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cause des Bourbons. Dans tous les écrits publiés depuis la restauration, on a célébré ce passage de la Loire comme une conception du génie militaire; on s'est étrangement trompé : le passage de la Loire perdit les Vendéens. Hors de leur pays, les Vendéens n'étaient plus que des hommes fugitifs, égarés, sans appui; derrière la Loire, les Vendéens étaient, pour l'exaltation et le courage, de braves et excellens soldats, les dignes émules des meilleurs bataillons républicains. Après l'immense échec essuyé à Nantes, fes royalistes auraient dû se disperser, et aller se former de nouveau à vingt lieues, sur leurs derrières; mais les mesures adoptées à cette époque par les chefs des royalistes, furent aussi mal conçues que l'avaient été celles prises auparavant : au reste, le passage de la Loire ne peut être imputé au général Bonchamp; cette grande faute appartient au bouillaṇt Henri de La Rochejaquelein, le Roland de l'insurrection royaliste. Bonchamp, avait prévu les immenses dangers que devait entraîner, pour le parti royaliste, le non-succès de l'attaque de Nantes; il se rendit, malgré lui, à l'avis du conseil vendéen qui décida que l'armée royaliste passerait la Loire, afin d'opérer une jonction prompte et imprévue avec les Bretons; cet avis était pris à contre-temps, et lorsque les forces républicaines s'étaient déjà prodigieusement accrues. Dans cette occasion décisive, le général Bonchamp fut entraîné par le torrent, comme il le dit lui-même dans une réponse à deux de ses amis qui lui écrivirent qu'ils allaient le rejoindre. Nous allons donner un fragment de cette réponse; elle est précieuse par les éclaircissemens qu'elle fournit sur la situation militaire et politique du parti royaliste: «..... Ne vous

2 juillet.

>>

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» pressez pas de venir; gardez-vous-en, mes amis ;
» rien n'est décidé encore; tout tient à la prise de Nan-
»tes. J'ai été entraîné par le torrent: plus heureux
» que moi, vous êtes sur le rivage, demeurez-y jus-
qu'à ce que Nantes soit en notre pouvoir. Si nous
échouons, vous courez à une perte certaine et inu-
» tile : conservez-vous pour notre chère France que
» vous pourrez servir quand je ne serai plus. Je suis
>> trop votre ami pour ne pas regarder comme un de-
» voir de comprimer en ce moment votre courage. Si
» nous nous emparons de Nantes, accourez près de
» moi; les occasions de déployer votre valeur ne vous
» manqueront pas ; car, inséparables de moi, vous se-
» rez toujours à la tête des colonnes et dans le plus
» grand feu. Il n'y a pas d'autre moyen de conduire
»> nos bons paysans au danger; d'où vous pouvez ima-
giner la pauvreté de nos manœuvres, le général étant
» forcé de faire le soldat dans toutes les rencontres
» aussi ne vaudrait-il rien de placer en viager sur la
>> tête de votre Bonchamp. >>

*

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Une loi fixe une indemnité de dix-huit francs par jour aux jurés du tribunal révolutionnaire. (V. 11 mars).

3 juillet. La reine Marie-Antoinette d'Autriche, veuve de Louis XVI, prisonnière au Temple depuis onze mois, est séparée de son fils (Louis XVII).

:

La ville de Châtillon (Deux-Sèvres) est prise. Le général républicain Westermann s'empare de cette petite ville, après avoir défait les Vendéens, commandés par Lescure et La Rochejaquelein. Le surlendemain ceux-ci reprennent Châtillon.

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Une loi relative aux troubles de Lyon est ainsi 11 juillet. conçue « Sont destitués et déclarés traîtres à la pa»trie tous fonctionnaires de cette ville coupable.... >> Tous les biens des conspirateurs seront séquestrés; » et aussitôt que la confiscation voulue par la loi sera prononcée par le tribunal révolutionnaire, la répartition en sera faite entre les patriotes indigens » et opprimés. Tous paiemens des sommes dues à la » ville ou aux habitans demeurent provisoirement >> suspendus. » Ce décret, qui suscite les prolétaires contre les propriétaires, est la principale cause de l'insurrection de Lyon. Promettre à l'indigent les dépouilles du riche, affranchir le débiteur de ses engagemens, n'est-ce pas déchaîner les passions de la populace, et justifier d'avance tous ses excès? Les Lyonnais, poussés au désespoir, recourront aux extrêmes moyens d'une défense dont la cause alors semble tout légitimer. (V. 9 octobre).

