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une autorité supérieure à la raison de chacun, une autorité divine ayant le droit de commander la foi.

Au lieu de cela, l'on pose dogmatiquement pour base du nouvel état social qu'on veut substituer à l'état social chrétien, l'indépendance universelle de chaque raison, le droit qu'a chaque homme de se faire seul sa religion et sa morale', c'est-à-dire qu'on nie tous les devoirs en niant l'existence d'une morale et d'une religion obligatoires. Effectivement, selon la même doctrine, rien n'étant absolument vrai et absolument faux", rien n'est absolument juste et absolument injuste, et le penchant, l'attrait, l'intérêt devient l'unique règle des actions, comme il l'est aussi des croyances, puisque la vérité n'est qu'une chimère, et qu'il seroit d'ailleurs ab

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« Ces doctrines, qui doivent présider à notre vie << morale, religieuse, politique, littéraire, c'est à nous « à les faire; car nos pères ne nous en ont légué que « de stériles et d'usées.... Il nous faut donc en forger « de nouvelles. » Globe, no 32.

• Ibid., no 56.

surde de se conduire d'après les aperçus d'une raison qui se trompe toutes les fois qu'elle affirme quelque chose absolument. Le monde sera donc livré à des opinions sans nombre et perpétuellement variables. Il y aura autant de morales que de passions diverses, autant de religions que de têtes, et l'on en convient nettement. « Notre siècle << doute, et dans le doute, sa religion c'est la << liberté, parce que c'est le seul dogme qui < permette à chacun de suivre ce qui lui < plaît aujourd'hui, de le rejeter demain. Le << caractère de ce siècle est de ne pas avoir << une religion, mais d'en avoir mille, mais << d'en avoir présque autant qu'il y a de fa<< milles dans chaque nation 1 ».

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Qu'est-ce que cela, sinon l'anéantissement de toute société spirituelle, et l'anarchie la plus profonde qui se puisse même imaginer? En voulez-vous l'aveu formel ? Écoutez:

<< On veut en vain se le dissimuler, la « Révolution, et après elle la Charte qui n'en

'Globe, no 137.

<< est souvent que la traduction légale, ont << complètement changé le principe fonda<< mental de la société. Jusque-là toute << croyance étoit réglée par le sacerdoce; << c'est lui qui faisoit la vérité ou l'erreur 1; << la loi morale même venoit de lui, et il l'imposoit telle qu'il la concevoit à la loi << politique. En vain les dissidents de tous les «< âges avoient tenté l'affranchissement; il a << fallu la philosophie du dix-huitième siècle, << ses longs et patients combats, et enfin la « terrible ruine qui les a suivis. La vérité, << telle que le catholicisme, telle même que << le christianisme l'avoit proclamée, a cessé « d'être la vérité universelle. Travaillées de << tous les doutes en présence de mille re<< ligions diverses, de mille systèmes con

'On ne fait point la vérité, et le sacerdoce n'eut jamais cette absurde prétention. Le prêtre, comme le simple fidèle, croit ce qu'enseigne l'Eglise, dépositaire des révélations divines qu'elle conserve par la tradition. Sont-elles attaquées sur quelque point, elle dit : Voilà ce qu'on a cru toujours; et cela suffit pour convaincre d'erreur l'opinion nouvelle opposée au dogme primitif.

<< tradictoires, cherchant sans tutelle et sans prêtre la solution du grand problème de << Dieu, de la nature et de l'homme, les intelligences se sont proclamées souveraines << chacune de leur côté. Qu'il y ait heur ou << malheur à cette émancipation audacieuse, << qu'il y ait foiblesse ou force dans cette << anarchie des esprits, il n'importe; elle << est aujourd'hui notre premier désir, « notre premier bien, notre vie : et voilà << pourquoi la loi, cette expression variable de << la nécessité, a constaté et consacré l'anar«< chie. Par elle, toute opinion, ce qui est << bien plus général qu'un culte, toute opi«< nion a été déclarée libre et autorisée à se << proclamer. Ainsi sont tombés sous la juri«diction de chacun toutes les révélations << tous les sacerdoces, tous les livres saints. « Si l'État a reconnu des mystères, des < livres et un culte, c'est pour ainsi dire un « choix privé qu'il a fait; il a parlé pour une << collection d'hommes qui aimoient et révé<< roient ce culte, ces livres, ces mystères. Mais << il ne leur a point donné le caractère de la << vérité légale et obligatoire, il ne les a point

« soustraits à la discussion. Sous notre légis« lation, l'Évangile, comme la loi de Moïse, << comme les Védas, comme le Coran, est le << domaine de tous. Divine ou humaine, cette << pensée, dès là qu'elle est écrite ou prêchée, << est mon bien; j'en prends ce que je veux, j'en retranche ce que je veux.... Telle est << notre liberté en religion". >>

Vous l'avez entendu, la vérité, telle que le catholicisme, telle même que le christianisme l'avoit proclamée, a cessé d'étre la vérité universelle; ses croyances ne sont plus le lien des esprits; on rejette son autorité: mais en admet-on quelque autre ? Nullement: Les intelligences se sont proclamées souveraines chacune de leur côté. Ainsi sont tombés sous la juridiction de chacun toutes les révélations, tous les sacerdoces, tous les livres saints: l'Evangile, comme la loi de Moïse, comme les Védas, comme le Coran, est le domaine de tous. Cette pensée, dès là qu'elle est écrite ou préchée, est mon bien; j'en prends ce que je veux,

Globe du 21 novembre 1826.

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