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traducteurs; j'ai cru devoir marcher sur les traces de ces grands modèles.

Le nombre des éditeurs s'étant multiplié dans les deux derniers siècles, j'ai pensé que l'Histoire littéraire devait recueillir leurs noms, d'autant plus que l'on doit à beaucoup d'entre eux des renseignemens curieux sur les auteurs qu'ils ont mis au jour. Souvent aussi ils ont ajouté au mérite de l'ouvrage qu'ils avaient entrepris de publier; tel est le service rendu pár l'abbé de Rothelin, ou plutôt par le Beau, à l'Anti-Lucrèce du cardinal de Polignac.

Le nom d'un auteur, et les recommandations de ses amis, contribuent souvent, au moins pour le moment, au succès d'un ouvrage. L'expérience prouve cependant, surtout depuis que l'impression a multiplié à l'infini le nombre des livres, que de bons ouvrages, décorés du nom de leurs auteurs, tombent dans l'oubli. Un ouvrage anonyme est bien plus exposé à cette fatale destinée; s'il obtient du succès, il le doit à un mérite bien réel : c'est, dit ingénieusement M. De la Lande, l'odeur de la violette qui s'élève du sein de l'herbe 1.

On ne peut nier que de bons écrivains n'aient dédaigné de mettre leur nom aux fruits de leurs veilles, et des savans distingués, que nous avons encore le bonheur de posséder, ont fait paraître presque tous leurs ouvrages sous le voile de l'anonyme; aussi, il me serait facile de prouver que dans toute bibliothèque composée d'ouvrages utiles, il en existe un tiers sans indication d'auteurs, traducteurs ou éditeurs. Les connaissances que l'on peut avoir d'ailleurs en bibliographie restent toujours imparfaites, si l'on ne cherche pas à dévoiler ces anonymes. Il suit de là, qu'un ouvrage où ces noms seraient révélés avec justesse, pourrait devenir d'un usage aussi habituel que les Dictionnaires historiques; malheureusement l'on a négligé ce genre de recherches pendant le dernier siècle.

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Voyez le Magasin encyclopédique, journal rédigé par M. Millin, membre de l'Institut, etc., première année, t. 5, p. 141.

SII. Causes et inconvéniens de la négligence mise, pendant le dernier siècle, dans la découverte des anonymes et pseudo

nymes.

J'attribue cette négligence à ces mêmes ouvrages qui, vers le milieu du dernier siècle, ont mis les connaissances bibliographiques à la portée de tout le monde ; je veux parler des catalogues de livres, rédigés par le célèbre libraire Martin, et surtout de la Bibliographie instructive par de Bure le jeune, ouvrage qui, malgré ses défauts, est encore consulté avec fruit.

Martin a fait connaître, en général avec beaucoup d'exactitude, le nom des auteurs qui ont publié des ouvrages anonymes; mais les tables qui suivent ses catalogues, ne contiennent aucune indication relativement aux ouvrages anonymes dont les auteurs ne lui étaient pas connus; ce qui est une imperfection réelle, puisque l'on peut avoir à chercher un ouvrage anonyme, comme celui d'un auteur connu. Quant à de Bure le jeune, non- seulement il a omis les ouvrages anonymes dans la table volumineuse qui termine sa Bibliographie, mais il a mis peu de soin, dans le corps de son ouvrage, à faire connaître les auteurs anonymes dont les productions lui ont paru dignes d'être citées. Le même libraire a publié, dans le même état d'imperfection, son Supplément à la Bibliographie instructive, ou le Catalogue des livres du cabinet de Gaignat, Paris, 1769, 2 vol. in-8°. Ce n'est qu'au bout de quinze ans que ces omissions et ces négligences ont été réparées par M. Née de la Rochelle, dans la Table destinée à la recherche des livres anonymes qui ont été annoncés dans la Bibliographie instructive et dans le Catalogue de M. Gaignat. Paris, 1782, in-8°. Ce volume, qui forme le dixième de la Bibliographie instructive, m'a été utile dans la composition de ce Dictionnaire. J'indique plusieurs anonymes qui ont échappé aux recherches de l'auteur, et quelques erreurs dans lesquelles il est tombé.

Je dois dire ici que, dès 1753, Jacques Barrois, père des libraires de ce nom, avait fait sentir, dans la table du Catalogue des livres de Giraud de Moucy, combien était utile l'indication des ouvrages anonymes. Il a rédigé dans les mêmes principes, en 1763, la table de son excellent Catalogue de la bibliothèque du médecin Falconet. Ce savant libraire a donc mis ses confrères dans la bonne voie. Aussi, dès 1766 M. Musier indiqua-t-il avec exactitude, les ouvrages anonymes, dans la table du Catalogue de Sénicourt. Depuis cette époque à peu près, M. de Bure l'aîné s'est conformé à cet usage, à cette différence près, qu'il a fait une table particulière pour les ouvrages anonymes.

Envisageons maintenant les inconvéniens qui résultent de la négligence dont j'ai tâché d'assigner la cause.

