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pas le chapeau à la main qu'on leur en ouvrit les portes, mais qu'ils le demanderaient à coups de canon. Quand l'Assemblée nationale a consenti à ce qu'on envoyât des troupes sur le territoire romain, elle a bien compris que c'était une entreprise qui, si elle rencontrait de la résistance, se ferait jour l'épée à la

main.

Un membre à gauche. — C'est bien grave!

M. THIERS. C'est bien grave? Soyez convaincus d'une chose. Nous sommes fort touchés de cette raison que les 36 millions de Français qui ont honoré leur carrière militaire, depuis cinquante ans, par tant de hauts faits, n'ont pas besoin d'ajouter à leurs trophées d'autres trophées conquis sur le glorieux Garibaldi. Non! (Rires approbatifs à droite.)

Savez-vous où est le courage? La question d'ordre est posée partout, et c'est vous qui l'avez posée partout, car vous l'avez posée hier de manière à ne laisser de doute à personne. La question d'ordre est posée partout. (Applaudissements à droite.) Ce n'est pas pour l'ordre qu'on est allé à Civita-Vecchia, c'est pour la liberté; mais vous en avez fait une question d'ordre. Eh bien, la civilisation européenne, qui est contenue dans l'ordre aujourd'hui, ne reculera pas devant la démagogie qui est à Rome. Non, elle ne reculera pas ! (Murmures à gauche.) Non, elle ne reculera pas. (Marques nombreuses d'approbation au centre et à droite.)

C'est là ce qui fait qu'il n'y a pas 2 millions d'individus d'un côté et 36 millions de l'autre. Il y a d'un

côté l'ordre, et de l'autre le désordre. (Violente inter

ruption à gauche.)

M. LAGRANGE. Moi, je ne suis pas un homme de désordre, entendez-vous?

M. THIERS.

Je vous répète que je ne veux insulter personne. Vous êtes, Messieurs, bien susceptibles, en vérité. (Réclamations à gauche.) Comment! vous nous adressez les outrages les plus grossiers!

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M. THIERS. Vous accusez les ministres d'avoir violé la Constitution; vous nous accusez d'appuyer à tort et à travers les violateurs de la Constitution; vous leur avez dit hier qu'ils avaient du sang au front, et vous vous étonnez que nous venions dire d'une manière générale qu'il y a d'une part la démocratie et de l'autre la démagogie!

Nous usons d'un droit; quelque désagréable que cela puisse être pour vous, vous nous entendrez, car c'est notre droit de nous faire entendre. (Vive approbation à droite et au centre.) Eh bien, vous dites qu'on a violé la volonté de l'Assemblée nationale! Moi, je vous dis que l'Assemblée nationale eût été inepte et aveugle, si, en consentant à envoyer 12 ou 15,000 hommes à Civita-Vecchia et à Rome, elle n'avait pas prévu que, si l'on trouvait la porte fermée, il faudrait l'enfoncer.

L'Assemblée constituante a saisi ce dont il s'agissait; elle n'a pas douté un moment qu'on irait à CivitaVecchia, et puis à Rome. (Réclamations à gauche.)

Permettez, je vous accorderai ceci, car je discute

très sérieusement, que tout le monde a pu n'être pas exactement d'accord sur ce qu'on allait faire à Rome; mais tout le monde, ou, du moins, tous ceux qui ont voté, ont été d'accord sur le point essentiel, c'est qu'on allait en armes sur un territoire qu'on dit indépendant et inviolable; c'est le point essentiel.

De quoi accusez-vous les ministres? Est-ce d'être allés sur tel ou tel point plutôt que sur tel autre? Vous les accusez de quoi? D'avoir violé un territoire inviolable, parce qu'il était indépendant. (A gauche: Non! Non!)

M. PASCAL-DUPRAT. - Il y a une question préalable à vider avant la question de fond.

Voix à gauche. -Nous demandons la communication des pièces! La question n'est pas là!

M. THIERS. La question n'est pas là! Je sais bien qu'il ne s'agit pas de la question de fond, mais attendez. Comme vous demandez des pièces pour vous éclairer, il faut bien que je parcoure toutes les parties de la question pour vous faire voir que les pièces demandées par vous n'ont pas trait à la question même, et, quand je suis obligé de traiter la question de fond, c'est bien malgré moi, car ce n'est pas nous qui demandons la prolongation du débat, ce n'est donc pas mon intérêt qui m'égare; ce que nous demandons, c'est de rassurer le plus tôt possible le pays par une décision positive. (Nouvelle approbation au centre et à droite.)

Vous avez déclaré qu'il y avait violation de la Con

VIII.

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stitution, parce qu'un de ses articles défend d'attenter à la liberté d'aucun peuple, parce que le Gouvernement a agi, dites-vous, contre la volonté de l'Assemblée nationale.

Eh bien, nous disons, nous Les faits nous sont connus, ce sont des coups de canon tirés contre les murs de Rome, et l'article de la Constitution ne nous paraît pas violé. Quant aux décisions de l'Assemblée nationale, il y en a deux : l'une qui autorisait à toucher le territoire du peuple romain, l'autre qui voulait ramener l'expédition à son véritable esprit, c'est-àdire à plus de conciliation. Eh bien, une négociation a eu lieu, un traité a été fait, et il a été produit. Le gouvernement a pensé qu'il n'était pas honorable pour la France; nous avons pensé comme lui qu'il serait déshonorant de l'accepter. C'est sur ces pièces que nous avons trouvé que le gouvernement avait parfaitement fait d'ordonner la reprise des hostilités; c'est sur ces éléments que vous avez trouvé, vous, qu'il y avait lieu de pousser un cri de guerre. Nous, nous pensons, sur ces éléments, qu'il y a à pousser un cri de sécurité pour que le pays sache deux choses que le gouvernement n'a pas violé le pacte fondamental, et que ce gouvernement, qui saura faire respecter la loi, nous a derrière lui pour l'aider dans sa tâche.

(Ce discours est suivi des bravos et des applaudissements de la majorité.)

M. Ledru-Rollin ayant répliqué que la guerre n'était pas entre l'ordre et la démagogie, mais bien entre les monarchies et les républiques, que M. Thiers n'avait fait que reproduire, à ce sujet, les paroles prononcées récemment par le roi de Prusse et l'empereur de Russie, et qu'en les portant à la tribune il avait ainsi témoigné qu'il était du parti des Cosaques et non de celui de la République, M. Thiers fit la réponse suivante :

M. THIERS.

Je demande la parole! (M. Thiers se

précipite à la tribune.)

M. LE PRÉSIDENT. — Il n'est permis à aucun membre de l'Assemblée d'adresser...

M. THIERS.Non! Non! Monsieur le président, je vous prie, n'ajoutez rien; je prends ce débat pour moi.

M. PASCAL-DUPRAT. - Quand M. Thiers nous appelle démagogues, vous ne le rappelez pas à l'ordre. Faites votre devoir en défendant la dignité de cette portion de l'Assemblée.

Vous prétendez avoir le monopole de l'ordre.
Au centre. Allons done!

M. THIERS. — M. Pascal-Duprat prétend que nous voulons avoir le monopole de l'ordre.

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M. THIERS. Ne voulez-vous pas avoir le monopole de la liberté et du patriotisme?

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