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mencement de l'année du mois | fit rendre aussitôt une épée à

une

chacun d'eux. Il les traita toujours avec distinction et avec bonté. Près de 3000 officiers suédois furent disperses çà et là dans les domaines de son empire, et particulièrement dans la vaste étendue de la Sibérie, ou plusieurs d'entre eux, incertains de pouvoir retourner dans leur patrie, formèrent en quelque sorte colonie, et s'appliquèrent à des arts encore inconnus dans ces contrées; ainsi favorisèrent-ils le grand projet du czar, de polir et de civiliser les anciens habitans de son empire. Pierre profita du malheur et de l'éloignement du roi de Suède, il acheva de conquérir la Livonie et l'Ingrie et y joignit la Finlande et une partie de la Poméranie suédoise. Il fut plus en état que jamais de donner ses soins à la ville de Pétersbourg dont il avoit jeté les fondemens en 1703, qui depuis est devenue l'une des villes les

de janvier. Il consacra cette réforme au commencement de ce siècle par un grand jubilé, qu'il indiqua et qu'il célébra en qualité de chef de la religion. Une affaire plus importante l'occupoit. Entraîné par les sollicitations d'Auguste, roi de Pologne, et par l'espérance que lui donnoit la jeunesse de Charles XII, roi de Suède, il déclara la guerre | à ce dernier monarque en 1700. Les commencemens n'en furent pas heureux; mais ses défaites ne le découragerent point. « Je sais bien, disait-il, que les Suédois nous battront long-temps; mais enfin nous apprendrons à les battre. Evitons les actions générales avec eux, et nous les af foiblirons par de petits combats. Ses espérances ne furent pas trompées. Après de grands désavantages, il remporta, en 1709, devant Pultawa une victoire complète. Il s'y montra aussi grand capitaine que brave sol-plus fortes de l'Europe, une vaste dat, et fit sentir à ses ennemis combien ses troupes s'étoient instruites avec eux Une grande partie de l'armée suédoise fut prisonnière de guerre, et on vit un héros tel que le roi de Suède fugitif sur les terres de Turquie, et ensuite presque captif à Bender. Le czar se crut digne alors de monter au grade de lieutenant général. Il fit manger table les généraux suédois prisonniers; et un jour qu'il but à la santé de ses maîtres dans l'art de la guerre, le comte de Rinchild, l'un des plus illustres d'entre ses prisonniers, lui demanda qui étoient ceux à qui il donnoit un si beau titre ? Vous, dit-il, messieurs les généraux. - Votre majesté est donc bien ingrate, répliqua le comte, d'avoir tant maltraité ses maîtres. Le czar

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et puissante cité, et qui fut pour Pierre-le-Grand ce qu'Alexandrie fut pour Alexandre. Cependant les Turcs, moins excités par Charles XII que par leur propre intérêt, rompirent la trêve qu'ils avoient faite avec le czar, qui eut le malheur de se laisser enfermer en 1711 par leur armée, sur les bords de la rivière de Pruth, dans un poste où il étoit perdu sans ressource. Au milieu de la consternation générale de son armée, la czarine Catherine qui avoit voulu le suivre, osa seule imaginer un expédient; elle envoya négocier avec le grandvisir Baltagi Méhémet. On lui fit des propositions de paix avantageuses; il se laissa tenter, et la prudence du czar acheva le reste. En mémoire de cet événement, il voulut que la czarine instituât

