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tantes ont devancé l'âge présent, et, s'il reste beaucoup à perfectionner, beaucoup à étendre, il reste peu à inventer. Entre les propositions vraiment nouvelles en effet, il y en a peu de compatibles avec le respect de la propriété, de la liberté individuelle, de la fortune publique. Parmi celles qui n'attentent à aucun des objets sacrés, il y a beaucoup de conceptions chimériques et impraticables, et, quand on a longuement, sérieusement examiné la plupart des inventions du temps actuel, on reconnaît que, s'il est possible d'organiser mieux, d'étendre sur une échelle plus vaste les moyens de bienfaisance anciennement pratiqués, il en est peu de nouveaux à employer, si l'on veut toutefois se renfermer dans les limites du bon sens. Quand nous disons qu'il y en a peu de nouveaux, nous n'entendons pas dire qu'il n'y en ait point du tout, et nous nous efforcerons même de vous en proposer quelques-uns; mais nous disons qu'il y en a peu, et cela se conçoit, quand on songe à tous les établissements que l'humanité et la religion ont créés depuis des siècles. Ce n'est pas d'aujourd'hui, heureusement, que l'homme aime l'homme; ce n'est pas d'aujourd'hui qu'il y a des cœurs pour lesquels le soulagement du pauvre est une noble occupation, une consolation touchante, une prière à Dieu. C'est en parcourant la suite des institutions existant depuis des siècles, ou depuis quelques années seulement, que nous avons pu nous convaincre à quel point cette société tant calomniée, avait été persévérante, ingénieuse, inventive, dans sa bienfaisance, et

VIII.

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combien peu de choses elle avait laissées à inventer à ses détracteurs de l'àge présent. Elle a sans doute beaucoup laissé à perfectionner et à développer, car on ne perfectionne pas le jour même où l'on crée, car on ne peut pas proportionner à l'étendue toujours croissante d'une société des créations qui datent souvent de son origine. Mais elle a peu laissé à créer, car lorsque, depuis des siècles, on pense à un objet, on laisse peu de nouveautés à ceux qui viennent après soi; et, s'il était d'ailleurs des choses auxquelles les âges antérieurs n'eussent pas songé, on s'est hâté d'y penser et de les essayer depuis trente années, c'est-àdire depuis que la discussion publique des intérêts généraux a contribué à diriger l'attention des esprits vers le sort des classes populaires On arrive done tard aujourd'hui, non pas pour bien faire, ce qui est toujours possible, mais on arrive tard pour créer. Qu'importe au surplus, si l'on fait le bien, que la manière de le faire soit ancienne ou nouvelle ! Cependant, pour s'entendre sur ce sujet, il faut sortir des généralités, et entrer dans l'énumération des moyens ou anciennement pratiqués, ou nouvellement proposés, de soulager les souffrances populaires, et dans l'appréciation des uns et des autres. Pour ne pas nous égarer dans cette énumération, nous avons cru devoir nous tracer un ordre, et nous avons jugé n'en pouvoir pas suivre un meilleur que celui des divers âges de l'homme, de sa naissance à sa mort. C'est en effet de lui, de ses misères infinies qu'il s'agit; ces misères changent suivant

ses âges; les moyens de les soulager doivent changer également. Il y a les malheurs de l'enfance, de l'adolescence, de l'âge mûr, de la vieillesse. Nous avons commencé par nous demander quelles sont les infirmités de l'enfance et de l'adolescence, leurs besoins, les moyens d'y pourvoir, anciennement ou récemment imaginés, et ceux qu'une philanthropie sincère, résolue à aller jusqu'à la dernière limite du possible, sans toutefois la dépasser, pouvait employer. Nous avons recherché pour l'âge mûr, affligé de moins d'infirmités mais non moins travaillé de besoins, quels pouvaient être les moyens ou de soulager ses maladies imprévues, ou de mettre à sa disposition les instruments du travail, et de le tirer de la misère par l'emploi utile de ses forces, en distinguant toujours les moyens anciens, ou nouveaux, et prononçant toujours entre les bons et les mauvais. Enfin, de l'âge mûr passant à la vieillesse, et, après quelques années à peine de validité, retrouvant encore l'homme infirme, nous avons recherché comment on pouvait s'y prendre pour soulager sa dernière débilité, et surtout pour lui assurer, par des réserves faites à propos, le moyen de sustenter sa vieillesse avec les produits de son âge mûr. Ce cercle parcouru, nous nous sommes même occupés de sa mort, et du soin d'assurer les derniers devoirs au pauvre aussi bien qu'au riche, dans ce jour de la véritable et infaillible égalité.

C'est en parcourant avec nous ce triste et laborieux . cercle de la vie humaine, que vous pourrez vous faire

une idée de cet immense sujet, être justes envers l'ancienne société, et mesurer avec exactitude ce que la nouvelle doit oser, espérer et tenter.

Nous diviserons donc ce travail en trois parties: 1° L'enfance et l'adolescence;

2° L'àge mûr;

3o La vieillesse.

ENFANCE ET ADOLESCENCE.

Si l'on arrête ses yeux sur l'enfance et qu'on examine ses nombreux besoins, il sera facile de découvrir ce que la bienfaisance privée ou publique peut faire pour elle. La mère qui porte l'enfant dans son sein n'a souvent pas de quoi se nourrir, se vêtir, pendant que, livrée aux douleurs de l'enfantement, elle est dans l'impossibilité de travailler pour gagner sa vie. Quelquefois, pour cacher la faute qui l'a rendue mère, elle abandonne à la charité publique l'enfant qu'elle a mis au jour, et il faut que cette charité le recueille pour qu'il ne périsse pas. Si elle a voulu rester mère de cet enfant, dû à des relations légitimes, elle ne peut ni l'allaiter, ni le soigner, ni le surveiller, toujours condamnée à travailler de ses mains pour sustenter sa vie. L'enfant, ainsi délaissé, exposé à tous les périls, aux sociétés les plus dangereuses, ne reçoit ni les soins physiques ni les soins moraux qui lui seraient nécessaires. D'autres fois des parents avides,

trop pressés de tirer de ses faibles bras quelque bénéfice, l'astreignent à des travaux qui abrutissent son intelligence, et empêchent le développement de son jeune corps. Bientôt arrivé à l'âge d'apprenti il ne sait pas défendre ses intérêts quand il traite avec le maitre qui le prend à son service et doit lui donner l'instruction pour prix de son travail. Si enfin, entraîné par l'inexpérience de son âge, sans être né pour le mal il y tombe passagèrement, les prisons de l'État, loin d'être pour lui un lieu de régénération morale, deviennent un lieu de corruption, d'où il ne sort que pour être un scélérat consommé, et l'échafaud ou les galères sont le terme d'une carrière mal commencée, qui aboutit au crime, tandis qu'avec des soins. elle aurait pu aboutir à la vertu. Finalement cet enfant privé quelquefois d'un sens, pourrait vivre encore tolérablement, se suffire à lui-même, si on lui apprenait à suppléer aux organes qui lui manquent en développant davantage ceux qui lui restent.

Ainsi, recueillir l'enfant abandonné dont la mère se dérobe, et lui tenir lieu de famille; aider celle qui ne cache pas sa qualité de mère, l'aider pendant qu'elle est en couche, l'aider encore après que son enfant est né, l'allaiter pour elle quand elle ne le peut pas, le surveiller pendant le temps qu'elle est obligée de donner au travail; empêcher qu'on n'abuse des forces naissantes de cet enfant, l'instruire, le conseiller, lorsque, trop jeune pour se défendre, il traite avec le maître qui consent à employer sa jeunesse; veiller sur ses

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