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doption générale fut extrêmement lente. On peut en dire autant des machines et des procédés les plus vulgaires, tels que les charrues, les moulins à eau et à vent, les poulieries, les scieries, l'encaquage des harengs, les distilleries de grains, l'engrais des terres, les assolemens, etc.

Dans chaque siècle, les arts, ainsi que les sciences, ont des limites de convention. Pour reculer ces limites, il faut de prodigieux efforts de génie, ou des circonstances infiniment favorables. Les premiers essais sont presque toujours infructueux. Mais, de tentatives en tentatives, et après avoir absorbé les loisirs et la fortune d'hommes trop entreprenans, les inventions soi-disant nouvelles finissent par être exécutées avec succès; et de proche en proche elles se répandent chez les

nations.

Le désir et la facilité d'acquérir promptement des richesses prodigieuses, feraient peut-être armer aujourd'hui des navires sous-marins, si la Grande-Bretagne avait la guerre avec un scul peuple maritime. Puisse une ambition plus noble, plus généreuse, diriger sur ces navires l'attention des anciens chevaliers de Malte et des Philhellènes de tous les pays! Cinq cent mille francs dont on serait promptement remboursé, peuvent préserver les Grecs des grandes calamités dont ils sont encore menacés; et la même expédition mettrait plusieurs autres nations chrétiennes à l'abri des brigandages des puissances barbaresques.

Supposons qu'on ait armé deux invisibles, tels que celui dont j'ai donné la description, et dont je communiquerais avec plaisir des plans très-détaillés. Supposons, en outre, qu'on eût arboré le pavillon grec, après avoir rempli toutes les formalités nécessaires. On pourrait se diriger d'abord sur Tanger, Salé, Alger, Tunis, les deux Tripoli, et les autres ports intermédiaires. Ou entrerait successivement dans chacun, et l'on y détruirait, ou rançonnerait tous les bâtimens sous pavillon

musulman. Il est présumable que les pirates aimeraient encore mieux perdre leur marine, que de consentir à payer aucune rançon; mais il n'en serait pas de même en Égypte. Le Pacha consentirait probablement à faire de grands sacrifices, plutôt que de laisser détruire ses bâtimens, bloquer ses ports et anéantir son riche commerce. Dans le cas contraire, on se hâterait de le faire repentir de sa décision; et après avoir coulé, brûlé, ou pris les navires égyptiens, on laisserait sur la côte un des deux invisibles, afin de faire respecter le blocus.

On se dirigerait ensuite vers les parages où se trouvent d'ordinaire les plus grands rassemblemens de navires ottomans; on aurait même la faculté d'aller jusqu'à Constantinople, détruire les escadres du Grand Seigneur. En conséquence, la possession de toutes les îles de l'Archipel serait bientôt assurée aux Hellenes; il en serait de même du Péloponèse, dont la seule entrée par terre est un isthme facile à défendre. Dèslors, fermement établis sur un vaste et brillant theâtre, débarrassés de l'entretien coûteux d'une nombreuse flotille, les Hellènes appliqueraient uniquement aux armées de terre leurs ressources en tout genre, et parviendraient peut-être à chasser entièrement de l'Europe, et même des rives de l'Asie, les stupides et féroces musulmans.

Voilà un des côtés sous lesquels on peut envisager la guerre sous-marine; voilà les résultats que peuvent se promettre les hommes dont le cœur est encore navré d'es massacres de Scio. Mais le même art présente des inconvéniens très redoutables, dont je dois donner une idée.

Des pirates pourraient attaquer avec succès toutes les marines, s'ils obtenaient un asile dans un état d'outre-mer, et s'ils parvenaient à y réunir les moyens de construire quelques invisibles. Toutes les flottes militaires de l'Europe, et des armées de débarquement très - nombreuses ne suffiraient

T. XXII.- – Juin 1824.

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peut-être pas pour détruire ces nouveaux barbaresques. Chaque vaisseau, à mesure qu'il entrerait dans une rade, serait détruit subitement, si chaque point principal était gardé par un navire sous-marin, indépendamment des navires de cette espèce qui feraient la course.

Cette seconde manière d'envisager la guerre sous-marine, la couvrira de défaveur. Remarquons, cependant, qu'aucun des états nouvellement formés ne voudrait être un repaire de brigands, et que, d'ailleurs, aucun ne possède actuellement les moyens de construire des armes et des navires sous-marins. Il faut pour cela des ateliers parfaitement montés, et des artistes très-habiles.