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l'ordre de Sainte Catherine à Paris à voir les beautés de la qu'elle présideroit, et où il n'en- nature et de l'art : il proposa au treroit que des femmes. Ses suc- duc d'Orléans un traité qui auroit cès ayant produit la tranquillité été également utile à la France dans ses états, il se prépara à et à la Moscovie. Son dessein recommencer ses voyages. Il s'ar- étoit de se réunir à Charles XII rêta quelque temps à Copenhague qui lui cédoit de grandes proen 1715, où il visita les colléges, vinces, d'ôter aux Danois l'emles académies, les savans, et pire de la mer Baltique, d'afexamina les côtes de Danemarck foiblir les Anglais par une guerre et de Suède : il alla à Hambourg, civile, et d'attirer en Moscovie à Hanovre à Wolffembutel, tout le commerce du nord: ce qui toujours observant; puis en Hol- en même temps auroit favorisé lande, où il parut avec toute sa celui de la France. Il ne s'éloignoit dignité; et en France en 1717. pas même de remettre le roi StaIl fut reçu à Paris avec les mêmes nislas aux prises avec le roi Aurespects qu'ailleurs; mais avec guste; afin que le feu étant alune grace et des prévenances Iumé de tous côtés, il pût courir qu'il ne pouvoit trouver que chez pour l'attiser ou pour l'éteindre, les Français. S'il alloit voir une selon qu'il y trouveroit ses avanmanufacture, et qu'un ouvrage tages. Dans ces vues, il proposa parût attirer spécialement ses re- au duc d'Orléans la médiation gards, on lui en faisoit présent entre la Suède et la Moscovie le lendemain. Il alla dîner à Petit- et de plus une alliance offensive Bourg chez le duc d'Antin, et avec ces couronnes et celle d'Esla première chose qu'il vit, fut pagne. Ce traité, qui mettoit dans son portrait en grand avec le nos mains la balance de l'Eumême habit qu'il portoit. Quand rope, ne fat pas accepté par le il alla voir la monnoie royale des duc d'Orléans, ou plutôt par médailles, on en frappa devant l'abbé Dubois qui le gouvernoit. lui de toute espèce, et on les lui Pendant le séjour duczar à Paris, présentoit. Enfin, on en frappa quelques docteurs de sorbonne une qu'on laissa exprès tomber à lui proposèrent les moyens de ses pieds, et qu'on lui laissa ra- réunir l'église russe avec l'église masser. Il s'y vit gravé d'une ma- romaine; il sembloit d'abord ennière parfaite avec ces mots : trer dans ces vues. « De retour PIERRE-LE-GRAND. Le revers étoit daus ses états, dit M. Lévesune Renommée, et la legende: que,, il fit du pape lui-même Vires acquirit eundo; allégorie le principal personnage d'une aussi juste que flatteuse pour un fête burlesque. Déjà depuis un prince dont le mérite s'augmen- grand nombre d'années il s'étoit en effet par ses voyages. En toit joué souvent, dans des voyant le tombeau du cardinal parties de débauche, du chef de Richelieu dans l'église de la de l'église russe. Pierre s'avisa, Sorbonne, le czar monte, em- en 1718, de transporter sur la brasse sa statue Grand minis- personne du pape, le ridicule tre, dit-il, que n'est-tu venu de qu'il avoit jeté sur le patriarche. mon temps? Je t'aurois donné la Il avoit à sa cour un fou nommé moitié de mon empire pour m'ap-Zotof, qui avoit été son maître à prendre à gouverner l'autre. Le écrire. Il le créa prince-pape. Le czar ne s'occupa pas uniquement | pape Zotof ayant été intronisé en

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grande cérémonie par des bouf- avoir été l'ancienne capitale de fons ivres, quatre bègues le ha- Cyrus. Les Tartares Lesghis s'en ranguèrent: il créa des cardinaux, étant emparés, massacrèrent les et marcha en procession à leur Russes et les autres habitans. tête. Les Russes virent avec joie Pour venger cet outrage, Pierre Ier le pape avili dans les jeux de leur s'embarqua sur la mer Caspienne, souverain : mais ces jeux indispo- mit le siége devant la ville de Dersèrent les cours catholiques, et bent, s'en empara ainsi que de sur-tout celle de Vienne.» (Voy. trois provinces qui furent renaussi l'article BOURSIER.) Le dues ensuite à Thamas - Kouliczar, après avoir parcouru la Kan. On ne peut que parcourir France, reprit sa sévérité dès les principaux établissemens que qu'il fut en Russie. Le prince lui doit la Moscovie. I. Une InfanAlexis, son fils, lui ayant occa- terie de 100 mille hommes, aussi sionné du mécontentement, il lui belle et aussi aguerrie qu'il y en fit faire son procès, et les juges ait en Europe, dont une assez conclurent à la mort. Le lende- grande partie des officiers sont main de l'arrêt, il eut, dit-on, une Moscovites. II. Une Marine de 40 attaque d'apoplexie qui l'emporta. vaisseaux de ligne et de 400 galeOn raisonna beaucoup sur cet res. III. Des Fortifications, selon événement funeste (V. ALEXIS les dernières règles, à toutes les PETROWITZ, no. XI.) Le père places qui en méritent. IV. Une alla voir son fils expirant, et on excellente Police dans les grandes dit qu'il versa des larmes ; mais, villes, qui auparavant étoient malgré ces larmes, quelques amis aussi dangereuses pendant la nuit de ce prince infortuné, périrent que les bois les plus écartés. par le dernier supplice. On lit, V. Une Académie de marine et dans le second volume de l'Etat de navigation, où toutes les faprésent de Russie, traduit de milles nobles sont obligées d'enl'allemand en anglais, et im-voyer quelques-uns de leurs enprimé à Londres en 1722, in-8°, fans. Des Colleges à Moscow, un Manifeste du procès criminel Pétersbourg et à Kiof, pour les du czarwitz Alexis Petrowitz, langues, les belles-lettres et les jugé et publié à Saint-Pétersbourg mathématiques; de petites Ecoles le 25 juin 1718, traduit sur l'ori- dans les villages où les enfans des ginal russe, et imprimé par ordre paysans apprennent à lire et à de sa majesté le czar, à la Haie, écrire. VII. Un College de méen 1718 qui est attribué au decine, et une belle apothicairerie publique à Moscow, laquelle fournit de remèdes les grandes villes et les armées. Jusque-là il n'y avoit eu dans tout l'empire aucun médecin que pour le czar et nul apothicaire. VIII. Des Leçons publiques d'anatomie dont le nom n'étoit seulement pas conuu; et ce qu'on peut compter pour une excellente leçon toujours subsistante, le cabinet du fameux Ruysch, acheté par le czar, où sont rassemblées tant

