DICTIONNAIRE HISTORIQUE, O U HISTOIRE ABRÉGÉE de tous les Hommes qui se sont AVEC des Tables chronologiques, pour réduire en corps d'histoire Par L. M. CHAUDON et F. A. DELANDINE. Mihi Galba, Otho, Vitellius, nec beneficio, nec injuriâ cogniti. TACIT. Hist. lib. I. § 1. TOME DIXIÈME. A LYON, An XII-1804.1 DICTIONNAIRE HISTORIQUE. P PIGALLE, (Jean-Baptiste) sans sculpteur du roi, chevalier de l'ordre de Saint-Michel, chancelier de l'académie de Peinture, naquit à Paris en 1714, d'un menuisier, et y inourut le 20, août 1785, à 71 ans. Il ne montra d'abord aucune disposition pour le dessin. Il aimoit à modeler, mais il n'avoit ni adresse, ni facilité, et ne pouvoit rien finir un travail opiniâtre. Le voyage d'Italie que la générosité de Coustou l'ainé lui fournit le moyen d'entreprendre, donna au jeune artiste la facilité qui lui manquoit. Il étudia les ouvrages des grands maîtres et fut bientot leur rival. De retour en France, il s'illustra par un grand nombre de morceaux admirables. Les plus connus sont: I. Un Mercure qu'il fit à Lyon, où il s'arrêta en revenant de Rome. S'étant rendu à Paris quelque temps après, il 'empressa de le présenter à le Moyne son ancien maître, qui lui dit Je voudrois l'avoir fait. II. Une Vénus dont Louis XV fit présent au roi de Prusse, en y joignant son Mercure que le roi Tome X. lui avoit fait exécuter en grand. Ces deux statues dont la première est un chef-d'œuvre digne des beaux jours d'Athènes, furent accueillies à Berlin avee transport. Pigalle qui s'y rendit quelque temps après, fut annoncé au roi de Prusse comme l'auteur du Mercure de France. Le monarque crut que c'étoit un journaliste; et Pigalle ne fut point admis à l'audience de Fréderic. Piqué de cette indifférence, il partit pour Dresde après avoir fait un tour à Potsdam, où ces deux statues étoient placées. En voyant la première, il dit: Je serois très-faché si je n'avois pas mieux fait depuis. Enfin Fréderic instruit de sa méprise, fit rechercher le sculpteur avec le plus grand soin, mais il avoit déjà disparu. Pigalle regretta toujours depuis de n'avoir pu modeler la figure de Frederic le Grand. Il disoit : Les deux plus belles tétes que j'aie jamais vues dans ma vie, sont celles de Louis XV et de Fréderic, la première pour la noblesse des formes; la seconde, pour la finesse spirituelle de la A physionomic. Il étoit indigné des portraits presque tous infidelles du roi de Prusse : Ces gens-là, disoit-il, lui ont donné l'air d'un coupe-jarret. II. Le Tombeau du maréchal de Saxe, remarquable par les beautés du plan et de l'exécution, et dont l'ensemble fait disparoître les petits défauts. III. La Statue pédestre de Louis XV, exécutée en bronze pour la ville de Rheims. La figure de l'homme assis sur des ballots de marchandises, est digne de Puget. Elle a la beauté du caractère et le fini des détails. IV. La Statue de Voltaire. La tête est pleine d'enthousiasme, et l'attitude de noblesse, de mouvement, d'expression; mais l'artiste, trop attaché à l'idée de le représenter entièrement nu, a fait du corps une espèce de squelette, peu agréable au commun des spectateurs. V.Un petit Enfant qui tient en main une cage, modèle de vérité, de naïveté et de graces. VI. Une jeune Fille qui se lire une épine du pied: c'est son dernier ouvrage, et l'on y voit l'homme qui sait observer la belle nature et la renare avec finesse. VII. Les Bustes de plusieurs gens de lettres, ses amis; car il en avoit, et il les méritoit par sa simplicité, sa douceur, sa bonté. Elève de le Moyne et de Coustou fils, il ne parloit jamais de ses maîtres qu'avec une espèce d'enthousiasme. M. le Moyne, disoit-il, a fait de moi un sculpteur, mais M. Coustou a fait Pigalle. Il ne voyoit jamais un malheureux sans en être attendri. Il a souvent vidé sa bourse pour secourir les infortunés. En passant à Lyon, il apperçut dans une de ses promenades un homme dont les yeux étoient noyés de larmes. C'étoit un pauvre père de famille qui alloit être mis en prison parce qu'il devoit dix louis. Pigalle n'en avoit que douze, et il n'en paya pas moins la somme due par ce pauvre homme. Il avoit épousé dans un âge assez avancé, une de ses nièces, de laquelle il n'avoit point eu d'en— fans; et c'est grand dommage, st