plus.

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L'un des jurés observe que les faits sont trop connus, pour que l'accusé cherche à les déguiser; que d'après les preuves acquises il n'est pas plus permis de douter de la trahison de Luck ner, et de sa coalition avec nos ennemis intérieurs et extérieurs, que de celle de La Fayette et de Dumourier, qui se sont dépouillés du masque imposteur dont ils s'étaient couverts, se sont annon. cés comme des Coriolan, sans en avoir les funestes talens.

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» Le président à l'accusé. Lors de votre abdication des fonctions épiscopales, comment vous êtes-vous comporté; et ne youliez-vous pas exciter la guerre civile, faire en France une nouvelle Vendée?

» R. Ma démarche a été commandée par les circonstances: c'était le 27 frimaire, époque du vœu réuni des quarante-huit sections, pour la clôture des églises; Clootz et Péreyra vinrent me trouver à onze heures du soir ; j'étais couché et même déjà livré au sommeil. On m'annonce des fonctionnaires publics, qui ont des choses importantes à me communiquer, je me lève, je les reçois; ils me disent que c'est le moment de se sacrifier pour la chose publique, qu'ils viennent me demander ma démission du poste d'évêque. Invité d'abjurer mon ministère, je réponds que je ne connais pas d'erreur dans ma religion, que je n'en ai point à abjurer, et que je m'y tiendrai collé. Mais, me réplique-t-on, il ne s'agit pas de discuter si vos principes religieux sont ou non fondés, il est seulement question de cesser vos fonctions; en ce cas, j'ad hère volontiers à votre demande; le peuple m'a demandé, le peuple me renvoie, c'est le sort du domestique aux ordres de son maître. Je demande cependant à ceux qui viennent solliciter ma démission, le temps de consulter le conseil épiscopal, et je promets de faire ce qu'il décidera à la majorité. Conformément à la réponse de ce conseil, composé de dix-sept votans, dont quatorze pour l'affirmative, contre trois opinans d'une manière négative, je me présente au département, j'y trouve les commissaires Momoro et Chaumette, et des envoyés de la Nièvre, et après un discours de

Momoro qui présidait la députation et portait pour elle la parole, discours auquel je répondis par un autre, explicatif de mes opinions et des motifs qui me faisaient agir, je donnai ma démission et remis mes lettres de prêtrise.

› Le président à l'accusé. Les motifs qui vous conduisaient n'étaient pas difficiles à saisir ; votre réunion à Chaumette, aux commissaires de son département, à Momoro et autres pétitionnaires de la même faction, indiquait assez dans quel esprit se faisait votre démission, dans quel espoir perfide elle était offerte. Chaumette voulait exciter un mouvement violent, à tel prix que ce fut; ses mesures étaient assez bien combinées, car au même moment où il éveillait les fanatiques, les consciences timorées, en provoquant la clôture des églises et la cessation de tout culte, au lieu d'assujettir les prostituées à des travaux utiles, il les faisait toutes incarcérer, et soulevait ainsi la classe des libertins, de ces hommes immoraux, contre ce sexe honnête et décent, que le regard seul d'un impudique fait rougir; et bien certainement ces manoeuvres criminelles n'étaient pas étrangères à l'accusé Gobel; sans doute il les partageait et se promettait bien d'en recueillir tout le fruit: oserait-il le contester!

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› R. En présentant ma démission, je n'ai fait que me rendre au vœu général suffisamment manifesté par les quarante-huit sections, par un agent national, et des représentans du peuple, que je n'avais pas droit de soupçonner; d'ailleurs je n'aurais pas consulté mes vicaires, ni recueilli scrupuleusement leur avis; j'ai déclaré publiquement qu'il ne pouvait y avoir d'autre culte que celui de la liberté, et ma conduite, depuis la révolution, ne s'est jamais démentie.

» Le président à l'accusé. Le vœu apparent des sections, les intrigues, les sollicitations de quelques hommes publics vendus aux malveillans, ne pouvaient être des autorités suffisantes pour vous déterminer à présenter votre démission, à venir parler contre les principes qui doivent vous être naturels ; il fallait attendre que la première des autorités se fût prononcée sur cette matière délicate, et lorsqu'elle se taisait sur la continuation, ou la cessation de

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