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Nous ne saurions trop le redire, le plus pressant devoir du Clergé, dans les circonstances présentes, est de s'isoler complètement d'une société politique athée. Voulezvous sauver la foi et rendre à l'Église son indépendance nécessaire, soyez évêques, soyez prêtres, et rien de plus. Nulle dignité, nulle fonction de l'ordre civil, n'est compatible aujourd'hui avec la liberté de votre ministère. Dégagez-vous de tout lien de parti. Que vous importent ces querelles de la terre, où, de part et d'autre, on ne combat que pour l'erreur et pour l'intérêt? Laissez les rois et les peuples se disputer, dans leurs désirs aveugles, un pouvoir sans consistance, parce qu'il est sans règle, et qu'on en méconnoît également la source, les limites et les conditions. Du haut de la montagne sainte,

Sine dubio qui fræno indiget, qui paratus est plus ambulare quàm via extendatur, qui etiam metas velociter transcurrere nullis retardatur periculis. Procul enim odoratur bellum, exilium reputat patriam, quia omne solum forti patria est. Petri Cellensis Epist. X, lib. I, ad Thom. Cantuar. Archiepisc.

contemplez l'orage qui gronde à vos pieds, puis, levant les yeux vers le Ciel, attendez en paix que le calme renaisse dans ces régions troublées. Que les hommes, en vous voyant, éprouvent involontairement l'impression qu'ils ressentiroient si quelque puissance secourable, étrangère à leurs passions, apparoissoit au milieu d'eux. Enveloppez-les de votre amour, et qu'il pénètre jusqu'à ceux même que n'atteindroit pas la vérité. Soyez pères, comme est père celui qui fait lever son soleil et tomber la pluie sur les bons et sur les méchants', qui n'achève point de rompre le roseau déjà brisé, et n'éteint pas la mèche qui fume encore ›.

Après avoir affranchi l'Église de la servitude du Pouvoir civil, il reste encore au Clergé un autre devoir à remplir. Le commandement que le Fils de Dieu a fait aux apôtres d'enseigner toutes les nations3, renferme, outre l'obligation perpétuelle d'annoncer la parole

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évangélique, celle de la défendre, de l'environner de tout ce qui peut en assurer l'effet, et de préparer ainsi, dans les temps mauvais, le retour de l'ordre, en ramenant les esprits à la vérité. On se représenteroit difficilement le bien que, sous ce rapport, il est possible d'opérer car, d'une part, la profonde anarchie spirituelle dans laquelle l'Europe est tombée, est un état contre nature, et, par conséquent, ne sauroit être un état fixe; et, de l'autre, le développement progressif de l'erreur, a produit un développement correspondant de lumière, de sorte que jamais on ne vit si clairement le fondement des croyances chrétiennes, et leur liaison avec les lois essentielles de l'homme, considéré soit comme individu, soit comme être social, et avec la base même de la raison humaine.

Il n'existe aujourd'hui, hors du christianisme, qu'une philosophie', qui se produit

Nous ne parlons pas du sensualisme ou du matérialisme, doctrine morte que quelques médecins s'efforcent vainement de ranimer.

sous deux formes diverses; sceptique, lorsqu'elle suit rigoureusement la méthode rationnelle, panthéiste, lorsque, lasse du doute, elle affirme ce qu'elle n'a logiquement aucun droit d'affirmer. Fondé sur le moi individuel, ou elle arrête l'homme en lui-même, ou elle le jette sans guide dans un vague infini, le forçant de conclure, au milieu d'une solitude éternelle, qu'il est tout, ou qu'il n'est rien. L'erreur première de ces philosophes comme de ceux qui les ont précédés, est de confondre deux ordres essentiellement distincts, quoiqu'ils existent simultanément, l'ordre de foi, primitif et fondamental, dans lequel seul réside le principe de certitude, et l'ordre de science ou de conception, subordonné au premier par sa nature, et dans lequel s'exerce librement l'activité de l'esprit. Lorsqu'ils réclament la liberté de recherches et d'examen, ils ont donc raison en ce sens, que l'homme ne doit pas se borner à croire, mais encore tâcher de concevoir ou de s'expliquer à lui-même ce qu'il croit sur un motif certain; mais, en rejetant l'ordre de foi, base nécessaire de toute conception, de toute

science, de toute philosophie, ils renversent l'édifice entier des connoissances humaines et se condamnent sans retour à un doute absolu. C'est bien moins en les suivant dans leurs foibles discussions, dans leurs incompréhensibles rêves, qu'il faut combattre le système absurde dont ils se sont prévenus, qu'en y opposant une doctrine claire, solide, complète; et l'immense avantage des catholiques, est de n'avoir besoin, pour cela, que de développer le principe même de leur foi 1.

• Les philosophes dont nous parlons nous accusant de détruire la raison et de placer l'homme entre une foi aveugle et l'athéisme, parce qu'en établissant l'ordre de foi nous avons écarté soigneusement tout ce qui se rapporte à l'ordre de conception, nous croyons utile, pour mettre fin à de semblables accusations, d'exposer sommairement l'ensemble de notre doctrine, que nous n'avons encore développée qu'en partie. Qu'on la combatte, on en a le droit; mais qu'on ne la dénature pas. Ce facile moyen de se ménager un triomphe apparent, est aussi trop peu philosophique. Que ne raisonne-t-on plutôt, puisqu'on se tient si fort de raison? Nous ne demandons que cela, nous pauvre croyant : mais point de discussion possible sans bonne foi. Nous espérons au moins retirer cet avantage du Sommaire auquel nous

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