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disputes de l'esprit humain et des partis. (Vive approbation à droite. - Bruit à gauche.)

Je dis que dans ces limites, en respectant la conscience de tous, en n'atteignant à aucun degré la foi de personne, il est possible de diriger l'enseignement de la jeunesse, de la gouverner utilement, et je suis convaincu que, dans ces limites-là, les uns pourront coexister à côté des autres, et qu'il n'y aura pas de mal.

Quant à moi, je crois encore possible, je crois toujours possible cet accord de la philosophie et de la religion dont je parlais il y a quelques jours. Et voyez comme vous êtes difficiles! Lorsque M. de Montalembert, affligé, et justement affligé de l'état du monde, s'en prenait à la philosophie, vous vous êtes récriés. Je suis venu et j'ai dit : Elles sont immortelles l'une et l'autre, car elles n'ont jamais pu se détruire; l'Église n'a pas détruit la philosophie, et la philosophie a-t-elle détruit l'Église? Il y a eu des persécutions; vous en avez parlé, et vous avez cité celles du moyen âge. Elles sont déplorables; loin de moi l'intention de les justifier jamais. Elles avaient cependant, je ne dirai pas une excuse, mais une explication dans la barbarie des temps. Mais, d'un autre côté, on a persécuté l'Église il y a quarante et cinquante ans, quand on n'avait pas l'excuse des mœurs, car on était dans le siècle le plus doux, le plus humain de tous les siècles; on a persécuté l'Église. Eh bien, a-t-on détruit l'Église? Vous m'interrompez lorsque je parle de la religion du pays; mais

vous n'abordez pas cette tribune sans venir lui rendre de profonds hommages, et vous avez raison, vous faites bien. Vous ne parlez de ses ministres, même étant ses adversaires, qu'avec un respect que je loue en vous. Vous sentez donc sa puissance. Eh bien, la religion n'a pas détruit la philosophie, la philosophie n'a pas détruit la religion; elles ne doivent pas se détruire, elles ne se détruiront pas l'une l'autre. Je vous propose d'essayer de les concilier, et vous dites: Non! Non! Alors pourquoi vous plaignez-vous de M. de Montalembert? Laquelle des deux voulez-vous détruire? Laquelle des deux voulez-vous que l'autre détruise? Vous ne voulez pas que la religion détruise la philosophie; voulezvous que la philosophie détruise la religion?

Quelques voix à gauche. - Non! (Rires et exclamations à droite.)

M. THIERS.Non! Alors ne traitez pas avec tant de mépris, tant de réprobation, une loi dont toute l'intention est de faire vivre ensemble, l'une à côté de l'autre, la religion et la philosophie, avec les égards et les respects qu'elles méritent l'une et l'autre, de les faire vivre dans ce concert convenable et que l'intérêt du pays appelle et commande.

Réussirons-nous? Moi qui crois à la vraie liberté, moi qui crois à la puissance de la discussion et des rapprochements, je pense que nous réussirons. Cependant vous dites que nous ne réussirons pas. Moi, dans l'intérêt du pays, et c'est là un des premiers intérêts du pays, je crois que nous réussirons et je

l'espère. Si nous échouions, ce serait un grand malheur; mais, permettez-moi cependant de vous dire une chose en finissant : Nous ne serions pas les seuls, depuis deux ans, qui n'aurions pas réussi.

(Vive hilarité et marques nombreuses d'approbation à droite.)

(L'orateur, de retour au banc de la commission, reçoit les félicitations d'un grand nombre de membres.)

L'amendement Wallon fut rejeté, et l'art. 7 fut adopté tel qu'il avait été proposé par la commission.

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CLXII

DISCOURS

DANS LA DISCUSSION DU PROJET DE LOI

SUR

L'INSTRUCTION PUBLIQUE

(AMENDEMENT LASTEYRIE)

PRONONCÉ LE 23 FÉVRIER 1850

A L'ASSEMBLÉE LÉGISLATIVE

Au cours de la deuxième délibération, et au moment où l'assemblée allait aborder la discussion du titre 3 concernant l'instruction secondaire, M. Ferdinand de Lasteyrie proposa un article nouveau ainsi conçu: «L'enseignement secondaire comprend l'instruction morale et religieuse, l'étude de la langue française, des langues anciennes et modernes, de l'histoire, de la géographie, des sciences mathématiques et physiques qui servent de préparation au baccalauréat et aux examens d'admission dans les écoles spéciales. »

A l'appui de cette disposition supplémentaire, M. de Lasteyrie fit observer que son but, en la proposant, était de retrancher les études philosophiques du programme de l'enseignement secondaire. La vraie place de ces études, en effet, était dans l'enseignement supérieur. Là seulement on pouvait leur consacrer tout le soin et le temps qu'elles comportaient, tandis qu'ébauchées dans l'enseignement secon

daire, elles ne pouvaient que fausser l'esprit des enfants et inquiéter ainsi la conscience de beaucoup de familles.

La proposition fut combattue par M. Thiers dans les termes suivants:

Messieurs,

Je viens, au nom de la Commission, vous exprimer très brièvement son avis sur l'amendement qu'a proposé hier M. Ferdinand de Lasteyrie.

On a paru s'étonner de ce que la Commission avait demandé le renvoi et n'avait pas exprimé immédiatement son avis sur ce grave sujet. Le motif en est bien simple c'est qu'aucun amendement de ce genre n'avait été présenté à la Commission, et qu'aucun de ses membres ne s'était imaginé que l'enseignement philosophique pût être, en France, retranché de l'enseignement secondaire...

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M. FERDINAND DE LASTEYRIE. Il y a seize jours que l'amendement est imprimé et distribué.

M. THIERS. L'avis de la Commission, en tout cas, après une courte délibération, l'avis de la Commission est formel il est pour le maintien de l'enseignement philosophique dans l'enseignement secondaire. (A gauche. Très bien!) Je vais dire à quelle condition, dans quelle limite et par quels motifs. Je crois que la cause principale de l'erreur qu'on commet à ce sujet est dans la manière d'entendre les divisions de l'en

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