Marat est poignardé par Charlotte Corday d'Ar- 13 juillet. mans, jeune personne née à Saint-Saturnin des Lignerets, près de Séez (Orne).

Get execrable conventionnel était de Baudry, village de la principauté de Neufchâtel. Attaché comme médecin aux gardes d'Artois, il avait attiré quelque attention en publiant un système d'optique qui n'admettait que trois couleurs primitives. Charlotte Corday a conçu le généreux dessein de sauver son pays en abattant la tête la plus affreuse de l'hydre qui le dévore: mais Marat ne compte parmi les chefs d'aucun parti; les principaux factieux le méprisent car sa démagogie, qui repousse tout calcul de conduite, est une démence sans intervalle. C'est de la boue détrempée dans du sang. Féroce par instinct, et tel que

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ces chiens employés par les colons anglais à la chasse des nègres, Marat, lâché sur sa proie, s'y attache avec fureur et la livre ensanglantée pour qu'on l'achève. Déclamateur effréné, tribun de la populace, il n'est déjà plus, pour les grands moteurs du jacobinisme, qu'un instrument usé; et la fin de ce misérable ne suspend ni n'affaiblit aucun des plans qu'émit leur féconde perversité. « Le coup bien porté est mal » adressé », dit un proscrit.

Mais cet acte de Corday que les anciens eussent divinisée, n'excitera point les Français à opposer quelque résistance à leurs sanguinaires oppresseurs : toujours engourdis par la peur, ils resteront incapables du moindre effort. Il n'est personne qui ne sût recevoir le coup mortel, et personne qui ose le prévenir par une détermination individuelle ou par une agression combinée! Aussi, pour un seul monstre de moins, la France ne verra point s'amortir ses désastres. Des milliers d'hommes déploient à l'envi les prodiges de la valeur militaire : une jeune fille a seule montré la résolution d'immoler à la patrie un de ses plus barbares oppresseurs. Ah! si, dans cette vaste France, vingt admirateurs de cette jeune Française eussent ramassé son arme, et, rentrant dans les droits de la nature outragée, frappé vingt de ces furieux qui se plaçaient hors de toute société en détruisant tout ordre social, sans doute la horde sacrilége eût à son tour été glacée d'effroi. Les victimes, mieux inspirées, eussent senti que le courage n'est pas seulement la résignation; alors les prisons et les échafauds s'écroulaient sur les bourreaux, et le sang cessait d'inonder le sol. Mais la plus entière résignation est le sentiment universel. « On ne conçoit pas à Paris (écrit Charlotte Corday

:

» elle-même) comment une femme inutile, dont la plus longue vie ne serait bonne à rien, peut se » sacrifier de sang-froid pour sauver son pays.» Ce trait d'un courage actif et d'un dévouement médité si à froid est, dans l'immensité de notre révolution, ce qu'est au voyageur désespéré une trace de pied d'homme sur le sable du désert. On peut observer que cette fille étonnante vit le jour sous le même ciel que des hommes célèbres par la hauteur de leur génie et la vigueur de leur caractère le Poussin, Corneille, Tourville, Duquêne. Sous tous les rapports, Marat présentait une espèce de monstre; ses formes extérieures étaient des plus hideuses; ses traits repoussaient les yeux les plus familiarisés avec la laideur; il n'avait pas cinq pieds de haut les inclinations les plus bassement ignobles, les habitudes les plus crapuleuses, l'astuce d'un vil intrigant, l'exaltation d'un frénétique, et l'âme d'un scélérat consommé : voilà son moral. Ceux qui ont lu sa feuille sanguinaire intitulée l'Ami du Peuple, savent qu'il n'empruntait quelque chaleur que des idées atroces qu'il y répandait en disant tantôt « qu'il fallait » abattre deux cent mille têtes; » tantôt qu'il fallait un dictateur implacable. Il fut le plus ardent provocateur de ces boucheries d'hommes, ouvertes dans nos grandes villes. Marat sera déifié; ses restes seront portés triomphalement au Panthéon; tous les arts s'empresseront de concourir à la cérémonie de son apothéose; le peintre David, qui se distingue autant par l'exaltation de son jacobinisme que la hauteur de son talent, y prostituera son pinceau; jusqu'à Cubière, dit Dorat, dit aussi Palméseaux, secrétaire-greffier adjoint de la commune de Paris, qui publiera ùn poëme à la louange du monstre. Le club des cordeliers

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