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Dès les premiers jours de janvier, le canton de Neufchatel fut troublé par un mouvement excité à l'occasion de l'élection des pasteurs par les paroisses. Cette élection n'avait aucune couleur politique; toutefois, une fraction du parti prussien, renversé près d'un an auparavant et persécuté depuis lors, s'agita et occasionna quelques rixes sanglantes. Le gouvernement républicain de Neufchatel, après avoir appelé sous les armes une partie des milices de La Chaux-des-Fonds et du Val-de-Travers, fit procéder à de nombreuses arrestations, qui atteignirent même quelques-unes des sommités du parti vaincu.

La sourde complicité des démagogues de la Suisse avec leurs alliés d'Italie, excita, de la part de l'Autriche, des réclamations nouvelles. Le maréchal Radetzki dut adresser plusieurs notes comminatoires aux commissaires fédéraux du Tessin. Il se refusait à rétablir les relations internationales avec le gouvernement tessinois jusqu'à ce que le décret de l'Assemblée nationale concernant le renvoi des réfugiés italiens eût reçu sa pleine et entière exécution. Le maréchal menaçait de reprendre les mesures de blocus. Il se plaignait également de l'introduction en con trebande d'armes dans la Lombardie; de la présence daus le canton des chefs de l'insurrection lombarde, et surtout de Mazzini; de la distribution de proclamations excitant l'Autriche à la déser tion. Le gouvernement tessinois dut reconnaitre la justice de ces plaintes; il ordonna l'arrestation de Mazzini et prescrivit, au moins en apparence, la surveillance la plus active pour empêcher la distribution d'écrits provocateurs.

Les tentatives insurrectionnelles qui furent comprimées en France et en Allemagne, ajoutèrent de nouveaux éléments de discorde à ceux que possédait déjà la Suisse, en y envoyant des hôtes nouveaux. Parmi ce ramassis de réfugiés de tous les partis révolu tionnaires de l'Europe, se trouvait à Genève un Prussien, du nom de Heinzen, dont l'expulsion de Suisse fut ordonnée par le conseil fédéral. Le gouvernement de Genève se refusa à obéir aux ordres du gouvernement central et prit sous sa protection cet homme, l'un de ces misérables qui érigent l'assassinat en vertu républicaine (1).

(1) On peut trouver dans les écrits de cet énergumène des phrases comme

Après la défaite de l'insurrection badoise, un arrêté du gouvernement fédéral défendit le séjour en Suisse à tous les individus qui avaient occupé une position élevée dans les rangs ou dans les emplois civils de la révolution du grand duché du Palatinat. Mais les cantons de Genève, de Vaud, de Zurich, d'Argovie ét de Berne protestèrent contre cet arrêté, déclarant ne pouvoir pas s'y soumettre parce que, selon eux, il violait la constitution fédérale et portait atteinte à la souveraineté nationale. Force fut donc au gouvernement fédéral de modifier son arrêté par un autre, en date du 20 juillet. Cependant le ministre de Prusse, M. de Sidow, présentait des notes énergiques. Mais toute mesure d'expulsion se trouvait paralysée par une autre cause: la légation de France se refusait à viser les passeports des réfugiés badois pour et par la France.

Des négociations s'ouvrirent et les difficultés furent aplanies, au moins du côté des gouvernements étrangers. Mais à chaque expulsion nouvelle de ces hôtes dangereux, l'opposition radicale reprenait son thème retentissant d'humanité révolutionnaire. Du commencement d'août à la fin de novembre, plus de dix mille étrangers valurent à la Suisse des désordres intérieurs, des difficultés intérieures et des dépenses extraordinaires. Aussi, les chefs eux-mêmes du parti radical finirent-ils par comprendre l'intérêt véritable de la république. Un revirement d'opinion se faisait déjà remarquer et lorsque M. Eytel proposa, le 25 novembre, le rapport d'une ordonnance du 19 portant expulsion de trentecinq nouveaux réfugiés, le parti conservateur l'emporta dans le conseil national. Soixante-six voix se prononcèrent contre 28 pour donner gain de cause au pouvoir exécutif fédéral. Les radicaux fougueux d'autrefois, les Ochsenbein, les Druey parlèrent eux-mêmes contre la motion Eytel.

C'était là l'indice d'une amélioration dans l'opinion publique. Mais, pour en arriver là, il avait fallu passer par de honteux

celles-ci : « Kossuth n'a pas assez songé aux moyens d'impressionner vivement. S'il faut faire sauter en l'air la moitié du monde et répandre une mer de sang pour arrêter le parti des barbares, aucun scrupule ne doit nous arrêter. Celui-là ne porte pas un cœur républicain dans sa poitrine, qui hésiterait à donuer joyeusement sa vie pour ensevelir sous la terre un million de barbares. »