czar lui

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même. En 1721, il conclut une paix glorieuse avec la Suède, par laquelle on lui céda la Livonie, l'Estonie, l'Ingermanie, la moitié de la Carélie et de Wibourg. Les états de Russie lui déférèrent alors le nom de Grand, de Père de la Patrie et d'Empereur. Le reste de la vie du czar fut employé à l'exécution de ses grands desseins. En 1722, il établit un comptoir à Schamache, ville de Perse, qu'on croit

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de dissections si fines, si instruc-| membre honoraire, une carte de sa nouvelle mer Caspienne. Il mourut le 28 janvier 1725, à 53 ans. On rapporte qu'étant près de mourir, les sénateurs et les grands qui se trouvoient dans sa chambre, faisoient entre eux l'énumération des réformes utiles qu'il avoit faites dans ses états, et qu'il les interrompit en leur disant qu'il avoit omis la plus importante de toutes, celle de la mauvaise administration de la justice. Tout moribond qu'il étoit, il signa de son lit un ordre pour que tous les procès fussent jugés dans l'espace de onze jours. Pierre le Grand étoit d'une taille haute; il avoit l'air noble, la physionomie spirituelle, le regard rude; il étoit sujet à des espèces de convulsions, qui altéroient quelquefois les traits de son visage. Mais lorsqu'il vouloit faire accueil agréable, sa physionomie devenoit riante et ne manquoit pas de grace, quoiqu'il conservât toujours un peu de l'air sarmate. Il parloit avec feu et avec facilité. Il avoit une éloquence naturelle, et

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tives et si rares, IX. Un Observatoire, où les astronomes ne s'occupent pas seulement à étudier le ciel, mais où l'on renferme toutes les curiosités d'histoire naturelle. X. Un Jardin des plantes. XI. Des Imprimeries, dont il a changé les anciens caractères, trop barbares et presque indéchiffrables à cause des fréquentes abréviations. XII. Des Interprètes pour toutes les langues des états de l'Europe, et de plus pour le latin, le grec, le turc, le calmouque, le mongule, et le chinois. XIII. Une Bibliothèque royale, formée de trois grandes bibliothèques qu'il avoit achetées en Angleterre en Holstein et en Allemagne. XIV. Le changement général comprit aussi la Religion, qui à peine méritoit le nom de religion chrétienne. Il abolit la dignité de patriarche, quoique assez dépendante de lui. Maître de son église, il fit divers réglemens ecclésiastiques, sages et utiles. XV. Après avoir donné à son ouvrage des fondemens so-haranguoit souvent. Ce prince délides, Pierre y ajouta ce qui n'est que de parure et d'ornement: il changea l'ancienne architecture, grossière et difforme au dernier point, ou plutôt il fit naître chez lui l'architecture. On vit s'élever un grand nombre de maisons régulières et commodes, quelques palais, des bâtimens publics, et

