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la situation des royalistes n'a été aussi brillante; et, pour se servir de la formule en usage, la républiqué est en danger. La modération des vainqueurs à l'égard de leurs nombreux prisonniers, les renvoyant sans autre rigueur que de leur couper les cheveux, contraste avec la conduite tenue par les républicains à l'égard des Tendéens qu'ils prennent.

Le docteur Robertson, historien écossais très - célè– 11 juin. bre, principalement par l'Histoire de Charles-Quint, qui forme comme un épisode de notre propre histoire, à une époque aussi intéressante que peu glorieuse pour nous, termine sa carrière.

La ville de Condé se rend aux Autrichiens.

13 juin.

A Saint-Domingue, le Cap est incendié, et tous les 21-24 juin. blancs sont massacrés. Santhonax, Polverel, commissaires envoyés avec des pouvoirs illimités dans cette colonie, en font une vaste scène de désolation. Conformément à leurs instructions, ils appellent les hommes de couleur à la participation soudaine et complète des droits politiques; ils laissent la révolte des nègres se prolonger et se fortifier; ils humilient et persécutent les blancs. Le pouvoir dominateur en France voulant l'immédiate régénération de la population noire, sans ménagement pour la fortune et la sécurité des propriétaires, les commissaires agissent suivant ce système. « Que Saint-Domingue s'écroule, disent-ils, pourvu que la liberté s'élève sur ses décombres!» Les colons, généralement dégradés par l'ignorance, par l'habitude du despotisme, par les vices de l'opulence, avaient eux-mêmes, dès 1790, ouvert les voies de la rébellion; de leurs mains ils

semèrent les premiers troubles, par jalousie de la métropole, et pour s'emparer de la souveraineté (V. 14 avril, 28 mai 1790). Voilà bien des causes de désorganisation!

Aujourd'hui les habitations sont désolées par des partis de nègres qu'ont soulevés les mulâtres. Les troupes envoyées à leur rencontre viennent de remporter des avantages considérables; mais Santhonax les empêche d'être décisifs : les ordres qu'il a reçus à Paris enjoignent d'armer les esclaves, afin d'être en mesure d'envahir la partie espagnole : ceux-ci pourraient donc justifier leurs mouvemens, en disant : « C'est l'as>> semblée nationale qui mit dans nos mains la torche » et le poignard. En brisant nos chaînes, elle nous >> invitait à des violences nécessaires pour assurer >> l'affranchissement dont nos tyrans s'obstinaient à re» tarder l'époque. Ignorans et faibles, nous devions » écouter nos puissans bienfaiteurs. Nous les avons » crus; et, sans pitié ni remords, nous plongeons le >> fer dans le sein de ces maîtres cruels; nous sacca»geons les plantations, nous faisons de la colonie un >> amas de cendres, un désert. Périr, plutôt que de >> reprendre nos durs travaux et d'obéir aux caprices » de nos anciens propriétaires ! »

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En outre, la division est entre les commissaires Santhonax, Polverel et le gouverneur Galbaud, homme tout aussi malfaisant

destitué par eux, et rade du Cap, il feint

retiré sur la flotte mouillée en d'épouser la cause des blancs, dans l'espoir de trouver dans une guerre civile les moyens d'envahir l'autorité supérieure. Flattant les équipages mécontens des commissaires et des mulâtres, il s'empare du commandement supérieur des bâtimens de guerre; et, suivi des troupes que les commissaires ont con

en

finées à bord, il débarque au Cap. Soutenu d'un parti de volontaires de la place, il attaque les mulâtres, est repoussé le second jour, et fuit de nouveau en rade. Pour décider leur triomphe, Santhonax et Polverel ont armé les noirs qui sont dans la ville; ils ont appelé les nègres insurgés qui campent aux environs. Avides de meurtre et de pillage, ceuxci massacrent et brûlent; le sang coule de toutes parts; la ville presque entière, disparaît sous ses ruines et s'ensevelit dans ses cendres; seulement, un petit nombre d'habitans blancs échappe à la mort se réfugiant sur la flotte, composée de deux vaisseaux, trois frégates et quelques petits bâtimens. Le contre - amiral Sercy, reprenant le commandement dont il avait été dépossédé, appareille et recueille sous son escorte plusieurs navires marchands. Il se dirige vers Norfolk en Virginie, où la plus touchante hospitalité attend ces malheureux colons : les habitans s'empressent de leur prodiguer les soins les plus généreux; les souscriptions abondent, plusieurs états de l'union et le gouvernement aussi viendront augmenter leurs ressources, en établissant des contributions spéciales. Transportés en France, ces malheureux n'auraient reçu que d'insignifians secours, et, probablement, les principaux d'entre eux auraient péri sur l'échafaud.

