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l'auteur a partagé cette histoire en cinq périodes, ou époques, correspondantes aux principales révolutions de la philosophie: La première comprend, depuis l'origine de la philosophie jusqu'à Socrate; la seconde, depuis Socrate jusqu'à la translation de la philosophie grecque en Égypte et à Rome; la troisième période s'étend de l'École d'Alexandrie à la chute de l'empire d'Occident; la quatrième, depuis la chute de l'empire d'Occident jusqu'à la renaissance des lettres; enfin, la cinquième et dernière période comprend depuis la renaissance des lettres jusqu'à la fin du dix-huitième siècle. Les quatre volumes que nous annonçons s'arrêtent à la cinquième époque.

C'est un imposant spectacle que la tradition de ces antiques doctrines transmises par la Haute-Asie à la Perse et à l'Égypte, d'où elles viennent éclairer la Grèce et l'Occident, et, après des luttes et des fortunes diverses, se réfugier dans le Christianisme, fleurir avec lui, puis expirer au moyen âge dans les arides déserts de la Scolastique; jusqu'à ce que l'esprit humain, réveillé d'un long sommeil, secoue enfin le joug de l'autorité, et rallume le flambeau des sciences qui désormais ne cesseront plus d'éclairer le monde. Nous allons parcourir rapidement chacune de ces époques, et retracer les traits principaux du vaste tableau qu'elles nous présentent, en caractérisant les Écoles célèbres qui se sont élevées

tour à tour.

Les traditions de l'Asie, de l'Égypte et de la Phénicie ouvrent le premier âge; bientôt les spéculations philosophiques commencent à fleurir dans l'Ionie, la Thrace et cette partie de l'Italie qui fut appelée la Grande - Grèce. L'École ionique, fondée par Thalès, et renouvelée ensuite par Anaxagore, presque bornée à l'observation des phénomènes extérieurs qu'elle voulut trop tôt expliquer, n'a légué aux âges suivans que des essais incertains et une ébauche imparfaite des sciences

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naturelles. Quant à ́la Thrace et aux doctrines théologiques d'Orphée, elles ne furent jamais bien connues des Grecs, et ce dine fut qu'à une époque postérieure que des philosophes érudits tre s'efforcèrent de les ressusciter, comme auxiliaires du paganisme me en décadence. Pythagore est le seul de cette époque dont la doctrine, environnée d'éclat et de célébrité pendant sa vie, ait exercé une grande influence sur les âges suivans. Chef de la secte ionique, on peut encore le regarder comme le père de la philosophie grecque. De là sortirent l'Ecole d'Elée, qui kse partage en deux branches, les Éléatiques physiciens et les Éléatiques métaphysiciens, et l'École d'Héraclite. A leur suite, une sorte de scepticisme prend déjà naissance. Les sophistes, abusant des prérogatives de la raison, la décréditent aux yeux des hommes, ou commencent à contester ses droits.

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Socrate paraît, et, au milieu du débordement des sectes et de leurs opinions contradictoires, il donne à la philosophie grecque un nouveau caractère il la ramène à l'étude de l'homme lui-même. Sans former d'École proprement dite, il enseigne à ses disciples à interroger leur propre conscience. Athènes devient le foyer des discussions philosophiques, et, dans cette étroite enceinte, s'agitent toutes les questions qui ont exercé les méditations des plus puissans génies. De l'École de Socrate sortent bientôt, à l'envi, les cinq Écoles qui contiennent en elles les divers caractères de toute philosophie possible, savoir : l'École platonicienne, l'École péripatéticienne, celle d'Épicure, le stoïcisme et le scepticisme. En effet, quiconque aura observé avec attention la nature et les facultés de l'esprit humain, reconnaîtra facilement qu'il n'y a, en philosophie, que cinq opinions possibles et essentiellement différentes, entre lesquelles nous sommes forcés de choisir. Ou il faut nier que l'observation puisse apercevoir et que l'esprit puisse concevoir autre chose que de vaines apparences sans réalité, et c'est le scepticisme; ou l'on admet

une réalité, mais seulement dans les objets extérieurs, et l'on prend le monde physique pour l'univers entier, ce qui est l'opinion d'Épicure; ou, absorbé dans la contemplation du moi et dans la conscience de la personnalité humaine, l'esprit descend si profondément en lui-même, qu'il ne peut plus rentrer dans le monde extérieur, et qu'il nie tout le reste ou le dédaigne; et c'est la doctrine stoïcienne ; — ou, comme a fait Aristote, on comprend à la fois la double existence de l'esprit humain et de la nature extérieure, on reconnaît les lois de l'un et de l'autre, et l'on arrive à ces limites que l'on s'abstient volontairement de franchir; — ou enfin, comme Platon, non content d'embrasser l'univers et toutes ses parties, on s'élève à quelque chose de supérieur, à cette unité cachée et si difficile à saisir, à cette cause éternelle, à cette substance universelle qui contient dans son vaste sein et qui anime cet univers, qu'on appelle le monde spirituel et le monde matériel. - Telles sont les doctrines opposées dont la lutte et les progrès continuels remplissent le second âge de la philosophie grecque, jusqu'à ce qu'une nouvelle secte s'élève, qui, rapprochant et comparant toutes les doctrines des diverses écoles, travaille à les réunir dans une seule école, dans une seule doctrine.

