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une petite armée pour réprimer ces agressions. Telle était la situation faite à l'Italie, quand le roi de Piémont se décida à dénoncer l'armistice (12 mars).

Le gouvernement sarde accompagna cet acte de la publication d'un manifeste (voyez cette pièce aux documents historiques) dans lequel il disait n'avoir plus d'autre parti à prendre que la guerre ; sans cette décision, ajoutait-il, l'ordre politique et social courait en Italie les dangers les plus graves. Il accusait l'Autriche de mauvaise volonté à l'égard de la médiation qui n'avait pu aboutir. Voici ce qui s'était passé :

Une note adressée par M. de Schwartzenberg aux représentants autrichiens près les cours de Berlin et de Pétersbourg en date du 17 janvier, avait renfermé les négociateurs de Bruxelles sur un terrain trop étroit pour qu'ils pussent utilement s'y établir. La base primitive de la médiation, telle que lord Palmerston l'avait posée l'année précédente à M. de Hummelauer, la séparation de la Lombardie et de l'Autriche, était désormais complétement écartée par le cabinet de Vienne; M. de Schwartzenberg n'admettait pas que le baron de Wessenberg, son prédécesseur, même en acceptant la médiation, à cause des circonstances, eût jamais entendu en accepter ce point. M. de Colloredo avait formellement déclaré à Londres que l'Autriche ne reculerait pas d'une ligne au delà de ses frontières de 1815, et ne voulait souffrir aucune intervention étrangère à propos du statut particulier qu'elle donnerait à ses sujets italiens. Le seul objet qu'elle reconnût à la médiation, c'était de débattre en commun les conditions de la paix entre elle et la Sardaigne. Il s'était d'ailleurs présenté, depuis l'armistice, de nouveaux griefs qui prêtaient encore à discussion entre les deux États. Les Piémontais reprochaient au maréchal Radetzki d'avoir violé l'article 2 des conventions du 8 août en arrêtant le départ de l'artillerie sarde qui était restée à Peschiera; d'avoir violé l'article 5 en levant des contributions de guerre sur les familles les plus opulentes de la Lombardie. Les Autrichiens répondaient que la protection assurée par cet article 5 ne s'étendait pas au Milanais, mais seulement aux pays de Modène, de Parme et de Plaisance, et qu'ils

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s'étaient, à bon droit, couverts des frais de la guerre en les imputant à ses promoteurs. Ils répondaient encore qu'ils n'auraient point gardé les canons de Peschiera, si la flotte de l'amiral Albini fût rentrée dans les États sardes, comme le portait l'article 4 de l'armistice; or, le 25 janvier, l'amiral débarquait à l'arsenal de Venise, assiégée infructueusement jusqu'alors par les Autrichiens.

Une autre note, dans laquelle on peut retrouver des inspirations semblables à celle qui avait dicté la note de M. de Schwartzenberg, fut adressée aux puissances médiatrices par le cardinal Antonelli. Elle tendait à transformer la question austro-sarde en question italienne par la proposition d'une entente générale des puissances catholiques, et par la demande de secours pour le Saint-Père. De là pouvait sortir un congrès général des puissances des traités de Vienne, congrès qui eût pu résoudre pacifiquement les difficultés créées en Italie par l'esprit révolutionnaire.

Mais il était trop tard, et le malheureux roi de Piémont se trouvait fatalement entraîné sur la pente révolutionnaire. Une consulte lombarde, établie à Turin, répandait à grand bruit l'espoir d'une insurrection générale de la Lombardie, si l'armée sarde franchissait le Tessin. La démission acceptée du ministre Gioberti était un premier gage donné à l'esprit révolutionnaire. L'administration piémontaise pactisait désormais avec ce parti mazzinien qui avait abandonné et outragé le roi à Milan, et dont le but ouvertement avoué était la république universelle en Italie. Au moment de recommencer une lutte devenue inévitable, le vieux maréchal autrichien constata, dans un manifeste énergique, cette situation singulière d'un roi constitutionnel poussé à sa ruine par ses ennemis déclarés. Le maréchal Radetzki signalait en termés violents cette politique de carrefour qui semblait travailler de gaîté de cœur, et plus encore que celle même de Mażzini, au renversement du trône. Enfin, il annonçait à ses soldats l'intention d'aller dicter au roi, dans les murs de Turin, les conditions de cette paix qu'on le forçait à rompre (16 mars; voyez le texte à l'Appendice).

Voici, à cette même date du 16 mars, quelle était la situation respective des armées piémontaise et autrichienne :

L'armée piémontaise avait sa gauche à Novare, sa droite à Voghera, son centre, ou corps de réserve, à Alexandrie et à Casal. Les avant-gardes étaient postées, celle de la gauche à Buffalora, devant Magenta (route de Milan); celle du centre à Vigevano, et celle de la droite à Castel-San-Giovanni. Le Tessin coulait entre les deux armées jusqu'à Pavie; le Pô les séparait, Plaisance (aux Autrichiens) étant située sur la rive méridionale.

L'armée autrichienne occupait naturellement les contre-posi tions de la même ligne sa droite à Magenta, faisant face à la gauche des Piémontais; son centre, avec une partie de son aile gauche, à Pavie; et le reste de son aile gauche en avant de Plaisance, sur les bords de la Trébia, faisant face à la droite piémontaise, qui s'étendait de Voghera à Stradella et à Castel-San-Giovanni.

