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tant sans délibération un parti violent et téméraire, les girondins unis aux jacobins remplissent les désirs du ministère anglais qui, sous le manteau de la neutralité, prévoyait que les factions dominant chez nous ne pourraient long-temps rester dans les termes de la modération. Pitt se réjouit de les voir prendre l'initiative dans cette rupture inévitable, attendu que la France est sans finances, sans armes, et presque sans armées. Ses forces navales ne consistent qu'en soixante-six vaisseaux de ligne, quatre-vingt-seize frégates ou corvettes, etc. (V. 31 octobre 1791), le tout en assez bon état ; mais l'émigration a enlevé presque tous les officiers de la marine. La marine royale anglaise est forte de cent cinquante-huit vaisseaux de ligne, vingt-deux vaisseaux de cinquante, cent vingt-cinq frégates, cent huit cutters. La Hollande a cent vaisseaux de guerre, de différentes grandeurs. La marine marchande française était, en 1790, d'environ cinq mille cinq cents navires, dont le port s'évaluait à six cent mille tonneaux, sans comprendre les barques de pêcheurs - côtiers et les bâtimens employés au petit cabotage dont on porte le nombre à plus de onze mille.

Les habitans de Lyon ferment le club des jacobins 4 février. établi dans cette ville, et font des dispositions pour résister à l'oppression des émissaires de la convention (V. 29 mai).

La convention nomme le général Beurnonville ministre de la guerre, en remplacement de Pache. Le Suisse Pache, qui vient d'abandonner le ministère de la guerre, est élu maire de Paris, en obtenant onze mille huit cent quatre-vingts voix, sur quinze mille neuf cents votans. Le nombre de citoyens actifs, ou

17 février.

19 février.

ayant droit de voter, s'élève à plus de quatre-vingt mille; d'où l'on peut induire combien est grande la · timidité de la population dont une aussi grande partie s'absente des assemblées primaires.

L'avant-garde de Dumouriez fait une irruption en Hollande. Pitt trouve enfin, dans cette agression, un moyen d'entraîner sa nation à favoriser ses projets de coalition contre la France. Il fait valoir les anciens traités qui lient l'Angleterre et les ProvincesUnies pour la défense mutuelle de leur territoire et de leur indépendance.

L'impératrice de Russie rompt le traité de commerce fait avec la France le 11 janvier 1787.

24 février. Un décret ordonne une levée de trois cent mille homines. L'empressement, déjà si vif des jeunes Français, enthousiastes de la gloire nationale, de la liberté et de l'égalité, à se rendre sous les drapeaux (V. 11 juillet 1792), est d'autant plus impétueux, qu'on a plus exagéré les succès accidentels des armes de la république. On ne vit jamais de gouvernement porter à un si haut degré le mensonge et la forfanterie. Une dépêche, répandue sous le nom d'un chef d'armée, avait annoncé que « les Autrichiens avaient perdu bien au delà de douze cents des leurs, dans un engagement près de Consarbruck, tandis que » notre perte se réduit, grâce à leur maladresse en » tirant trop haut ou trop bas, à la perte d'un petit doigt de nos chasseurs,» assure mot à mot le général 1 qui signe cette relation tout-à-fait singulière.

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1 Beurnonville (dont le nom de famille est Riel), est né dans

Au surplus cet étrange accident de la guerre est aussitôt facétieusement célébré dans le quatrain suivant:

Quand d'Autrichiens morts on compte plus d'un mille,
Nous ne perdons qu'un doigt, encor le plus petit!
Hola! monsieur de Beurnonville,

Le petit doigt n'a pas tout dit.

Bréda est pris par le célèbre d'Arçon, de l'armée 25 février. de Dumouriez. Cette ville très-forte, armée de deux cents pièces de canon, et défendue par deux mille quatre cents hommes, se rend après trois jours et demi de bombardement. Quelle différence de cette défense à celle de Lille (V. 8 octobre 1792), à celle de Huningue (V. 27 août 1815), et à celle de toutes les places que, dans cet intervalle de vingt-deux ans, ont défendues les soldats français !

