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Une loi relative aux troubles de Lyon, est ainsi juillet. conçue: «< Sont destitués et déclarés traîtres à la pa>>trie tous fonctionnaires de cette ville coupable.... >> Tous les biens des conspirateurs seront séquestrés ; » et aussitôt que la confiscation voulue par la loi >> sera prononcée par le tribunal révolutionnaire, la répartition en sera faite entre les patriotes indigens » et opprimés. Tous paiemens des sommes dues à la » ville ou aux habitans demeurent provisoirement >> suspendus. » Ce décret, qui suscite les prolétaires contre les propriétaires, est la principale cause de l'insurrection de Lyon. Promettre à l'indigent les dépouilles du riche, affranchir le débiteur de ses engagemens, n'est-ce pas déchaîner les passions de la populace, et, justifier d'avance tous ses excès? Les Lyonnais, poussés au désespoir, recourront aux extrêmes moyens d'une défense dont la cause alors semble tout légitimer (V. 9 octobre).

Marat est poignardé par Charlotte Corday d'Ar- 13 juillet. mans, jeune personne néé à Saint-Saturnin des Li

gnerets, près de Séez (Orne).

Cet exécrable conventionnel était de Baudry, village de la principauté de Neufchâtel. Attaché comme médecin aux gardes d'Artois, il avait attiré quelque attention en publiant un système d'optique qui n'admettait que trois couleurs primitives. Charlotte Corday a conçu le généreux dessein de sauver son pays en abattant la tête la plus affreuse de l'hydre qui le dévoré mais Marat ne compte parmi les chefs d'aucun parti; les principaux factieux le méprisent car sa démagogie, qui repousse tout calcul de conduite, est une démence sans intervalle. C'est de la boue détrempée dans du sang. Féroce par instinct, et tel que

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ces chiens employés par les colons anglais à la chasse des nègres, Marat, làehé sur sa proie, s'y attache avec fureur et la livre ensanglantée pour qu'on l'achève. Déclamateur effréné, tribun de la populace, il n'est déjà plus, pour les grands moteurs du jacobinisme, qu'un instrument usé; et la fin de ce misérable ne suspend ni n'affaiblit aucun des plans qu'émit leur féconde perversité. « Le coup bien porté est mal » adressé, » dit un proscrit.

Mais cet acte de Corday que les anciens eussent divinisé, n'excitera point les Français à opposer quelque résistance à leurs sanguinaires oppresseurs : toujours engourdis par la peur, ils resteront incapables du moindre effort. Il n'est personne qui ne sût recevoir le coup mortel, et personne qui ose le prévenir par une détermination individuelle ou par une agression combinée! Aussi, pour un seul mons tre de moins, la France ne verra point s'amortir ses désastres. Des milliers d'hommes déploient à F'envi les prodiges de la valeur militaire une jeune fille a seule montré la résolution d'immoler à la patrie un de ses plus barbares oppresseurs! Ah! si, dans cette vaste France, vingt admirateurs de cette jeune Française eussent ramassé son arme, et, rentrant dans les droits de la nature outragée, frappé vingt de ces furieux qui se plaçaient hors de toute société en détruisant tout ordre social, sans doute la horde sacrilége eût à son tour été glacée d'effroi. Les victimes, mieux inspirées, eussent senti que courage n'est pas seulement la résignation; alors les prisons et les échafauds s'écroulaient sur les bourreaux, et le sang cessait d'inonder le sol. Mais la plus entière résignation est le sentiment universel. « On ne conçoit pas à Paris (écrit Charlotte Corday

le

» elle-même) comment une femme inutile, dont la >> plus longue vie ne serait bonne à rien, peut se >> sacrifier de sang-froid pour sauver son pays. » Ce trait d'un courage actif et d'un dévouement médité si à froid est, dans l'immensité de notre révolution, ce qu'est au voyageur désespéré une trace de pied d'homme sur le sable du désert. On peut observer que cette fille étonnante vit le jour sous le même ciel que des hommes célèbres par la hauteur de leur génie et la vigueur de leur caractère le Poussin, Corneille, Tourville, Duquêne. Sous tous les rapports, Marat présentait une espèce de monstre; ses formes extérieures étaient des plus hideuses; ses traits repoussaient les yeux les plus familiarisés avec la laideur; il n'avait pas cinq pieds de haut : les inclinations les plus bassement ignobles, les habitudes les plus crapuleuses, l'astuce d'un vil intrigant, l'exaltation d'un frénétique, et l'âme d'un scélérat consommé voilà son moral. Ceux qui ont lu sa feuille sanguinaire intitulée l'Ami du peuple, savent qu'il n'empruntait quelque chaleur que des idées atroces qu'il y répandait en disant tantôt « qu'il fallait >> abattre deux cent mille têtes; » tantôt « qu'il fallait un dictateur implacable. » Il fut le plus ardent provocateur de ces boucheries d'hommes, ouvertes dans nos grandes villes. Marat sera déifié ; ses restes seront portés triomphalement au Panthéon; tous les arts s'empréзseront de concourir à la cérémonie de son apothéose; le peintre David, qui se distingue autant par l'exaltation de son jacobinisme que par la hauteur de son talent, y prostituera son pinceau; jusqu'à Cubière, dit Dorat, dit aussi Palméseaux, secrétairegreffier adjoint de la commune de Paris, qui publiera un poëme à la louange du monstre. Le club des corde

