TABLE DES MATIÈRES L'ORIENTATION CHAPITRE PREMIER DÉFINITIONS Dans l'analyse sensorielle des choses de notre milieu, l'orientation définit, non le lieu de chaque chose dans l'espace, mais la direction dans laquelle se présente ce lieu par rapport à nous. La faculté de localisation ne doit pas être en effet confondue avec celle d'orientation, car, s'il est exact de dire que tout ce qui est localisé par nous est forcément aussi orienté, il serait tout à fait absurde d'admettre que tout ce qui est orienté par nous sera par cela même localisé. Une ligne peut être infinie; un lieu est nécessairement fini et défini, ne fût-ce que par les autres lieux. Une infinité de points pourront avoir la même orientation, se trouver dans une même direction; mais il ne peut y avoir dans l'espace deux points qui aient la même localisation. Si l'on considère l'analyse de la direction comme le domaine sensoriel de la faculté d'orientation, on reconnaît donc qu'il est infiniment plus étendu que celui de la faculté de localisation, bien qu'il y ait dans cette dernière une précision et, dans bien des cas, une utilité plus grande par ses offices immédiats. Nous verrons aussi que le mécanisme de l'orientation a quelque chose d'extrêmement simple et de primordial, tandis que celui de la localisation complique l'exercice de l'orientation d'opérations supplémentaires assez délicates. Nous aurons à les étudier, car la localisation repose avant tout sur l'orientation et n'est le plus souvent que la combinaison de plusieurs orientations concertantes. Mais venons-en immédiatement à des termes plus concrets. Rien ne peut mieux montrer l'infini du domaine de l'orien tation et les étroites limites où s'exerce la faculté de localisation, que l'exemple suivant. Quand nous observons un ciel étoilé, nous orientons chaque étoile, et nous nous traçons avec la plus grande facilité la ligne idéale qui la joint à nous, sa direction. Mais il nous manque absolument, pour la localiser, la notion de sa distance, c'est-à-dire la longueur de cette ligne, notion que notre œil, si merveilleusement apte à l'orientation, est impuissant à nous fournir. Et pourtant un subterfuge, comme s'en permettent si souvent nos sens, va substituer la notion de localisation, qui ne s'exerce nullement ici, à la notion d'orientation, la seule en exercice. Il nous suffira, pour nous imaginer un semblant de localisation, de l'illusion parfaitement consciente d'une voûte céleste, d'un infini ramené plus à la portée de notre vue, d'une vaste coupole bleue où chaque étoile nous apparaît comme fixée sur la trace de sa ligne d'orientation; nous concevons alors des systèmes de constellations distribuées, c'est-à-dire localisées et définies sur cette surface bleue, aisément reconnaissables par leur répartition topographique, par leur physionomie dans laquelle la notion factice et prestigieuse de localisation prend le pas sur celle d'orientation, qui semble ne rester que sensorielle et ne s'impose pas à notre idéation, sans doute parce que l'infini est un de ses éléments. En dehors de cette notion de distance, qui nous manque ici, et à laquelle nous suppléons par une illusion, il faut encore observer que l'orientation de chaque étoile lui assigne une direction par rapport aux autres étoiles également orientées, et chaque orientation a ainsi en quelque sorte son lieu par rapport aux autres et dans l'espace. Il en résulte que cet ensemble de lignes indéfinies, par leurs orientations propres et par le rapport combiné de leurs orientations, définissent un espace dans lequel la notion de profondeur n'existe qu'à l'état indéfini. Il est à remarquer qu'en astronomie les évaluations de distances reposent forcément sur la mesure des orientations et du temps. Pour les objets plus rapprochés de nous, des points de repère connus et appréciables nous permettent d'associer la localisation à l'orientation, mais celle-ci est toujours l'opération primitive et fondamentale. Plus près encore, la vue et le toucher se contrôlent et T'orientation et la localisation se confondent aisément. A l'inté |