les talens sont héréditaires; car quoique Pigalle ne puisse point être placé au premier rang deś hommes de génie dans son art, il a beaucoup approché d'eux par la pureté et la sagesse de son goût. PIGANIOL DE LA FORCE 9 (Jean Aymar de) né en Auvergne d'une famille noble, s'appliqua avec ardeur à la géographie et à l'histoire de France. Pour se perfectionner dans cette étude, il fit plusieurs voyages en différentes provinces. Il rapporta de ses courses des observations importantes sur l'histoire naturelle, sur le commerce et sur le gouvernement civil et ecclésiastique de chaque province. Elles lui servirent beaucoup pour composer les ouvrages que nous avons de lui. Les principaux sont : I. Une Description historique et géographique de la France, dont la plus ample édition est de 1753, en 15 vol. in-12. C'est le meilleur des ouvrages qui aient paru jusqu'ici sur cette matière, quoiqu'il renferme encore un grand nombre d'inexactitudes et même de bévues. II. Description de Paris, en 10 vol. in-12: ouvrage instructif, curieux, intéressant, et beaucoup plus parfait que la Description de Germain Brice. Il est d'ailleurs écrit avec une élégante simplicité. Il en donna un ' Abrégé en 2 vol. in-12. III. Des eription du Chateau et Parc de Versailles, de Marly, etc, en 2 vol. in 12. Elle est agréable et assez bien faite. IV. Voyage de France, 2 vol. in-12. Piganiol a aussi travaillé avec l'abbé Nadal au Journal de Trévoux. Il mourut à Paris en février 1753, à 80 ans. Ce savant étoit aussi recommandable par ses mœurs que par ses talens. Il joignoft à un savoir profond et varié, une grande probité, beaucoup d'honneur et toute la politesse d'un courtisan. PIGET, (Simon) libraire et imprimeur de Paris, avoit étendu son commerce dans toute l'Europe, au milieu du 17° siècle. Il étoit versé dans la connoissance des langues savantes. Ses éditions sont recherchées. On distingue parmi celles-ci les œuvres d'Amphyloque, 1644, in-fol., et un Rituel grec par Gourd, in-folio. Ce dernier ouvrage est très-rare. I. PIGHIUS, (Albert) né à Kempen, petite ville de l'OverIssel, vers l'an 1490, étudia à Louvain et à Cologne; prit dans la première université le titre de bachelier, et dans la seconde celui de docteur. Il étoit profondément versé dans les mathématiques, dans les matières de théologie, d'antiquité et de littérature. Il signala son zèle pour la Foi par plusieurs ouvrages contre Luther, Melanchthon, Bucer et Calvin. Adrien VI et les papes suivans lui donnèrent souvent des marques de leur estime. Il mourut le 29 décembre 1542, à Utrecht, où il étoit prévôt de l'église de Saint-JeanBaptiste. On a de lui un grand nombre d'ouvrages. Le plus considérable est intitulé: Assertio Hierarchiæ Ecclesiastica, Co logne, 1572, in-folio. Son style n'est ni aussi pur, ni aussi élé→ gant que celui de Sadolet et des autres Cicéroniens; mais il est moins barbare que celui des scolastiques et des controversistes de son temps. On a encore de lui un Traité De Gratid et libero hominis Arbitrio, à Cologne 1542, in-folio, peu exact. Pighius fait paroître dans tous ses écrits une prévention aveugle pour les opinions des Ultramontains; et il n'est guère plus exempt de préjugés, dans les questions où il ne s'agit point des intérêts personnels de la cour de Rome. Il composa aussi plusieurs ouvrages de mathématiques, où il éclairoit la théorie par la pra◄ tique. Il excelloit à construire des sphères armillaires. . II. PIGHIUS, (ÉtienneVinand) neveu maternel du précédent né à Kempen comme lui, emprunta le nom de son oncle. Il s'attacha au cardinal de Granvelle, dont il fut secrétaire pendant quatorze ans. Dans la suite il se fit chanoine régulier, et mourut en 1604, à 84 ans. Il n'est personne de son temps qui l'ait surpassé dans la connoissance des Antiquités Romaines. Juste-Lipse le qualifie : Alter indefessi calami et styli Livius. On a de lui: I. Annales de la Ville de Rome en latin, Anvers, 1615, 3 vol. in-folio. II. Hercules Prodicius, Anvers, 1587. C'est une description du voyage que Pighius fit en Italic. Elle est pleine d'observations sur les Antiquités Romaines et Germaniques. Il nous a laissé plusieurs autres ouvrages également pleins d'érudition, dont quelques-uns ont été insérés dans |