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Cette proposition de révision partielle avait été déposée, sous forme de résolution, par M. Spuller et vingt-quatre de ses collègues, dans la séance du 29 mars 1878 : sous cette forme, elle ne pouvait toucher que la Chambre; elle demeurait étrangère au Sénat.

Une proposition analogue fut déposée, le 27 février 1879, par un député bonapartiste, M. Laroche-Joubert.

La commission, à laquelle ces deux propositions furent renvoyées, pensa, avec raison, que la question devait être résolue, non par voie de résolution, mais par voie de révision. Son rapporteur, M. Méline, déposa un rapport en ce sens dans la séance du 22 mars 1879. Ce rapport, qui concluait à la réunion du Congrès, fut lu, discuté et voté dans cette séance.

Deux jours après, le 24, M. le sénateur Peyrat et plusieurs de ses collègues déposèrent au Sénat le même projet de résolution; cinq jours après, le 29, la commission, par l'organe de son rapporteur, M. Laboulaye, conclut au rejet. Si la discussion avait eu lieu immédiatement, le projet eût, sans doute, été repoussé. Par bonheur, elle fut ajournée; pendant l'ajournement, les esprits se calmèrent; quand la discussion fut reprise, le 14 juin, les opinions s'étaient modifiées; le projet fut adopté par cent quarante-neuf voix contre cent trente.

La discussion, à l'Assemblée nationale, n'occupa qu'une seule séance, celle du 19 juin; aucune autre question, que celle du retour à Paris, n'y fut abordée, ni discutée.

Dans les premiers mois de 1881, le 15 mars, une autre proposition de révision, cette fois générale, fut déposée par MM. Barodet, Louis Blanc, Clémenceau et soixante-douze autres députés.

Ses auteurs demandaient que la Chambre, conformément à

sailles comme lieu de délibération de ces deux Chambres réunies en Assemblée nationale.

l'article 8 de la loi du 25 février 1875, relative à l'organisation des pouvoirs publics, déclarât qu'il y avait lieu de reviser les lois constitutionnelles, et qu'elle proposât, à cet effet, la réunion des deux Chambres à Versailles pour le 15 juin 1881.

Si le dispositif de cette proposition tendait à la révision générale des lois constitutionnelles, les motifs ne mettaient cependant pas en cause tous les articles qui composent ces lois.

Il est vrai que, dans le préambule de la proposition, ses auteurs critiquaient, dans son ensemble, la Constitution de 1875, « œuvre, disaient-ils, d'une Assemblée profondément divisée, nommée dans le trouble de la patrie, sous l'influence de la défaite et de l'invasion', hâtivement, sans discussion, sans mandat précis, qui n'avait été qu'une transaction entre une majorité monarchique et une minorité républicaine également impuissantes à triompher l'une de l'autre ».

Mais cette critique générale n'était que la préface de critiques spéciales.

Ces critiques étaient principalement dirigées contre le Sénat, sinon contre l'institution elle-même, du moins contre le mode d'élection des sénateurs, contre les inamovibles, contre les attributions du Sénat en matière législative, attributions qui ouvraient, disait-on, la porte à des conflits sans solution possible, contre ses droits en matière de dissolution.

A ces critiques s'en ajoutaient d'autres contre la durée de la présidence de la République, contre certaines attributions, qui avaient un caractère monarchique, contre la suppression de la commission de permanence, contre l'absence d'interdiction du cumul des fonctions législatives avec toutes autres fonctions rétribuées ou non rétribuées, contre le silence des lois constitutionnelles en ce qui concerne le pouvoir judiciaire, contre le défaut de garanties destinées à protéger les

' Il est bon d'observer que la Constitution n'a été votée que quatre ans après cette époque néfaste.

droits et les libertés des citoyens, des communes et des départements, enfin entre le mode d'élection des députés, contre la durée de leur mandat, contre leur nombre; on pensait que ces dernières questions devaient être réglées par le pouvoir constituant.

Pour arriver à la révision, M. Barodet et ses collègues concluaient à la réunion du Congrès, avec l'espérance que celui-ci, au lieu de procéder lui-même à cette besogne, comprendrait qu'il devrait l'abandonner à une Assemblée constituante, qui serait nommée par la nation, recueillie cette fois dans la plénitude du calme, de la liberté et de la maturité.

Ils pensaient qu'il ne serait pas impossible d'obtenir ce sacrifice de l'Assemblée nationale, même des sénateurs, qui seraient appelés à en faire partie.

Ils espéraient trouver parmi eux une majorité d'hommes dévoués et «< capables, à l'exemple de Curtius, de se jeter par patriotisme dans le gouffre du suffrage universel, sachant très-bien, d'ailleurs, que ce gouffre moins terrible que celui du forum romain ne se refermerait pas impitoyablement

sur eux ».