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daignoit et méprisoit le faste, qui n'eut fait qu'environner sa personne; c'étoit le prince Men zikoff son favori, qu'il chargeoit de le représenter par sa magnificence. Jamais homme ne fut plus vif, plus laborieux, plus entreprenant, plus infatigable. L'habitude du despotisme faisoit que ses volontés, ses désirs, fantaisies se succédoient rapidement, et ne pouvoient souffrir la moindre contrariété des temps, des lieux, ni des circonstances. Pierre avoit établi des hommes chargés de porter du secours aux incendies, que l'on sait être fort fréquens en Moscoviei! avoit pris une de ces commissions périlleuses; on le voyoit

« Il est affreux qu'il ait manqué à ce réformateur des hommes, la principale vertu, l'humanité. De la brutalité dans ses plaisirs, de la férocité dans ses mœurs, de la barbarie dans ses vengeances, se mêloient à tant de vertus. Il po

monter le premier avec la hache au haut des maisons en feu, sans que le danger l'effrayât. Cet empereur aimoit beaucoup à voyager. Il alloit, sans suite, de l'extrémité de l'Europe au cœur de l'Asie, il franchissoit souvent l'intervalle de Pétersbourg à Mos-liçoit ses peuples, et il étoit sau

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vage. de ses propres mains, été l'exécuteur de ses sentences sur des criminels; et dans une débauche de table, il a fait voir son adresse à couper des têtes...»

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Les roues, dit-il ailleurs, page 484, furent couvertes des membres rompus des amis de son fils. Il fit couper la tête à son propre beau-frère, le comte Laprechin, oncle du prince Alexis. Le confesseur du prince eut aussi la tête coupée. Si la Moscovie a été civilisee, il faut avouer que cetté politesse lui a coûté cher.... » Fontenelle, dans l'éloge qu'il prononça de Pierre-le-Grand à l'académie des sciences, dit

cow, qui est de 200 lieues communes, comme un autre prince passe de son palais à une maison de plaisance. Pierre-le-Grand étoit extrême dans son amitié, dans sa haine, dans sa vengeance, dans ses plaisirs. Il aimoit beaucoup les femmes, et n'étoit pas fort délicat sur le choix ; et dans l'effervescence de son tempérament, quelquefois un sexe suppléoit à l'autre. Il étoit adonné, par un vice de son éducation, au vin et aux liqueurs fortes. Ces excès ruinèrent son tempérament, et le rendirent sujet à des accès de fureur, dans lesquels il ne se connoissoit plus : il étoit alors por cruel. Mais si quelqu'un de ses l'excuser: « Le czar avoit affaire à favoris le rappeloit à lui-même, un peuple dur, indocile, devenu aux sentimens d'humanité, il s'ap- paresseux par le peu de fruit de ses paisoit et rougissoit de ces trans- travaux; accoutumé à des châtiports d'un emportement involon- mens cruels, et souvent injustes; taire ; il disoit alors, avec une détaché de l'amour de la vie par sorte de confusion : « J'ai réformé une affreuse misère; persuadé ma nation, et je n'ai pu me réfor- par une longue expérience que mer moi-même! » Ce fut le Fort, l'on ne pouvoit travailler à son et sur-tout l'impératrice Cathe-bonheur, insensible à ce bonheur rine, qui eurent dans ces occa- inconnu. Les changemens les plus sions le plus d'ascendant sur lui. indifferens et les plus légers, tels Voltaire, richement récompensé que celui des anciens habits, ou par la cour de Russie, a trop dis-le retranchement des longues simulé les cruautés duczar Pierre, dans l'Histoire de commande qu'il a donnée de ce prince, qu'il appeloit ailleurs moitié héros, moitié tigre. Le parallèle qu'il en fait avec Lycurgue et Solon, deux législateurs vertueux et humains, parut un peu extraordinaire à ceux qui se rappeloient ce morceau de l'Histoire de Charles XII, page 60 de l'édition de Paris:

T. XIV.

barbes, trouvoient une opposition opiniâtre, et suffisoient pour causer des séditions. Aussi, pour plier la nation à des nouveautés utiles, fallut-il porter la rigueur au-delà de celle qui eût suffi avec un peuple plus doux et plus traitable; et le czar y étoit d'autant plus obligé, que les Moscovites ne connoissoient la grandeur et la supériorité que par le pouvoir

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