Des mouvemens populaires ont lieu à Paris; les 25-26 févr. épiciers sont pillés. Des compagnies de capitalistes, auxquels s'intéressent plusieurs conventionnels, spéculent sur le renchérissement des marchandises d'une consommation habituelle, de seconde nécessité, et ont fait de grands accaparemens de sucre, de café, de savon. La commune, cherchant à former une insurrection contre les girondins, qui sont actuellement les modérés de la législature, soulève les individus des basses classes, les précipite sur les magasins, sur les boutiques, et les laisse s'y partager, à vil prix, les denrées qu'ils craignent de payer cher, puisque la guerre maritime est déclarée.

la classe du peuple. Dumouriez, à qui l'on reprochait les éloges dont il accablait Beurnonville, répondit : Il faut bien le faire mous»ser, tout médiocre qu'il est; c'est pour cela que je l'appelle mon Ajax..

28 février.

Ir. mars.

Un rapport de Chabot, sur les finances publiques, établit le capital de la dette à huit milliards trentequatre millions; le total des intérêts perpétuels et viagers à trois cent soixante-huit millions; l'actif, qui se compose des biens ecclésiastiques, des biens des émigrés, colléges, hôpitaux, des anciens domaines et des forêts nationales, ainsi que de la valeur des cloches et de l'argenterie des églises, est évalué à neuf milliards cent soixante-dix-huit millions.

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Voici la situation militaire à cette époque. La France a huit armées du Nord, Dumouriez; des Ardennes, Valence; de la Moselle, Beurnonville, encore titulaire quoique ministre (ces deux armées-ci se trouvent sous la direction supérieure de Dumouriez); du Bas-Rhin, Custine; des Alpes, Kellermann; d'Italie, Biron; des Pyrénées, Servan; des côtes, Labourdonnaye.

Excepté l'armée des côtes et celle des Pyrénées, qui n'offrent guère que des états-majors, les armées sont en pleine activité. Là, cependant, un même drapeau rassemble, sans les unir, d'anciens soldats de ligne des gardes urbaines et des volontaires adolescens. Il faudra du temps pour opérer l'amalgame de ces corps hétérogènes, dans lesquels il n'existe ni subordination, ni discipline. Grand nombre de soldats aspirent au rang d'officier; ils délibèrent, s'érigent en motionnaires, ne reconnaissent de lois que celles qui leur plaisent; ils crient à la trahison, quand leur faiblesse ou leur inconduite les ont fait reculer; ils rejettent les effets de leurs propres désordres et de leur ignorance militaire sur ceux qu'ils accusent de ne pas adopter leurs opinions politiques. Les officiers sont en général peu capables d'exercer le commandement; ils doivent

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pour la plupart leurs grades à l'insurrection' et à l'expulsion de leurs prédécesseurs, dont beaucoup seraient restés s'ils n'avaient pas été outragés aussi les nouveaux venus n'osent ni retenir, ni réprimer la licence du soldat. L'ardente jalousie du conseil exécutif, l'impéritie de Pache, jadis magister d'un village suisse, et devenu ministre de la guerre, du 5 octobre 1792 au 4 février 1793; l'action des désorganisateurs que la société des jacobins entretient dans les rangs; la rapacité des fournisseurs envoyés de Paris; les décisions absolues autant qu'ineptes des commissaires de la convention, sont encore des causes de désordre, de nouvelles sources de revers. Parmi ces commissaires, il n'y en aura pas eu de plus malfaisans que Danton et Lacroix, délégués, en novembre 1792, à l'armée du Nord, où ils viennent de s'enrichir par de honteux trafics et les plus scandaleux pillages. Depuis leur départ, les chefs de cette armée, qui est le pivot des grandes opérations, dépendent immédiatement de cinq ou six avocats, membres de la convention : Camus, Merlin (de Douai), etc. A ce jour, les légions françaises sont dirigées par des hommes de loi, administrées par des poëtes, approvisionnées par des juifs. Les généraux, toujours en butte aux dénonciations, ne disposent d'aucun élément politique ou militaire, et ne sont plus que des instrumens matériels; leurs attributions se réduisent à donner le signal de marche en avant, à commander le feu à des troupes sans discipline, dont le mérite consiste à braver aveuglément la mort en vociférant des hymnes à la liberté. Quel observateur pourrait démêler dans ces informes pelotons d'hommes mal armés, le noyau de ces phalanges qui, pendant vingt campagnes, confondront, par leur science militaire et leur docile bravoure, les ennemis de la

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