Lorsque le rapport déposé par la commission d'iniatitive sur cette proposition, et qui concluait à la prise en considération, vint en discussion dans les séances des 30 et 31 mai 1881, le gouvernement, par l'organe de M. le garde des sceaux Le Royer, fit observer que, la législature étant près de sa fin, il valait mieux laisser à une nouvelle Chambre, retrempée dans le suffrage universel, le soin de reprendre et de résoudre ce problème. Cet avis prévalut; l'ajournement de la discussion fut prononcé.

Les élections pour la nouvelle Chambre eurent lieu au mois d'août suivant. Les électeurs devaient naturellement être consultés sur cette question de révision: ils le furent.

Les résultats de cette consultation sont consignés dans les deux volumes publiés par les soins de la Chambre des députés en exécution de la résolution déposée par M. Barodet dans la séance du 11 novembre 1881, et tendant à la nomination d'une commission chargée d'opérer le dépouillement des professions de foi et des programmes électoraux publiés à l'occasion des élections.

Voici ces résultats :

Les députés à élire étaient, on le sait, au nombre de 557. Parmi les élus, 46 ont demandé d'une façon générale la révision de la Constitution; 33 se sont bornés à la demander sans phrase ni commentaire; 5 ont demandé qu'elle se fasse, ou sur des bases démocratiques', ou dans un sens plus démocratique, ou dans le sens le plus démocratique'; 1 a demandé une révision intégrale et non morcelée'.

Relativement au procédé de révision, 8 out demandé qu'elle se fasse par une Assemblée constituante'; 5 ont demandé que la Constitution nouvelle soit soumise à la ratification du peuple o.

12 représentants de l'opinion bonapartiste ont réclamé l'appel au peuple constituant.

82 candidats ont demandé la suppression du Sénat; l'un d'eux' dit en termes exprès que c'est un rouage inutile; 14 ont entouré leur demande de quelques restrictions ou de quelques réserves; 1o a demandé la suppression du Sénat tel qu'il est actuellement organisé; un autre' a demandé qu'il

1 M. Duvivier.

2 MM. Dieu, Soustres.

3 MM. Allain-Targé, Saint-Romme.

4 M. Camille Pelletan.

5 MM. Bonnet-Duverdier, Cantagrel, Clémenceau, Gambon, Lafont, Lagrange, Laporte, Turigny.

MM. Cantagrel, Clémenceau, Gambon, Lafont, Lagrange.

7 M. Saint-Martin.

8 M. Bertholon.

9 M. Ch. Lefebvre.

soit remplacé par le Conseil d'État avec voix consultative'.

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67 candidats ont demandé d'une façon plus ou moins précise la révision de la loi relative à l'organisation du Sénat; 2 ont réclamé une composition plus démocratique; 73 se sont plaints du mode de recrutement; 1* voudrait un Sénat plus en rapport avec la loi du nombre; 1 3 le voudrait plus en harmonie avec le suffrage universel, 2° ont réclamé une meilleure base pour les élections sénatoriales; 1' a réclamé l'élargissement de la base électorale; 48 ont trouvé la durée du mandat trop longue; 2° ont demandé un changement dans les attributions du Sénat; un autre 1o a réclamé la diminution de ses prérogatives; un autre1 estime que le Sénat ne doit pas être un instrument de conflit; suivant un autre enfin 1a, le Sénat est un obstacle; il faut le tourner ou le supprimer.

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80 candidats ont demandé d'une façon expresse la sup

1 Le principal promoteur de la ligue révisionniste, M. Barodet, a fait insérer la note suivante au bas de sa profession de foi: • Dans deux réunions publiques tenues salle Rivoli, m'appuyant sur l'exemple de la Suisse et des États-Unis, j'ai, ainsi que l'ont constaté plusieurs journaux, · déclaré que j'étais loin de considérer l'existence d'une seconde Chambre comme incompatible avec l'existence d'une République vraiment démocratique et progressive, j'ai dit que je ne voulais pas d'un Sénat constitué monarchiquement pour s'opposer à toute réforme sérieuse, comme celui qui siége au Luxembourg, et que j'en poursuivrais l'abolition; mais que, si on accordait la révision de la constitution par une Assemblée spéciale, nommée directement par le suffrage universel, avec un mandat déterminé, je n'aurais aucune objection à faire à l'établissement d'une seconde Chambre privée des attributions dangereuses du Sénat actuel et plus spécialement chargée de la sauvegarde des institutions de la République.

2 MM. Devic, Viox.

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3 MM. Bernot, Fousset, Ganne, Goblet, Langlois, Legrand (Pierre), Vacher.

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