marqué, alors il n'y auroit qu'une même et seule vertu distribuée dans toutes ces étoiles. Or, des vertus diverses sont le fruit de principes créateurs; et, selon toi, tous ces principes se réduiroient à un seul. Si des corps clairs produisoient ces taches brunes, alors,' ou la planète de la lune seroit privée de sa matière en quelques points de son extension, ou, devenue semblable au corps de l'animal, qui offre d'abord la partie grasse, et ensuite les chairs, elle changeroit ainsi de couleur dans quelques parties de son étendue. D'ail leurs, si des corps clairs étoient la cause de ces taches, on en auroit la preuve à chaque éclipse de soleil, parce que da lumière passeroit à travers la lune, comme à travers tous les corps diaphanes, ce qui n'arrive pas. Il faut réfuter l'autre argument, et si je parviens à le détruire, tu conviendas que ton opinion n'aura pas été juste. Si la lumière ne traverse pas la lune, c'est qu'il y a un point où un corps dense ne la laisse plus passer, et alors le rayon revient sur lui-même, comme la couleur revient par un verre auquel adhère le vif-argent. Tu diras que le rayon paroît ici plus obscur qu'en d'autres parties, parce qu'il est réfléchi à une plus grande profondeur; mais l'expérience, qui vous est si utile dans vos arts, peut tout expliquer. Prends trois miroirs, places-en deux à une même distance; mets au milieu le troisième, que tu tiendras plus éloigné, fixe la vue entre les deux premiers, tourné directement vers eux; fais apporter derrière toi un flambeau, dont la lumière, répercutée par les trois miroirs, puisse revenir à toi; tu reconnoîtras, alors, que le miroir le plus éloigné brille d'une lumière moins étendue, mais aussi vive que celle des miroirs qui sont plus près de toi. Maintenant, ainsi que des lieux que couvre la neige, sont privés de sa couleur et de sa froidure, à la première influence de la chaleur, de mème ton esprit, dégagé de sa fausse pensée, recevra un tel éclat, que tu seras sur-le-champ convaincu. >> Dans le ciel de la divine paix se meut un corps qui en sa vertu, renferme tout son être; le ciel qui suit répartit cet être entre diverses essences, qu'il distingue et qu'il contient. Les cieux intérieurs combinent différemment leurs distinctions particulières, et les dirigent vers le but qui leur est marqué. Ces organes du monde, ainsi que tu le vois, descendent, de degré en degré, devenant successivement des effets et des causes. Observe bien comme je vais droit à la vérité que tu désires; tu sauras ensuite te suffire à toimême. Il convient que tu doives aux moteurs bienheureux la connoissance du mouvement et de la vertu des sphères, comme on doit au maréchal la connoissance de l'art du marteau. » Le huitième ciel, que tant de feux rendent sibeau, prend l'image de la haute intelligence qui décide son mouvement. L'ame, dans votre poussière, se répand en différens membres et en diverses puissances; c'est ainsi que cette intelligence suprême développe sa bonté multipliée sur les étoiles, en se tournant sur son unité. Chaque vertu forme une ligue particulière avec le corps précieux qui lui fait opérer ses effets, comme la vie, en vous, se 'lie à votre ame. Cette vertu mêlée à chaque étoile, par l'heureuse nature dont elle dérive, brille comme la joie dans un oeil satisfait. De cette vertu, et non de corps denses ou clairs, provient ce qui te paroît différent entre une lumière et une autre nature de lumière. Cette vertu est le principe formel qui, d'accord avec sa puissance, produit ces corps remarquablés par leur clarté et leur densité. » : ་ ་ ་ CHANT III. ARGUMENT. Le Dante rencontre dans la lune les ames de celles qui, sur la terre, ont fait le vœu de virginité, et que la violence a contraintes à le rompre. Il trouve parmi elles Piccarda, sœur de Forèse, qui lui raconte son histoire et celle de Constance, fille de Roger, roi de Sicile, et épouse de l'empereur Henri v. BEATRIX, ce soleil qui m'inspira d'abord un si violent amour, m'avoit découvert, par ses explications, de hautes vérités, et, voulant me confesser vaincu et persuade, je levai la tête, pour lui parler; mais il s'offrit à moi un spectacle qui m'occupa tout entier, et je ne pensai plus à ce que j'allois lui avouer. Si nous regardons une source pure et tranquille, dont il soit facile d'apercevoir le fond, les images reviennent à nos yeux plus affoiblies que l'éclat d'une perle. |