liers donne le signal des honneurs à son patron! Le plus beau vase de porphyre du garde-meuble ne paraîtra pas trop précieux pour recevoir son cœur qu'on dépose sur une espèce de reposoir dressé dans le jardin du Luxembourg; là, un orateur lira en l'honneur du nouveau saint un discours ayant pour épigraphe : O cor Jesus! ó cor Marat! cœur sacré de Jésus ! coeur sacré de Marat! vous avez les mêmes drcits à nos hommages. Les travaux du fils de Marie y sont comparés à ceux de l'Ami du peuple, les apôtres aux jacobins et aux cordeliers, les pharisiens aux aristocrates, les publicains aux boutiquiers, etc. L'orateur dit en concluant Jésus est un prophète, Marat est un dieu. Un pareil sermon, qui ne saurait inspirer qu'un extrême dégoût, conduit néanmoins l'observateur à des réflexions: il y voit l'intention avouée de faire du maratisme une religion qu'il faudra professer sous peine de mort. Cette religion, livrée aux interprétations de ses grands-pontifes, Robespierre, Saint-Just, etc., sera la seule suivie pendant une année entière; et certes, la France et l'Europe entière ont eu à la craindre, autant que l'Allemagne. craignit aux quinzième et seizième siècles celle de Mahomet. Afin que la fortune passe du riche au pauvre voilà l'épigraphe du journal de l'Ami du peuple, que Marat a publié depuis 1789 jusqu'à son dernier jour. Il n'y a pas eu un crime commis en France, dont l'idée n'eût été suggérée par cette méchante feuille. Par bonheur tous ceux qu'elle a conseillés n'ont pas été mis à exécution. Tous les lieux publics seront souillés par la hideuse effigie de celui qui répétait sans cesse : « Il faut abattre deux cent mille têtes; » et désormais ce dieu de sang présidera à d'innombrables sacrifices humains. Ce ne sera que

dans deux ans (V. 8 février 1795) que le tableau où David a peint son ami mourant, sera retiré de la salle de la convention; que ses restes, grangrenés de pourriture, seront retirés du Panthéon et jetés dans l'égout Montmartre, et qu'il sera permis de vouer, tout haut, sa mémoire à l'exécration des Français.

Le combat de Martigné-Briand (près du Pont-de-Cé) 15 juillet. est livré. Les royalistes, conduits par Lescure, Bonchamp, La Rochejaquelein, après avoir défait une brigade républicaine, commandée par l'inepte général Danican, éprouvent une perte considérable et sont dispersés.

Viennent ensuite les combats de Villiers et de Coron 17-18 juill. (sept lieues de Saumur). Les républicains, commandés par Menou et Santerre, honteusement défaits, laissent sur le champ de bataille deux mille morts, trois mille prisonniers, dix canons, tous les caissons et tous les bagages. La perte des royalistes, que dirigent Lescure, Bonchamp, La Rochejaquelein, est presque nulle. Cependant leur victoire n'aura point de résultats militaires de quelque importance, parce qu'en même temps ils ont éprouvé de grands échecs devant les Sablesd'Olonne et Luçon. Satisfaits d'avoir éloigné leurs ennemis au temps des moissons, ils se renfonceront dans la Vendée sans s'assurer d'aucun poste sur la Loire.

Charlotte Corday (V. le 13) est exécutée. Sachant 17 juillet. le sort qui lui était réservé, elle se prépare à la mort avec un courage simple et modeste, sans faste et sans apprêt, comme une personne qui pense avoir assez vécu, puisqu'elle vient de rendre à sa patrie un service éminent. Sa procédure a développé l'énergie et mon

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