Telle fut la tâche que se proposa la troisième époque, on l'éclectisme d'Alexandrie. Ici, nous devons mentionner, en passant, les tentatives faites par quelques esprits pour transplanter à Rome les études philosophiques : l'Académie renaît par les soins de Lucullus, Varron, Cicéron; le Lycée, par Cratippe, Andronicus; Épicure revit dans Lucrèce; le stoïcisme surtout, introduit par Panetius, conserve une grande autorité, et conseille une mort courageuse à quelques âmes énergiques, jalouses d'échapper à la dégradation générale après la ruine de la liberté. Toutefois, dans la pratique, la plus grande faveur fut pour l'épicuréisme, qui s'accommodait le

mieux avec les jouissances grossières des maîtres et l'insouciance des esclaves. Mais, ce fut en Égypte que la nouvelle philosophie établit son siége; ce fut dans cette ville d'Alexandrie, placée entre l'Asie, l'Afrique et l'Europe, comme une patrie commune ouverte à toutes les langues, à toutes les religions, à toutes les doctrines, et aux hommes distingués de toutes les parties de la terre. Ce qui caractérise l'École d'Alexandrie, ce sont les efforts qu'elle fit pour concilier et ramener à l'unité les doctrines de Pythagore, de Platon, d'Aristote et de Zénon. Dans cette carrière, se distinguent Potamon, Ammonius-Saccas, Plotin, Porphyre, Iamblique, Proclus.

Dans le même tems, quelques esprits moins enthousiastes exercent la critique sur ces nombreux systèmes : Ænesidemus, Sextus Empiricus, reproduisent le scepticisme, et lui donnent une nouvelle forme et une nouvelle énergie. D'un autre côté, les pères de l'Église chrétienne, initiés aux discussions des sectes d'Alexandrie, les mêlent quelquefois aux dogmes religieux, tandis que les docteurs juifs commentent le Talmud et le plient aux interprétations les plus diverses.

Bientôt, commence une longue période de ténèbres et de barbarie. Cependant, l'esprit humain n'était pas plongé partout dans un sommeil complet; mais son activité, là où il en conservait encore, s'épuisait sur de vaines controverses et de frivoles subtilités. Trois nations conservent encore quelques débris de l'ancien édifice des sciences: les Arabes, au tems de leur gloire et de leur puissance; l'empire grec, dans sa continuelle décadence, et les Latins d'Occident. Les premiers suivent et commentent Aristote, les seconds héritent du syncrétisme d'Alexandrie (fusion des systèmes), en y mélant leurs subtilités; les derniers ne connaissent guère que quelques écrits de Boëce et de Cassiodore. Béda, Alcuin, Rhabanus Maurus, Jean Scot Érigène, signalent à peine trois siècles de ténèbres. Pendant la première partie de cette période, l'histoire de la T. XXII. - Avril 1824.

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philosophie n'offre guère de remarquable que les travaux des Arabes.

Dès le x1 siècle, la philosophie scolastique commence à prendre, en Occident, un caractère distinct et un premier degré de développement. Elle emprunte ses premiers rudimens à l'École des Arabes. Aristote, altéré, défiguré, l'asservit plus qu'il ne l'éclaire. Raymond Lulle, dans une tentative bizarre et malheureuse, a cependant formé une secte. La fameuse controverse des Réalistes et des Nominaux s'élève, partage les esprits et leur donne quelque essor. Un petit nombre d'hommes prennent rang parmi les philosophes, en pensant d'après euxmêmes, et préparent un meilleur tems tels sont Thomas d'Aquin, Roger Bacon, Richard Suisset, Guillaume Occam.

Ici s'arrêtent les quatre premiers volumes de M. Degérando. La cinquième période, qui lui reste à retracer, commence au milieu du xve siècle, et deploie une nouvelle scène à nos regards. Des érudits infatigables ressuscitent, exposent et commentent les doctrines de l'antiquité; l'arrivée des Grecs fugitifs de Constantinople donne l'impulsion à leurs recherches. En même tems, des esprits hardis et originaux s'essaient à penser d'après eux-mêmes. Jordan Bruno, Laurent Valla, Jérôme Cardan, Campanella, cherchent à s'ouvrir des voies nouvelles; Louis Vivès, Érasme, Ramus, s'appliquent à réformer les méthodes; Montaigne et Charron ramènent la philosophie à l'étude de l'homme.

Cependant, un vaste génie a compris que ces tentatives sont incomplètes, que la réformation doit être portée dans les fondemens mêmes de la science. Bacon a embrassé le système entier des connaissances humaines; il a signalé la route, les écueils. Mais, Bacon n'est point encore compris de son siècle; il faut que les découvertes des sciences physiques viennent servir de commentaire et de preuve au grand code qu'il a tracé.

Descartes, Locke et Leibnitz, viennent imprimer une di

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