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altérations et à des tempêtes; région détachée de l'homme, et qui, par son poids, a sur l'homme la plus grande influence; lieu où se rendent sans cesse les particules échappées de tous les êtres; assemblage des ruines de la nature, ou volatilisée par le feu, ou dissoute par l'action de l'air, ou pompée par le soleil; laboratoire immense, où toutes ces parties isolées et extraites d'un million de corps différents se réunissent de nouveau, fermentent, se composent, produisent de nouvelles formes, et offrent aux yeux ces météores variés qui étonnent le peuple, et que recherche le philosophe. Descartes, après avoir parcouru la terre, s'élève dans cette région (18). Déjà on commençoit dans toute l'Europe à étudier la nature de l'air. Galilée le premier avoit découvert sa pesanteur. Torricelli avoit mesuré la pression de l'atmosphère. On l'avoit trouvée égale à un cylindre d'eau de même base et de trente-deux pieds de hauteur, ou à une colonne de vif-argent de vingt-neuf pouces. Ces expériences n'étonnent point Descartes: elles étoient conformes à ses principes. Il avoit deviné la nature avant qu'on l'eût mesurée. C'est lui qui donne à Pascal l'idée de sa fameuse expérience sur une haute montagne*; expérience qui confirma toutes les autres, parcequ'on vit que la colonne de mer

* Le Puy de Dôme, en Auvergne.

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minuoit en hauteur. Pourquoi Pascal n'a-t-il avoué qu'il devoit cette idée à Descartes? I toient-ils pas tous deux assez grands pour que aveu pût l'honorer?

Les propriétés de l'air, sa fluidité, sa pesante et son ressort le rendent un des agents les p universels de la nature. De son élasticité naiss les vents. Descartes les examine dans leur march Il les voit naître sous l'impression du soleil, raréfie les vapeurs de l'atmosphère; suivre en les tropiques le cours de cet astre, d'orient en o cident; changer de direction à trente degrés de 1 quateur; se charger de particules glacées, en tr versant des montagnes couvertes de neiges; dever secs et brûlants en parcourant la zone torrid obéir, sur les rivages de l'océan, au mouvement flux et du reflux; se combiner par mille caus différentes des lieux, des météores et des saison former partout des courants, ou lents ou rapide plus réguliers sur l'espace immense et libre d mers, plus inégaux sur la terre, où leur directio est continuellement changée par le choc des forêt des villes et des montagnes, qui les brisent et q les réfléchissent. Il pénètre ensuite dans les at liers secrets de la nature; il voit la vapeur équilibre se condenser en nuage; il analyse l'org nisation des neiges et des grêles; il décompose

tonnerre, et assigne l'origine des tempêtes qui bouleversent les mers, ou ensevelissent quelquefois l'Africain et l'Arabe sous des monceaux de sable.

Un spectacle plus riant vient s'offrir. L'équilibre des eaux suspendues dans le nuage s'est rompu, la verdure des campagnes est humectée, la nature rafraîchie se repose en silence, le soleil brille, un arc, paré de couleurs éclatantes, se dessine dans l'air. Descartes en cherche la cause; il la trouve dans l'action du soleil sur les gouttes d'eau qui composent la nue: les rayons partis de cet astre tombent sur la surface de la goutte sphérique, se brisent à leur entrée, se réfléchissent dans l'intérieur, ressortent, se brisent de nouveau, et vont tomber sur l'oeil qui les reçoit. Je ne cherche point à parer Descartes d'une gloire étrangère; je sais qu'avant lui Antonio de Dominis avoit expliqué l'arc-en-ciel par les réfractions de la lumière; mais je sais que ce prélat célèbre avoit mêlé plusieurs erreurs à ces vérités. Descartes expliqua ce phénomène d'une manière plus précise et plus vraie : il découvrit le premier la cause de l'arcen-ciel extérieur; il fit voir qu'il dépendoit de deux réfractions et de deux réflexions combinées. S'il se trompa dans les raisons qu'il donne de l'arrangement des couleurs, c'est que l'esprit humain ne marche que pas à pas vers la vérité; c'est qu'on n'avoit point encore analysé la lumière; c'est qu'on ne sa

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primitifs, que chaque rayon a un degré de réfr gibilité qui lui est propre, et que c'est de la di rence des angles sous lesquels ces rayons se

sent que dépend l'ordre des couleurs. Ces déc vertes étoient réservées à Newton. Mais, quoic Descartes ne connût pas bien la nature de la mière, quoiqu'il la crût une matière homogène globuleuse répandue dans l'espace, et qui, po

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par le soleil, communique en un instant s impression jusqu'à nous; quoique la fameuse o servation de Roemer sur les satellites de Jupit n'eût point encore appris aux hommes que la l mière emploie sept à huit minutes à parcourir 1 trente millions de lieues du soleil à la terre, De cartes n'en explique pas avec moins de précision et les propriétés générales de la lumière, et l lois qu'elle suit dans son mouvement, et son a tion sur l'organe de l'homme. Il représente la vu comme une espèce de toucher, mais un touche d'une nature extraordinaire et plus parfaite, qu ne s'exerce point par le contact immédiat des corp mais qui s'étend jusqu'aux extrémités de l'espace va saisir ce qui est hors de l'empire de tous le autres sens, et unit à l'existence de l'homme l'exis tence des objets les plus éloignés. C'est par moyen de la lumière que s'opère ce prodige. Ell est, pour l'homme éclairé, ce que le bâton est pou

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l'aveugle: par l'un, on voit, pour ainsi dire, avec ses mains; par l'autre, on touche avec ses yeux. Mais, pour que la lumière agisse sur l'oeil, il faut qu'elle traverse des espaces immenses; ces espaces sont semés de corps innombrables, les uns opaques, les autres transparents ou fluides. Descartes. suit la lumière dans sa route, et à travers tous ces chocs : il la voit, dans un milieu uniforme, se mouvoir en ligne droite'; il la voit se réfléchir sur la surface des corps solides, et toujours sous un angle égal à celui d'incidence; il la voit enfin, lorsqu'elle traverse différents milieux, changer son cours, se briser selon différentes lois.

et

La lumière, mue en ligne droite, ou réfléchie, ou brisée, parvient jusqu'à l'organe qui doit la recevoir. Quel est cet organe étonnant, prodige de la nature, où tous les objets acquièrent tour à tour une existence successive; où les espaces, les figures et les mouvements qui m'environnent sont créés; où les astres qui existent à cent millions de lieues deviennent comme partie de moi-même; où, dans un demi-pouce de diamètre, est contenu l'univers ? Quelles lois président à ce mécanisme? quelle harmonie fait concourir au même but tant de parties différentes? Descartes analyse et dessine toutes ces parties, et celles qui ont besoin d'un certain degré de convexité pour procurer la vue, et celles qui se rétrécissent ou s'étendent à proportion du nombre

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