Slike stranica
PDF
ePub

CHAPITRE II.

En combien d'époques générales peut-on diviser l'histoire de la philosophie?

Il n'y a pas seulement des systèmes ; il y a aussi des écoles qui résultent de l'accord de plusieurs systèmes en quelques points fondamentaux, malgré leurs diversités de détails. Ces écoles, à leur tour, se lient entre elles par des rapports chronologiques et constituent ainsi des époques. Si donc il nous était possible de savoir, dès le début, quelles sont ces époques et en quel nombre, notre étude se trouverait par là singulièrement simplifiée. Or, ceci est facile à connaître.

En effet, puisque la philosophie n'est autre chose que la pensée humaine élevée à sa dernière expression, à sa plus haute puissance, il suit que ses progrès doivent parfaitement concorder avec la marche générale de la civilisation. Par conséquent, autant il y a d'époques principales dans l'histoire de la civilisation, autant il aura pour l'histoire de la philosophie en particulier. Or, il y a quatre grandes époques dans l'histoire générale de la civilisation: Orient,

y en

Grèce et Rome, moyen-âge, âge moderne. De-là encore, et pour les raisons alléguées, les mêmes époques, et dans le même nombre et dans le même ordre, pour l'histoire de la philosophie. Toutefois, observons ici que les documents sur lesquels devrait être basée l'étude de l'histoire de la philosophie orientale ne sont ni assez nombreux, ni assez parfaitement compris, pour que l'on puisse tenter avec succès cette étude. Un certain nombre de ces documents, recueillis des livres des antiques Hindous, par Colebrooke, et traduits par lui en anglais, ont passé, il est vrai, dans la langue française, grâce aux soins et au travail de M. Pauthier; mais ces documents sont encore bien insuffisants. Il faudrait une portée d'esprit plus qu'humaine pour induire de ce qu'on possède ce qui manque, et surtout pour deviner le véritable sens philosophique à travers l'expression souvent allégorique et symbolique des documents orientaux. Restent donc pour l'histoire de la philosophie, telle que nous nous proposons de l'étudier, trois époques principales: 1° la Grèce et Rome, qui se confondent, attendu que Rome n'eut pas une philosophie originale, mais toute d'emprunt; 2o le moyen-âge; 3° l'âge moderne.

Auteurs à consulter: Tennemann, Manuel de la philosophie, Introduction particulière. — V. Cousin, Cours d'histoire de la phi

[ocr errors]

losophie, année 1828, deuxième leçon. Id., année 1828-1829, Id., ibid., leç. 12. Essai sur la philosophie des

leg. 5 et 6.

Hindous, par M. Pauthier.

[ocr errors]

CHAPITRE III.

Faire connaître les principales écoles de la philosophie grecque depuis Thalès jusqu'à Socrate.

I. L'histoire n'est autre chose que le tableau du développement de l'esprit humain dans chacune de ses sphères d'activité. Par conséquent, on peut établir à priori que les éléments philosophiques qui apparaissent dans la conscience font aussi dans le même nombre et le même ordre leur apparition dans l'histoire et à chacune des grandes époques de l'histoire, sauf à vérifier ensuite historiquement ce qui aura été constaté d'abord psychologiquement.

:

Eh bien! l'application de la méthode spéculative, dont nous avons déjà proclamé la nécessité, nous révèle dans l'esprit humain l'existence de quatre éléments philosophiques élément sensualiste, élément idéaliste, élément sceptique, élément mystique. D'où quatre systèmes fondamentaux dont l'esprit humain est susceptible sensualisme, idéalisme, scepticisme,

mysticisme, qui doivent nécessairement apparaître et se succéder dans l'ordre que nous indi

quons.

Essayons, en effet, d'intervertir cet ordre ; on ne saurait raisonnablement y parvenir. D'abord, il est évident que l'esprit humain ne peut débuter par le mysticisme. Car le mysticisme, en tant que système philosophique, est un acte de désespoir de la raison, qui, renonçant à chercher la vérité par ses seules forces, la demande directement à Dieu; or, il implique que l'esprit humain débute par le désespoir; on ne désespère qu'après avoir tenté, et tenté infructueusement. Le mysticisme est donc condamné à venir en dernier lieu. Le scepticisme ne peut pas non plus apparaître au début; effectivement, douter, c'est nier; or, peut-on concevoir que l'esprit humain débute par la négation? Pour nier, ne faut-il pas avoir affirmé? Le scepticisme ne

saurait donc venir avant le sensualisme et l'idéalisme. Reste à savoir lequel des deux doit apparaître avant l'autre. Qu'est-ce que le sensualisme? C'est un système dans lequel les idées sensibles occupent le premier plan et sont la raison de toutes choses. Or, d'où viennent les idées sensibles? Evidemment de la sensation. Et qu'estce que la sensation, sinon le fruit du commerce entre l'homme et la nature extérieure par l'inter

médiaire des organes? Or, c'est vers le monde extérieur que l'esprit humain se porte d'abord le plus aisément et le plus volontiers; il est donc naturel que parmi ses phénomènes intimes, ceux-là appellent et préoccupent davantage son attention, qui sont le résultat de cette communication avec les objets matériels, et ces phénomènes, nous l'avons dit, sont précisément les idées sensibles. Telle est la raison qui assigne au sensualisme la priorité chronologique sur l'idéalisme. Ainsi, sensualisme, idéalisme, scepticisme, mysticisme, tel est l'ordre dans lequel le raisonnement nous démontre que ces quatre systèmes doivent apparaître dans l'esprit humain; et tel est cet ordre dans l'esprit humain, tel il doit être aussi dans l'histoire.

II. Si maintenant nous demandons à la méthode 'expérimentale la vérification des résultats fournis par la méthode spéculative, nous pourrons nous convaincre que les trois grandes époques de la philosophie, l'époque grecqueromaine, l'époque du moyen-âge, l'époque moderne, ont vu ces systèmes se succéder les uns aux autres dans l'ordre qui vient d'être établi. Commençons cette vérification par l'étude de l'époque grecque.

III. Cette époque embrasse un espace d'envi

« PrethodnaNastavi »