excès. L'élection du pouvoir exécutif du canton de Genève, venait de donner le spectacle le plus scandaleux. L'ancien conseil d'Etat, ce pouvoir désastreux qui pesait depuis trois ans sur ce malheureux canton, fut réélu pour trois autres années, grâce à des violences inouïes. Le 12 novembre, le parti gouvernemental, représenté par les ateliers nationaux, les assistés et les étrangers, forma dès le matin ses phalanges, tambours en tête, avec le bonnet rouge et le triangle, ornements obligés du sans-culottisme. Les conservateurs, c'est-à-dire les paysans et la bourgeoisie moyenne, étaient rassemblés de leur côté, et en nombre imposant, autour du temple de Saint-Pierre. Effrayés de leur nombre et du résultat possible de l'élection, les rouges (là aussi, ils se glorifient de ce nom) engagèrent une lutte à l'entrée de l'église et se portèrent en foule aux entrées pour entraver la marche des conservateurs de la campagne. Beaucoup de paysans furent obligés de se retirer sans avoir pu exercer leurs droits électoraux. Un président du comité électoral conservateur fut provoqué et attaqué par une bande de misérables qui l'eussent précipité dans le Rhône sans l'intervention de la gendarmerie. Dans la soirée, le désordre continua. M. Baumgartner, radical converti par l'expérience, fut attaqué dans le temple même, frappé et dépouillé de ses habits, qui furent brûlés par les amis de la liberté. La police n'osa mème pas intervenir au milieu de ces scènes tolérées par ceux qui veulent garder le pouvoir à tout prix. Il fallut que M. James Fazy lui-même, chef du gouvernement, intervint et courût même des périls pour arracher M. Baumgartner des mains de ces prétoriens avinés. Cela n'empêcha pas M. Fazy de parler le lendemain du calme et de la dignité de l'élection populaire.

Telle était la sincérité, telle était la sécurité du gouvernement de la libre Genève. La souveraineté du peuple était confisquée au profit d'un despotisme d'autant plus insupportable qu'il se parait hypocritement du nom de liberté. Tout ce qui avait fait la gloire de Genève avait disparu. A la place de ce commerce et de cette industrie qui y répandaient autrefois l'abondance, le déficit et la langueur; à la place de ces honnêtes et calmes ouvriers de l'ancien temps, les séides désordonnés des ateliers publics; au lieu de cette foule de riches étrangers qui semaient l'or dans la

ville, des réfugiés à la solde de l'État; au lieu de l'illustre académie détruite par les niveleurs et qui comptait dans ses rangs des de Candole, des de Sismondi, des Rossi, l'éloquence emphatique et vide des orateurs de clubs.

Tels étaient les excès, telles étaient les misères qui avaient contribué dans les derniers jours de l'année à ramener l'opinion publique à des sentiments meilleurs. Le parti conservateur reprenait quelque courage dans le conseil national, et le parti montagnard y éprouvait des échecs successifs. Le 3 décembre, le paragraphe 129 de la loi militaire amena la grave question de savoir si les cantons avaient le droit de disposer de leurs fortifications sans consulter le pouvoir fédéral. Le gouvernement de Genève, qui, dans son omnipotence croyait n'avoir à consulter que ses convenances, vit enfin la majorité s'élever contre lui. Les orateurs du canton cherchèrent à entraîner l'opinion par des menaces et par des déclamations; mais les résolutions des conseils radicaux de Genève, relatives aux fortifications de cette ville, furent cassées par le pouvoir fédéral.

Le 17 décembre, le conseil national et le conseil des Etats se réunirent en assemblée fédérale, et nommèrent M. Druey président du conseil fédéral. M. Druey obtint 76 voix sur 144 votants. M. Munziger fut élu vice-président.

En dehors des discussions politiques, nous n'avons à citer que le vote d'une loi sur la réforme monétaire dans le conseil des Etats. Le système français prévalut. Le franc de Suisse aurait la même valeur que le franc de France; mais les décimes seraient des batz et les centimes des rapes. Il serait frappé pour 7,000,000 et demi d'espèces en argent et 4,000,000 et demi en billon et en cuivre. La loi passa à une majorité de 30 voix contre 9 (14 décembre).

CHAPITRE VI.

ITALIE.

(PREMIÈRE PARTIE.)

Situation générale; Rome, protestation papale, Constituante révolutionnaire, élections dérisoires, désorganisation générale; ouverture du parlement toscan, adhésion à la Constituante italienne, émeutes, départ du grand duc; ouverture du parlement sarde, M. Gioberti converti, projet d'intervention italienne; proclamation de la République à Rome, l'anarchie, spoliation des biens du clergé; proclamation de la République à Florence et à Livourne, influence de Mazzini; le parti mazzinien à Turin, crise ministérielle, chute de M. Gioberti; provocations contre les Autrichiens à Ferrare, répression vigoureuse; abandon de l'intervention italienne en Toscane, dissolution du corps d'armée fidèle, approche des Autrichiens; agression de Garibaldi contre le royaume de Naples, envoi d'une armée napolitaine à la fron

tière.

Dénonciation de l'armistice entre le Piémont et l'Autriche, manifeste du roi de Piémont, note de M. de Schwarzemberg, note du cardinal Antonelli, idée d'un congrès catholique, provocations à la guerre par le parti démagogique, la consulte lombarde, manifeste du maréchal Radetzki; entrée en campagne; situation des armées, forces respectives; passage du Tessin par CharlesAlbert, passage du Tessin par les Autrichiens, erreur du général piémon tais, inaction du général Ramorino; bataille de Mortara, les divisions piémontaises battues isolément, découragement de l'armée sarde, concentration sur Novare; bataille de Novare, prise de la Biccoca, déroute générale; abdication de Charles-Albert; agitation dans la Chambre des députés, triste attitude du ministère, mesures ridicules; intervention des représentants de France et d'Angleterre, conclusion d'un armistice, indemnité de guerre, exigences de l'Autriche; en quoi la démagogie avait contribué à la guerre, votes sans effet, plans et promesses sans résultat; le nouveau roi de Piémont, ministère nouveau, occupation d'Alexandrie par les Autrichiens, prorogation du parlement.

L'année qui s'ouvrait pour l'Italie trouvait Rome en proie aux fauteurs de l'insurrection du 16 novembre; le Piémont prêt à ti

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