Slike stranica
PDF
ePub

l'ordre enfin. Ainsi, en réalité, le Dieu souverain n'est que la raison souveraine, et c'est encore ce que l'on avoue formellement,

<< La révolution de 1814 remit tout en question, les doctrines encore plus que les cou<< ronnes. Mais comme le droit divin se don<< noit pour l'emblème particulier du pouvoir << absolu, la souveraineté du peuple ne man<< qua pas d'être arborée comme l'étendard de << la liberté. Les courtisans de Buonaparte, les << fonctionnaires sans emploi, se rappelèrent leur ancien maître avoit régné en vertu « des constitutions de l'empire, lesquelles << avoient été sanctionnées par le peuple. A << ceux-ci se joignirent quelques vieux répu<< blicains, quelques vieux philosophes ency

« que

clopédistes; et la France resta d'autant plus << fidèle au culte de la souveraineté du peuple, « qui se retrouvoit au fond de tous les écrits « de l'opposition, que jadis elle l'avoit invo« quée avec succès contre une tyrannie dont << elle se croyoit encore menacée,

<< C'est alors qu'une nouvelle école philo<<< sophique osa s'élever contre les prétentions << d'une doctrine qui, depuis trois siècles,

<< servoit de bannière aux opprimés. La nou<< velle école démontra que le pouvoir absolu << ne change point de nature parce qu'il est

«

<< exercé par le peuple, ou au nom du peuple, << ou par une caste, ou par un maître, et au << nom de Dieu. Aux droits de l'homme invo« qués jadis contre la cour, elle opposa les << droits de l'individu, si souvent sacrifiés par << la société. La doctrine beaucoup plus pro<< fonde de l'individualisme devint la base « de la nouvelle politique rationnelle. L'in<< dividu fut en quelque sorte créé élément << vivant de la cité, obéissant aux lois qu'elle << lui impose, mais n'en reconnoissant d'ab<< solues que celles qui sont justes; se soumet<< tant à toutes les souverainetés, mais n'ac<< ceptant comme légitime que celle de la

<<< Raison 1. »

Tant que la puissance publique contient les résistances particulières, force est bien aux individus de se soumettre aux lois, aux souverainetés établies. Mais il s'agit de savoir

'Globe du 30 janvier 1828.

s'il en est de légitimes ou qui aient droit de commander l'obéissance. Or, selon la philosophie du siècle, point de souveraineté légitime que celle de la raison. Et comme, en même temps, cette philosophie ne reconnoît de raison que la raison individuelle, donc aussi la souveraineté inpoint de souveraineté que dividuelle. Chacun est souverain de soi-même dans le sens absolu du mot. Sa raison voilà sa loi, sa vérité, sa justice. Prétendre lui imposer un devoir qu'il ne se soit pas auparavant imposé lui-même par sa pensée propre et sa volonté, c'est violer le plus sacré de ses droits, celui qui les comprend tous; c'est commettre le crime de lèse-majesté individuelle. Donc nulle législation, nul pouvoir possible; et la même doctrine qui produit l'anarchie des esprits, produit encore une irremédiable anarchie politique, et renverse jusque dans ses premiers fondements la société humaine.

Cependant l'homme ne vit que dans la société. Si donc ces prodigieux principes, déjà si répandus, venoient à prédominer entièrement, que pourroit-on prévoir que des troubles, des désordres, des calamités sans fin

et une dissolution universelle? L'état extérieur du monde n'est jamais que l'expression fidèle de l'état des intelligences. Point de chimère plus vaine que celle d'un ordre purement matériel. Les institutions, les lois, les gouvernements tirent toute leur force d'un certain concours général des pensées et des volontés. Qu'est-ce que le pouvoir sans l'obéissance? Qu'est-ce que le droit sans le devoir ? L'individualisme qui détruit l'idée même d'obéissance et de devoir, détruit donc le pouvoir, détruit donc le droit; et alors que reste-t-il qu'une effroyable confusion d'intérêts, de passions, d'opinions diverses? Telle est la base de la nouvelle politique rationnelle, et le terme inévitable où doit aboutir toute doctrine exclusive du christianisme. La souveraineté de chaque raison dans l'ordre spirituel une fois admise, la souveraineté de chaque homme dans l'ordre politique s'en déduit immédiatement, et de ces deux maximes inséparablement liées, il résulte que la domination, toujours dépourvue de droit, n'a d'autre fondement que la force; qu'il ne sauroit y avoir sur la terre

que des pouvoirs usurpés, des gouvernements tyranniques par le seul fait de leur existence; qu'ainsi les corps peuvent être soumis, mais la raison, la conscience jamais ; que nul commandement n'oblige; qu'au contraire, commander c'est opprimer, et que dès lors, sitôt qu'il en a la puissance, chacun est libre de rentrer dans son indépendance première, ou de reconquérir sur la force usurpatrice son inaliénable souveraineté. On nous dit que cette doctrine est celle du siècle, et cela est vrai en partie, comme il est vrai qu'entre elle et la doctrine du christianisme il n'existe aucun milieu. Il faut nécessairement se décider pour l'une ou pour l'autre, ou pour l'autre, et l'avenir des peuples dépendra du choix auquel ils s'arrêteront. Les destinées de l'homme sont celles qu'il se fait: Dieu l'a laissé dès le commencement dans la main de son conseil 1 et quand viendra la fin, quand le dernier jour luira sur le monde, l'extinction totale

[ocr errors][merged small]
« PrethodnaNastavi »