Un décret abolit la loi martiale (V. 24 octobre 23 juin. 1789). Les autorités constituées sont ainsi privées de leur seul moyen de combattre les insurrections populaires.

Le fort de Bellegarde (Pyrénées-Orientales) se 24 juin. rend au général espagnol Ricardos.

24 juin.

La constitution, dite de 93 ou de l'an 1er., rédigée, préparée, discutée en moins de quinze jours, est décrétée et envoyée à l'acceptation des assemblées primaires. Le projet en a été présenté le 10; quelques jours, ou plutôt quelques heures dans treize jours, ont suffi à nos expéditifs législateurs pour l'embrasser dans toutes ses parties, pour l'apprécier, le rectifier, l'adopter.

Elle contient cent vingt-quatre articles précédés de trente-cinq autres, formant la déclaration des droits de l'homme et du citoyen. Ces cent cinquanteneuf articles ou sentences dogmatiques sont le sommaire ou l'extrait d'un grand plan de pure démocratie, présenté par Condorcet au mois de février. Hérault de Séchelles et ses collaborateurs actuels n'y mettent aucun correctif. La doctrine insensée des suffrages universels y est adoptée. Le corps législatif n'a que le droit de proposition et d'exécution provisoire; la décision définitive étant réservée, en matière de législation et de gouvernement, aux assemblées primaires. Un tel système serait à peine applicable dans la plus petite cité, ne possédant, autour d'une enceinte très-exiguë, qu'un territoire resserré, par exemple, à l'état de Saint-Marin, dont la superficie est de deux lieues carrées, et la population de treize mille habitans.

En donnant tout au peuple, Condorcet et les autres érudits ou savans, trop jaloux de modeler leur code sur les institutions de la haute antiquité, se sont bien éloignés de leur esprit, quoiqu'ils prétendent y avoir puisé toutes les idées élémentaires. Aristote dit expressément (Polit. lib. 4): « Un peuple souverain >> a tous les caractères du tyran. Dans une démocratie >> absolue, comme dans la tyrannie, vous retrouvez le >> même arbitraire. Les décrets du peuple sont pareils

>> aux ordonnances du tyran, les courtisans de l'un et » de l'autre ont les mêmes rapports, la même analogie, >> le même ascendant nuisible. »>

Beaucoup d'articles de cette nouvelle constitution sont des axiomes de morale, des maximes philosophi ques d'une extrême concision, et dont l'application est livrée à l'intelligence de chaque citoyen, comme l'application l'est à sa volonté. Les dispositions les plus remarquables sont les suivantes : la république française est une et indivisible. Le peuple français est distribué, pour l'exercice de la souveraineté, en assemblées primaires de canton. Est citoyen, tout natif âgé de vingt-un ans; tout étranger, âgé aussi de vingtun ans, domicilié depuis une année, vivant de son travail, ou possédant une propriété, ou ayant épousé une Française, ou ayant adopté un enfant, ou nourrissant un vieillard. Le peuple souverain est l'universalité des citoyens. Il nomme immédiatement ses députés; il délégue à des électeurs le choix des administrateurs, des juges; il délibère sur les lois. La population est la seule base de la représentation nationale. Il y a un député, à raison de quarante mille individus. La nomination se fait à la majorité absolue des suffrages. Le peuple s'assemble tous les ans le 1er. mai, pour les élections. Le corps législatif est un, indivisible et permanent. Sa session est d'un an. Il se réunit le 1er. juillet. Le corps législatif propose des lois, et rend des décrets. Les projets de loi sont envoyés à toutes les communes. Si, dans la moitié des départemens plus un, le dixième des assemblées primaires de chacun n'a pas réclamé, le projet est accepté et devient loi. Il y a un conseil exécutif composé de vingt-quatre membres. L'assemblée électorale de chaque département nomme un candidat, le corps légis

TOME IV.

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« PrethodnaNastavi »