Dans le temps où la littérature était cultivée avec soin dans toutes ses parties, les meilleurs écrivains ne dédaignaient pas d'indiquer les auteurs anonymes; le Traité des Études de Rollin, m'en a fait connaître plusieurs, entre autres J. Heuzet, auteur de l'excellent ouvrage intitulé: Selecta è profanis scriptoribus historiæ 1. A mesure que les études ont dégénéré, l'ignorance de l'Histoire littéraire s'est fait remarquer dans les ouvrages même où cette connaissance est le plus nécessaire. C'est ainsi que, dans son Examen des Observations sur la Littérature, etc., 1779, in-8°, l'abbé Lenoir-Duparc, ex-jésuite, et dernier professeur de rhétorique de cette société, au collége de Louis-le-Grand, conseille la lecture de sept ou huit

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Bayle a consacré le soixante-septième chapitre de son ouvrage intitulé : Réponse aux Questions d'un provincial, à la découverte des auteurs anonymes et pseudonymes dont la connaissance avait échappé à Placcius. On lui doit aussi une lettre supplémentaire à l'opuscule de Decker, De scriptis adespotis. Il a dévoilé beaucoup d'écrivains anonymes dans ses Nouvelles de la République des lettres et dans sa correspondance particulière.

Charles-Étienne Jordan, dans son Histoire d'un voyage littéraire fait en 1733, la Haye, 1735, petit in -8, fait connaître environ trente écrivains anonymes ou pseudonymes. (N. N.)

ouvrages anonymes sur l'Art militaire, sans en nommer les auteurs qu'il lui eût été facile de connaître en ouvrant la France Littéraire.

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Les ouvrages du célèbre la Harpe ne sont pas exempts de ce défaut. Il a non-seulement omis le nom des auteurs anonymes, mais il a attribué plusieurs ouvrages à des écrivains qui n'en sont pas les auteurs. C'est ce que je crois avoir prouvé par mon Examen de plusieurs assertions hasardées par ce littérateur dans la dernière partie de son Cours de Littérature, qu'il appelle Philosophie du dix-huitième siècle. Voyez le Magasin Encyclopédique, mai 1805, et surtout mon Nouveau Supplément au Cours de Littérature de la Harpe, Paris (Barrois l'aîné), 1818, in-8°. Un article de cé Dictionnaire contient la réfutation d'une nouvelle erreur qui avait échappé à mes premières recherches.

La Correspondance littéraire du même auteur, renferme plusieurs fautes graves de la même espèce. Dans une courte notice sur l'abbé de la Porte (V. le t. 3, p. 45), la Harpe présente ce fécond écrivain comme auteur de l'Esprit de Marivaux, et de celui de Fontenelle. L'abbé de la Porte n'a publié ni l'un ni l'autre de ces deux ouvrages : le premier est de Lesbros, de Marseille; le second de Prémontval, de l'académie de Berlin.

Le 22 brumaire an 10 (13 novembre 1801), M. Buache a lu, à l'institut national, d'excellentes observations sur l'Anonyme de Ravenne, dont la géographie a été publiée en 1688, in-8°, par le P. Porcheron, bénédictin. Mais depuis plus de 60 ans, cette géographie ne peut plus être considérée comme anonyme. Une dissertation que Muratori a insérée dans le tome dixième de ses Historiens d'Italie, et qui a pour auteur le P. Beretta, bénédictin, tend à prouver que l'anonyme de Ravenne était un prêtre de ce lieu, nommé Guido, qui vivait dans le neuvième siècle, et non pas dans le septième, comme le prétend le P. Porcheron. Les conjectures de Beretta ont passé pour des preuves sans réplique aux yeux

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1 Voyez dans cette nouvelle édition, l'ouvrage commençant par ces mots : Relation de l'île de Borneo.... (N. N.)

de J. Albert Fabricius, qui donne un article à Guido, dans sa Bibliothèque latine du moyen âge, et à ceux du savant père Audiffredi, qui, dans l'excellent catalogue de la Bibliothèque Casanate 1, indique sous le nom de Guido, la Géographie anonyme publiée par

le P. Porcheron.

Les auteurs de la Statistique générale et particulière de la France, Paris, Buisson, an 12 (1804), 7 vol, in-8°, attribuent à Anquetil, auteur de l'Esprit de la ligue, l'ouvrage intitulé Esprit de la Fronde, qui est de Mailly, professeur à Dijon. Les mêmes écrivains disent que M. de Sainte-Croix a publié des Dissertations latines. Ils se trompent; à moins qu'ils n'entendent parler des notes que ce savant a fournies à Oberlin, pour l'édition de Vibius Sequester, Strasbourg, 1778, in-8°.

J'attribue aussi à la négligence que l'on met trop généralement à découvrir les auteurs qui se cachent, la méprise que j'ai remarquée dans la Table analytique et raisonnée des matières contenues dans les soixante-dix volumes des OEuvres de Voltaire (édition in-8°., dite de Beaumarchais), par M. Chantreau. Le mot portatif est indiqué dans cette table comme le titre d'un libelle de l'abbé Destrées. A l'endroit où M. Chantreau renvoie, Voltaire s'exprime ainsi : « Un abbé Destrées, jadis confrère de Fréron, a donné un PORTATIF au procureur général »; ce qui signifie que l'abbé Destrées a remis ou dénoncé au procureur général le Dictionnaire philosophique-portatif de Voltaire, M. Chantreau pouvait aisément s'assurer que l'abbé Destrées n'avait fait aucun ouvrage sur le frontispice. duquel se trouvât le mot PORTATIF.

SIII. Principaux ouvrages sur les anonymes et pseudonymes.

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Jusqu'à ce jour, les étrangers ont mieux senti que nous la né

Bibliothéque léguée par le cardinal Casanate, ancien bibliothécaire du Vatican, au couvent de la Minerve des Dominicains à Rome.

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