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donne le signal des honneurs à son patron! Le plus beau vase de porphyre du garde-meuble ne paraîtra pas trop précieux pour recevoir son cœur qu'on dépose sur une espèce de reposoir dressé dans le jardin du Luxembourg; là, un orateur lira en l'honneur du nouveau saint un discours ayant pour épigraphe : O cor Jesus! ô cor Marat! cœur sacré de Jésus! cœur sacré de Marat! vous avez les mêmes droits à nos hommages. Les travaux du fils de Marie y sont comparés à ceux de l'Ami du peuple, les apôtres aux jacobins et aux cordeliers, les pharisiens aux aristocrates, les publicains aux boutiquiers, etc. L'orateur dit en concluant : Jésus est un prophète, Marat est un dieu. Un pareil sermon, qui ne saurait inspirer qu'un extrême dégoût, conduit néanmoins l'observateur à des réflexions : il y voit l'intention avouée de faire du maratisme une religion qu'il faudra professer sous peine de mort. Cette religion, livrée aux interprétations de ses grands-pontifes, Robespierre, Saint-Just, etc., sera la seule suivie pendant une année entière; et certes, la France et l'Europe entière ont eu à la craindre, autant que l'Allemagne craignit aux quinzième et seizième siècles celle de Mahomet. Afin que la fortune passe du riche au pauvre voilà l'épigraphe du journal de l'Ami du peuple, que Marat a publié depuis 1789 jusqu'à son dernier jour. Il n'y a pas eu un crime commis en France, dont l'idée n'eût été suggérée par cette méchante feuille. Par bonheur tous ceux qu'elle a conseillés n'ont pas été mis à exécution. Tous les lieux publics seront souillés par la hideuse effigie de celui qui répétait sans cesse : « Il faut abattre deux cent mille têtes; » et désormais ce dieu de sang présidera à d'innombrables sacrifices humains. Ce ne sera que

dans deux ans (V. 8 février 1795) que le tableau où David a peint son ami mourant, sera retiré de la salle de la convention; que ses restes, grangrénés de pouriture, seront retirés du Panthéon et jetés dans l'égout Montmartre, et qu'il sera permis de vouer, tout haut, sa mémoire à l'exécration des Français.

Le combat de Martigné-Briand (près du Pont-de- 15 juillet. Cé) est livré. Les royalistes, conduits par Lescure, Bonchamp, La Rochejaquelein, après avoir défait une brigade républicaine, commandée par l'inepte général Danican, éprouvent une perte considérable et sont dispersés.

Viennent ensuite les combats de Villiers et de 17-18 juin. Coron (sept lieues de Saumur). Les républicains, commandés par Menou et Santerre, honteusement défaits, laissent sur le champ de bataille deux mille morts, trois mille prisonniers, dix canons, tous les caissons et tous les bagages. La perte des royalistes, que dirigent Lescure, Bonchamp, La Rochejaquelein, est presque nulle. Cependant leur victoire n'aura point de résultats militaires de quelque importance, parce qu'en même temps ils ont éprouvé de grands échecs devant les Sables-d'Olonne et Luçon. Satisfaits d'avoir éloigné leurs ennemis au temps des moissons, ils se renfonceront dans la Vendée sans s'assurer d'aucun poste sur la Loire.

Charlotte Corday (V. le 13) est exécutée. Sachant 17 juillet, le sort qui lui était réservé, elle se prépare à la mort avec un courage simple et modeste, sans faste et sans apprêt, comme une personne qui pense avoir assez vécu, puisqu'elle vient de rendre à sa patrie un service éminent. Sa procédure a développé l'énergie

et montré la pureté de son âme. On ne découvre pas un signe de faiblesse ou d'affectation dans son air et sa conduite, pas un instant d'hésitation ou de trouble dans ses réponses, pas un mot qui puisse compromettre personne elles sont des modèles d'une élévation de sentimens à laquelle peu d'accusés sont parvenus parmi les nombreuses victimes immolées à ces époques; elle ne marchande point sa vie avec ses juges. « Connaissez-vous ce couteau?» — « Oui, c'est » celui avec lequel j'ai tué cet anarchiste. » — « Y a» t-il long-temps que vous aviez formé ce projet ?