L'armée piémontaise, reconstituée par le général polonais Chrzanowski, comptait sur le papier 120,000 hommes et 160 bouches à feu. Mais l'armée entière n'offrait qu'une force réelle de 80,000 combattants, parmi lesquels 65,000 hommes seulement de bonnes troupes. Dans cette armée, il n'y avait que peu d'enthousiasme pour une guerre lombarde; l'état-major était mal organisé et la discipline peu sévère. Quelques régiments d'élite et les contingents de Savoie pouvaient seuls inspirer une entière confiance. L'armée autrichienne en Italie était forte de 105,000 hommes et possédait 190 pièces d'artillerie; mais elle était, on le sait, divisée en deux grands corps, dont l'un occupait le pays vénitien et assiégeait Venise, l'autre tenait la Lombardie. Cette dernière armée était forcée de maintenir des garnisons dans plusieurs places fortes et des détachements nombreux dans les villes pour contenir les populations. Le corps d'armée à opposer aux Piémontais n'allait pas au delà de 50,000 hommes; mais, bientôt, l'évacuation de Parme et de Modène, l'abandon de Milan, où le maréchal ne laissa que 4,000 hommes dans la citadelle, et la concentration d'un assez grand nombre de garnisons de moindre importance, portèrent l'armée autrichienne à plus de 65,000 hommes d'excellentes troupes.

Le 20 mars, toute l'aile gauche piémontaise, au nombre de 20,000 hommes, commandée par le roi en personne, passa le Tessin sur le pont qui existe entre Trecate et Buffalora, sur la route de Novare à Milan. Les Autrichiens, qui avaient évacué Magenta n'opposèrent aucune résistance à ce mouvement. Pendant ce temps, le maréchal réalisait les menaces de son manifeste et s'apprêtait à porter la guerre dans le Piémont. La réunion à Lodi et à Crémone de forces considérables avaient fait croire aux Piémontais qu'il était résolu à concentrer ses forces sur l'Adda et à laisser à l'armée du roi le champ libre en Lombardie. Mais ces forces n'étaient que des troupes de réserve tirées des places du Mincio et de l'Adige. Le gros de l'armée autrichienne, rassemblé à Pavie, traversa le Tessin, dans la direction de Mortara à Turin, le jour même où Charles-Albert passait ce fleuve et pénétrait en Lombardie. Ainsi, tandis qu'on le croyait encore établi sur ses anciennes positions, le maréchal avait abandonné sa droite, le lac de Côme, et son centre, Milan, pour occuper avec toutes ses forces sa gauche, Pavie, et de là, passer par le Tessin sur deux points entre Vigevano et Pavie.

De ce côté, le général Ramorino, commandant de la division lombarde, était chargé de garder le Bas-Tessin. De là, il devait observer le débouché de Pavie, et arrêter l'ennemi pendant que la canonnade avertirait le reste de l'armée d'une attaque sur sa droite. S'il ne pouvait tenir, il avait ordre de se replier sur Mortara ou sur San-Nazzaro.

L'évacuation de Megenta par les troupes autrichiennes et le passage du Tessin laissé libre, ainsi que la route de Milan, auraient dû éclairer un état-major plus habile et mieux renseigné que ne l'était celui de l'armée sarde. Le quartier général piémontais n'en fut pas moins établi à Trecate. Pendant ce temps, le maréchal s'avançait de Pavie, sans rencontrer aucune résistance. Le général Ramorino, au lieu de se porter sur la position qui lui avait été assignée, avait abandonné sans ordres, sur la rive gauche du Pô, un régiment de cavalerie et deux bataillons, dont un de Bersaglieri. Cette petite troupe, après avoir bravement soutenu, pendant près de deux heures, le feu des Autrichiens, dut se retirer devant les forces sans cesse croissantes de l'ennemi. Rien

n'empêchait plus le maréchal de s'établir en sûreté derrière le Pô.

Dans l'ignorance de ce premier succès, mais comprenant trop tard la marche véritable des Autrichiens, le généralissime piémontais Chrzanowski donna l'ordre à la première division de se porter sur Mortara, et de prendre position en avant de cette ville; la seconde devait s'établir à la Sforzesca, en avant de Vigevano. Les autres divisions reçurent l'ordre de se mettre en marche le 21, à la pointe du jour : la division de réserve, vers Mortara; la troisième, vers Gambolo; la quatrième, vers Vigevano; la brigade Solaroli, vers le pont de Buffalora. Mais tous ces mouvements n'étaient indiqués que dans la prévision de l'apparition des Autrichiens à Vigevano et à Mortara dans la journée du 21 seulement.

Le 20 au soir, le maréchal était déjà à Garlasco. Le 21 au matin, il attaqua Mortara, position couverte par la deuxième division piémontaise sous les ordres du général Bés, et par la première sous les ordres du général Durando. C'était le gros de l'armée autrichienne, précédé par une avant-garde commandée par l'archiduc Albert, qui marchait sur Mortara. Des attaques successives sur la gauche protégeaient et masquaient ce mouvement. Chrzanowski attendait avec impatience la brigade Savone de la troisième division et la quatrième division: mais le mauvais service des vivres retarda jusqu'à quatre heures du soir l'arrivée de ces importants renforts. Ce retard empêcha l'occupation de Gambolo, point important dont les Autrichiens ne manquèrent pas de s'emparer. Les brigades impériales Strasoldo et Wohlgemüth refoulèrent de ce côté une colonne piémontaise sortie de Vigevano et lui firent éprouver une perte de quelques centaines de prisonniers. Pendant ce temps, l'archiduc Albert emportait Mortara, y faisait 1,000 prisonniers et I prenait cinq canons et dix caissons. Ceci se passait à sept heures du soir. Quatre divisions piémontaises avaient combattu sur les divers points de cette bataille de Mortara, et quelques corps avaient soutenu l'attaque des Autrichiens avec une remarquable solidité. Ainsi, pendant quatre heures, la position de la Sforzesca avait été énergiquement gardée par la brigade de Savoie. A Gambolo, le premier régiment de Savoie avait même un instant forcé

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