Mais, les gouvernemens étant parfois les derniers à se convaincre de l'importance des innovations et des découvertes, on craindra peut-être de voir négliger par nos plus sages diplo mates la surveillance que réclament les progrès de la navigation et de la guerre sous-marines. En conséquence, on m'accusera de chercher à perfectionner et à faire connaître un art si destructeur; on s'étonnera, de plus, que le gouvernement ne s'oppose pas à la publication de semblables travaux.

Je vais répondre, pour ce qui me concerne. J'ai cru moimême pendant long-tems qu'il pouvait être nuisible à la société, de hâter le perfectionnement et l'emploi des navires sousmarins. A cette époque, j'ai seulement décrit quelques armes sous-marines, plus propres à la défense qu'à l'attaque (1), et j'ai appelé l'attention publique sur les frégates à vapeur. J'ai proposé de les rendre impénétrables à toute espèce de projectiles, et de leur faire lancer des obus, comparables aux torpilles pour la violence des explosions, mais d'un service bien

(1) Mémoire sur les mines flottantes, les pétards flottans, etc. Paris, 1819.

moins incommode et bien plus certain (1). J'ai ensuite indiqué les moyens de transformer les vaisseaux de ligne en bâtimens de guerre à vapeur, plus redoutables, et plus propres aux longues navigations, qu'aucune frégate de cette espèce (2); mais j'ai fait remarquer, en même tems, que ce système serait extraordinairement favorable aux Anglais. Ils possèdent plus de ressources qu'aucun autre peuple, pour armer de la sorte un grand nombre de navires; et, s'ils nous faisaient encore la guerre, ils n'auraient plus besoin d'attendre nos escadres en pleine mer, ils auraient les moyens de pénétrer dans nos rades, et jusque dans nos ports, pour y détruire tous les navires et les établissemens maritimes.

Indépendamment de ces réflexions, j'ai eu l'occasion de me convaincre qu'aux États-Unis d'Amérique, et dans la Grande-Bretagne, beaucoup d'individus s'occupent, ainsi que MM. Shuldham, Johnson et Joshua Blair, du perfectionnement de la navigation et de la guerre sous-marines. Or, comme il n'est nullement en mon pouvoir d'arrêter les progrès de cet art, je me suis appliqué à en prévoir toutes les suites, et à inventer les moyens d'apercevoir, de poursuivre et de détruire des navires, quoiqu'entièrement plongés sous l'eau. Ce n'est qu'après avoir reconnu complétement la possibilité d'exécuter cette triple opération, que j'ai publié la description des navires que j'appelle invisibles. Les moyens que j'ai imaginés pour détruire toute espèce de navires sous-marins, composent trois séries distinctes de procédés qu'on peut regarder comme nouveaux, quoique la plupart aient déjà été essayés, mais dans des vues très-différentes.

Au reste, ce n'est pas la France, qui doit craindre beaucoup

(1) Mémoire sur les mines flottantes, etc. P. 71 et suiv. Paris, 1819. (2) Annales de l'industrie. No de décembre 1822; p. 263 et suiv..

les corsaires sous-marins: son commerce n'est pas assez riche pour les tenter. Celui de l'Angleterre doit exciter bien plus fortement leur cupidité. Des motifs particuliers s'opposent à ce que je m'explique davantage; mais j'ose annoncer que la guerre sous-marine fera disparaître toute prétention à la souveraineté des mers.

DE MONTGÉRY.

DE LA PRÉCISION considérée dans le Style, les Langues et la Pantomime; DISCOURS prononcé, le 24 avril 1824, dans la Séance publique annuelle des quatre Académies composant l'Institut; par M. LEMONTEY, de l'Académie française.

La PRÉCISION, qui consiste à bannir du discours tout le superflu, et à n'y rien omettre du nécessaire, est une économie qu'on loue ordinairement plus qu'on ne la pratique. Quelques rhéteurs l'ont même passée sous silence; car elle doit avoir peu de crédit dans les écoles, où la profession du maître repose en grande partie sur le débit des ornemens, et où des prix d'amplification attendaient naguère les plus verbeux des élèves. Il faut la distinguer d'une de ses branches, qu'on appelle la concision, et qui s'attache à l'épargne des mots et au resserrement de la phrase plutôt qu'à la mesure rigoureuse de l'expression avec la pensée. La concision prête indifféremment son secours à la fausseté comme à la vérité, tandis que la précision ne se conçoit pas sans justesse et sans clarté; la concision peut n'être aussi qu'une affectation de l'esprit, au lieu que la précision se forme surtout de la vigueur combinée du jugement et du caractère. Elle est dans l'homme l'attribut de la force et de la raison; dans l'ordre social, le langage de la loi qui prescrit et du pouvoir qui commande; dans les

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