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Depuis le 31 mai dernier ; d'ailleurs j'ai appris que » celui que j'ai tué distribuait de l'argent pour allumer » le feu de la guerre civile. » « Comment avez-vous » pu former le dessein d'assassiner un homme que » Vous ne connaissiez pas? » « Je l'ai fait pour

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>> sauver cent mille hommes. » — « Ne vous êtes-vous » pas essayée pour porter le coup ? » — « Non. » » est cependant démontré que vous ne l'auriez pas » tué si vous l'eussiez frappé un peu plus bas. » << Eh bien! c'est le hasard, etc. » Son arrêt ne dérobe rien de la douce sérénité de ses traits. Elle monte tranquillement sur la charrette, et entend avec le même calme les huées, les rugissemens, les imprécations d'une populace stupide et féroce qui la suit et se presse autour de l'échafaud. Après s'être illustrée par une action qui semblait bien au-dessus de son sexe, elle se montre par sa mort supérieure au reste des hommes. Elle a été conduite au supplice recouverte d'une draperie rouge destinée aux assassins. L'assurance de presque toutes les victimes étonnant le peuple, les tyrans s'alarment, et mettront quelquefois en usage ce déguisement qui fait paraître pâles et défaits les visages des condamnés.

Une proclamation des autorités autrichiennes dé- 20 juillet. fend aux émigrés l'entrée des parties conquises du territoire français, et conserve provisoirement le séquestre sur leurs biens. (V. le 28). Voilà une abominable conduite !

Une loi prescrit les formalités relatives à l'admi- 23 juillet. nistration, à la vente des biens des émigrés et à la liquidation de leurs dettes. (V. 2 septembre 1792) 14-28 mars 1793).

Mayence se rend aux Prussiens, après un siége de 23 juillet. près de quatre mois. Quatre-vingt mille assiégeans sous le général Kalkreuth, le roi de Prusse présent. Doyré, commandant; Aubert Dubayet, commandant d'armes; vingt-deux mille hommes au commencement du siége, dix-sept mille capitulent, à la seule condition de ne point servir d'un an contre les puissances coalisées. Cette garnison sera précipitamment envoyée dans la Vendée, où, après avoir porté les plus terribles coups aux royalistes, elle périra jusqu'au dernier homme. Mais cette mesure sera plus efficace que toutes celles prises jusque-là pour l'extinction de cette guerre civile. (V. le 28).

Des sbires, envoyés de Milan, saisissent, sur le 25 juillet. territoire neutre des Ligues - Grises, les citoyens Maret, Huguet-Semonville, se rendant à Naples et à Constantinople, en qualité de ministres de la république. On croira savoir par la suite qu'ils avaient ordre de s'arrêter à Florence, et de s'y concerter en secret avec des agens de Naples et de Toscane, dont les souverains, désirant prévenir le dernier coup prêt à tomber sur les quatre victimes qui gémissent encore dans les cachots du Temple, seraient parvenus

à faire admettre leur médiation. Cette proposition susceptible de rendre encore plus acharnés tous les démagogues de la convention et des sociétés populaires, aurait cependant (suivant les mêmes rumeurs) obtenu dans le conseil exécutif l'assentiment de la majorité, qui jugerait convenable d'adoucir les rigueurs de la persécution.

L'arrestation des deux envoyés français rend impossible l'ouverture de la négociation, et, soit que par la suite de cet étrange incident, le projet se découvre, ou que, par d'obscures communications, le comité dé salut public en ait reçu quelque vague information, quelques indices confus, il se pourrait que ce soit le motif qui hâtera l'envoi de MarieAntoinette à la Conciergerie, prison qui est comme le premier degré de l'échafaud, et si justement nommée le vestibule de la mort. De même l'on sera induit, et par d'assez nombreuses apparences et d'assez fortes probabilités, à conjecturer que les préparatifs de la descente à Quiberon, au mois de juin 1795, faits avec tant d'appareil et d'ostentation, auront déterminé les oppresseurs de l'enfant royal, qui languit et s'éteint dans le sombre donjon du Temple, à précipiter le terme d'une vie dont la durée les importune déjà; car son dernier soupir précédera seulement de vingt jours le premier débarquement de l'apparition des émigrés, cette expédition anglaise si fastueusement disposée, et si bruyamment annoncée depuis plusieurs mois. (V. 8-29 juin 1795).

L'influence ou la conduite du cabinet de Vienne n'aura guère été moins funeste que la prépondérance ou l'action du cabinet de Saint-James. A chaque époque aussi le conseil aulique sera malfaisant; mais il voile sa perfidie avec moins d'adresse. Jamais, lors

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