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haches et les branches de fer qui soutiennent l'impériale 1. » Ce n'est plus Caffieri qui dessinera ses lustres et ses bras d'or moulu : elle aura des candélabres en porce- . laine qui représenteront Apollon et Daphné; « les nus de ces deux figures sont couleur de chair; le milieu du corps de Daphné se couvre d'une écorce de laurier, la tête est verdoyante; et les deux mains, changées en rameaux, supportent deux bobèches dorées 2. »

Sur les panneaux géométriques des salons nouveaux, il règne ce brun très-foncé mélangé de plusieurs couleurs qu'on nomme genre étrusque. Voyez ce cliquetis de tons: au plafond est une rosace en forme de parasol brun rougeâtre; une frise bleu de ciel, sur laquelle des cornes d'abondance blanches; aux côtés de la glace deux pilastres, bordure violette, fond bleu de ciel, feuilles de vigne blanches, formant ornement; grands et petits panneaux brun clair, bordures violettes, ornés de petits parasols verts et de camées à fond bleu, à figures blanches, à ornements brun rouge 3; et dans ce tapage de chocolat où détonnent le rouge et le vert, essayez de vous rappeler les nuances rompues de jadis, les dégradations rose, amarante, lilas gris, vert d'émeraude, vert de mousse, aventurine, citron, paille, soufre; douce gamme qui chantait moelleusement sur les meubles, sur les murs du temps passé! douce gamme que les misérables oublieront pour les étoffes tricolores, pour les papiers peints avec les signes distinctifs de l'égalité et de la liberté de la fabrique répu blicaine de Dugoure, place du Carrousel, au ci-devant hôtel de Longueville. - Puis le goût révolutionnaire ira se fournir à la manufacture de la rue Saint-Nicaise, place de la

1. Journal de la Mode. Août 1790. 2. Id. Janvier 1791.

3. Id. Février 1791.

Réunion, « de tableaux avec l'inscription civique prêts à être placés au-dessus des portes de chaque citoyen et portant ces mots : unitė, indivisibilité de la république, liberté, fraternité ou la mort1. »

Puis au bout de ces barbaries des tapissiers de la république il y aura un petit almanach qui prédira: « Nous avons tant épluché les modes, tant raffiné sur les goûts, tant retourné les meubles et les ajustements, que, rassasiés, épuisés, excédés de jolies choses, nous redemanderons le gothique comme quelque chose de neuf, nous l'adopterons; et nous voilà revenus tout naturellement au XIVe siècle. >>

Avec Charles IX, la discorde est entrée au foyer des acteurs de la Comédie-Française. Au lendemain de Charles IX, dans la maison de Molière, deux partis se déclarent, et les passions politiques amènent l'éclat des rivalités ou des antipathies personnelles. Dans l'assemblée mimique, aussi travaillée de dissensions intestines que la grande assemblée, le côté droit est représenté par Naudet, Dazincourt, Mlles Contat et Raucourt; le côté gauche, par Talma, Dugazon, Mlles Sainval cadette, Desgarcins. Au milieu de tous, le semainier Florence temporise, attend l'occasion pour avoir une opinion, et le temps pour la montrer, ménage Talma et soutient Naudet.

La lutte commence implacable; c'est que ce Charles IX n'est pas le mot de la guerre. Il s'agit bien des tendances révolutionnaires de la pièce de Chénier, et du succès qu'elle a fait à Talma! La querelle entre les acteurs vient d'un motif plus puissant, plus grand, plus important, que

1. Petites Affiches. Août 1793.

d'une blessure à leur sentiment politique, ou même à leur amour-propre; autour de Charles IX, c'est la grande bataille du privilége contre la liberté théâtrale, que donnent les comédiens. Naudet, Miles Contat et Raucourt ne veulent et ne peuvent résigner la dominante suzeraineté du vieux théâtre Saint-Germain, et les priviléges de l'Opéra étant frères des priviléges de la Comédie-Française, ils les défendent avec les leurs, l'Opéra se taisant.

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Les Italiens condamnés à jouer des pièces où l'acteur pouvait s'évanouir, se blesser, mais ne pouvait mourir; le théâtre de Monsieur condamné à ne jouer que des traductions d'opéras italiens; les Variétés condamnées à nc jouer que des pièces de trois actes; Nicolet condamné à conserver les danseurs de corde; les élèves de l'Opéra condamnés à ne jouer que des pantomimes; le théâtre des Beaujolais condamné à des chants mimés par les acteurs sur la scène, et chantés dans la coulisse; les Délassements et les Bluettes condamnés à une gaze entre l'acteur et le spectateur, gaze dont le public vient de faire justice1; un théâtre d'amateurs de la rue Saint-Antoine condamné à n'ouvrir ses portes qu'à sept heures, une heure après l'entrée de tous les spectacles; les petits spectacles des boulevards condamnés à garder à leur porte les tréteaux de la parade, comme des affranchis leurs anneaux d'esclave aux pieds; à ces droits superbes sur les rivaux, ajoutez pour la Comédie-Française la propriété de toutes les pièces des auteurs morts, considérées comme son douaire exclusif2; les priviléges étaient trop beaux, la seigneurie trop riche d'oppression, pour que la Comédie fit sa nuit du 4 août. Que lui importait à ce prix

1. Chronique de Paris. Août 1789. 2. Id. Septembre 1790.

la tyrannie des gentilshommes de la chambre? Que lui faisait le droit du seigneur exercé par eux sur les débutantes, forcées de passer, pour un ordre de début, des bras goutteux du vieux duc de Duras aux bras du joli Desentelle, et des bras du joli Desentelle dans ceux de l'hébété Camérani, quand la petite personne convoitait les Italiens. du charmant semainier Florence, quand elle voulait le Théâtre-Français, du parvenu Morel, quand elle ambitionnait l'Académie de musique1? La comédie n'avait rien à voir dans ces redevances d'usage; et d'ailleurs n'était-ce pas chez les gentilshommes de la chambre qu'elle trouvait secours et appui, quand quelqu'ure de ses gloires prenait ombrage de quelque avenir grandissant trop vite à côté d'elle? De par eux, Brizard n'avait-il pas fait expulser le modeste Aufrène1? De par eux, la Comédie ne laissait-elle pas ignorer à Paris les talents de la province, n'appelant personne à elle, ni Dumège de Toulouse, ni Neuville, ni Luville, ni Montval de Montpellier, ni Ducroissy de Marseille, ni Baptiste, ni Garnier de Rouen, ni Mme Fleury de Lyon, ni Résicourt de Lille, ni Chazel de Nantes? De par eux, la Comédie n'avait-elle pas exilé Mlle Sainval l'aînée, et fait insulter, dans Orosmane, Larive qui s'était retiré1?

L'arbitraire des gentilshommes de la chambre était trop accommodé à ses petites vengeances, pour que la comédic désirât sa ruine. N'était-ce point pertinemment renseignée sur tout leur bon vouloir à son égard, que la maîtresse du comte d'Artois, Mlle Contat, faisait dire par la bouche de Florence à l'admirable Mlle Laveau : « On vient de m'ordonner de ne plus vous laisser jouer de grands rôles, parce que vous

1. Journal de la Cour. Mars 1790. 2. Id.

3. La Lanterne magique, par M. Dorfeuille, acteur tragiquc. 4. Journal de la Cour. Mars 1790.

êtes toujours bien accueillie du public? » N'était-ce point, appuyée sur leur omnipotence, que la même Contat déclarait à Beaumarchais, Mlle Olivier morte, qu'elle ne jouerait plus Suzanne, s'il ne donnait le rôle du page à sa sœur1?

Les succès des patriotes Talma et Dugazon, la perte de 160,000 livres de location de petites loges, depuis la révolution, n'étaient guère faits pour rallier les bénéficiers royalistes de la Comédie. Aussi s'allient-ils avec le ministre Saint-Priest; se liguent-ils avec les gentilshommes de la chambre qui font le travail du partage des parts et signent les retraites, se croyant encore en avril 89. S'ils pensent devoir quelques concessions aux circonstances, à l'Hôtel de ville, au public, s'ils tâchent d'abord de ne se compromettre que prudemment, ils n'en gardent pas moins leurs attaches à leurs droits et à leur répertoire contrerévolutionnaire; et Molé, à la séance publique de l'Hôtel de ville, un jour que les spectacles sont l'objet de la conférence, s'en vient demander, en son nom et en celui de ses camarades, « l'exclusivité des priviléges que Louis XIV a accordés à sa compagnie. » C'était presque une bravade. De toutes parts, les brochures faisaient feu sur le règlement de 1780; de toutes parts, le privilége était attaqué; de toutes parts, tombaient de petits livres, de quatre ou six pages, sur la liberté du théâtre; l'opinion appelant la concurrence; les Discours et motions sur les spectacles demandant qu'après la mort des auteurs la rétribution appartînt aux pauvres et aux hôpitaux; d'autres demandant, à l'instar des théâtres de Drury-Lane et de Covent-Garden, l'établissement d'un second Théâtre-Français; d'autres se récriant sur les relâches qu'occasionnent

1. Journal de la Cour. Mars 1790.
2. Chronique de Paris. Février 1790.

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