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méritoire, pouvait éclairer quelque point de notre vieille littérature. Il continuait dans le Journal des savants, auquel il était attaché depuis de longues années, sa laborieuse exploration de la littérature cléricale, si nous osons le dire, du moyen âge; car le compte rendu de quelque édition d'œuvres théologiques ou scolastiques du moyen âge, ou d'un catalogue de manuscrits, lui fournissait l'occasion de tirer du trésor inépuisable de ses notes une quantité de renseignements précis et nouveaux, empruntés le plus ordinairement à des manuscrits que peu d'autres que lui avaient eu le courage de lire. Dans le domaine des lettres latines du moyen âge, son érudition était incomparable, et sa perte sera ressentie de tous ceux qui savent combien il était loin d'avoir mis en œuvre tous les matériaux qu'il avait recueillis. Il a travaillé jusqu'à son dernier jour; on trouvera un peu plus loin l'annonce du dernier mémoire qu'il ait publié de son vivant, mais qui n'est pas le dernier auquel il ait mis la main. Ceux qui, comme nous, ont entretenu avec lui un commerce pour ainsi dire journalier ne regretteront pas moins l'homme de bien, au caractère ferme et cependant bienveillant, qui, dans les hautes situations qu'il occupa avec distinction sans jamais les avoir sollicitées, a toujours dirigé sa conduite par des considérations d'ordre élevé dans lesquelles son intérêt personnel ne tenait aucune place.

Les fragments d'une ancienne paraphrase provençale du Pseudo-Caton, publiés dans notre précédent fascicule (pp. 98 et suiv.), ne sont pas, comme nous l'avions supposé, les seuls qu'on possède de cet ouvrage jusque-là inconnu. M. le professeur Tobler a bien voulu appeler notre attention sur une communication faite par lui récemment à la Société pour l'étude des langues modernes (Berlin) au sujet d'un autre manuscrit de la même paraphrase provençale de Caton. Le résumé, fort court, de cette communication nous avait échappé. Il est imprimé dans l'Archiv für das Studium der neueren Sprachen, t. XCV, p. 437. Nous y voyons que le ms. où M. Tobler a reconnu une version du Pseudo-Caton appartient à la Bibliothèque royale de Berlin, et qu'il est incomplet : il commence au deuxième livre et reste interrompu au début du livre IV. Il contient, comme on voit, une portion beaucoup plus considérable du poème que les deux feuillets de notre Bibliothèque nationale. Ce ms. a paru à M. Tobler avoir été exécuté au XIe siècle par une main italienne, ce qui confirme la supposition qui a été émise, ci-dessus, p. 100, à propos des fragments de Paris. M. Tobler nous a fait savoir qu'il se proposait de publier prochainement le ms. de Berlin. Il ne sera pas possible, même en combinant les deux textes, d'arriver à donner une édition complète le commencement du premier livre et la fin du quatrième manquent dans l'un comme dans l'autre, mais il n'est pas douteux que, pour les parties communes, il sera possible d'établir le texte sur des bases solides. P. M.

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A la 43o session du congrès des philologues et pédagogues allemands, tenue en 1895, M. Schröder, de Marbourg, a communiqué une très importante étude sur la légende des Danseurs maudits, son origine et ses diverses

formes. Cette étude, dont le compte rendu de la session ne contient qu'un sommaire, sera, nous l'espérons, prochainement publiée en entier. Il en résulte notamment que la version où se trouve intercalé le premier couplet de la chanson que chantaient les danseurs de Cölbigk en l'an 1013 remonte à un certain Dietrich (Theodoricus), qui prétendait avoir été un de ces danseurs, et qui fut guéri de sa maladie convulsive à Wilton, en Angleterre, au tombeau de sainte Edith. C'est donc une chanson allemande (de la BasseSaxe) qu'il faut chercher sous la transcription latine :

Equitabat dux Bovo per silvam frondosam;

Ducebat secum Mersuindem formosam.

Quid stamus? cur non imus?

Dans la Zeitschrift für deutsches Alterthum (XXXIX, 427), M. Stiefel a imprimé une note sur la source du fableau allemand Ritter Berenger, récemment publié par M. Schorbach. C'est un parallèle à notre fableau de Bérenger au lonc cul, mais il est probable qu'il remonte à la même origine plutôt qu'il n'en est imité; en tout cas il en diffère assez sensiblement. M. Stiefel approuve beaucoup l'auteur allemand d'avoir donné à ce conte plaisant et obscène un dénouement moral et « pur ». On peut différer d'avis avec lui au point de vue purement esthétique. Et même au point de vue moral, peut-on croire que la femme du triste sire qui lui a donné de telles preuves de sa vantardise et de sa lâcheté aura jamais pour lui l'estime qui est la base nécessaire de l'amour conjugal? Ici, comme dans d'autres cas, la préoccupation morale, introduite où elle n'avait que faire, ne semble pas avoir été fort heureuse.

- Les trois premières livraisons de l'Histoire de la langue et de la littérature française des origines à 1900, publiées sous la direction de M. Petit de Julleville (cf. Rom. XXII, 330), viennent de paraître à la librairie Colin. Elles contiennent, après une préface de G. Paris, le chapitre I, Poésie narrative et religieuse. Origines. Vie des saints en vers. Contes pieux (Petit de Julleville, p. 1-48), le chapitre II, L'Epopée nationale (L. Gautier, p. 49-170), et la plus grande partie du chapitre III, L'Épopée antique (L. Constans, p. 171-240). — Nous reviendrons en détail sur chacun de ces morceaux. Bornons-nous pour le moment à compléter notre annonce de cette grande publication en disant que l'ouvrage aura huit volumes au lieu des six qui avaient été prévus, que le moyen âge en comptera deux pour sa part (qui sont complètement imprimés), et qu'une histoire de la langue, par M. Brunot, accompagnera chacune des périodes de l'histoire littéraire. Les illustrations de ces trois premières livraisons nous ont paru bien choisies et bien exécutées.

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- Le « félibrige latin » de Montpellier, qui fait concurrence au « félibrige plus célèbre dont M. F. Gras, après Mistral, est le « capoulié », et qui s'attache à employer les dialectes de la région au lieu du provençal avignonnais, publie chaque année, depuis 1893, sous le titre d'Armanac Mountpelieirenc (Montpellier, impr. centr. du Midi), un beau volume in-8, qui ne coûte que 50 centimes (70 par la poste), et qui ne manque pas d'intérêt, tant

à cause des spécimens de parlers locaux qu'il présente que des contes, poésies populaires, proverbes, etc., qu'il contient. L'Armanac de 1896, que nous avons sous les yeux, compte plus de 150 pages et est orné de lithographies de Montpelliérains célèbres. Cette publication mérite une place sur les tablettes des curieux de la renaissance méridionale à côté de l'Armana prouvençau.

M. Fr. Novati a entrepris une Biblioteca storica della letteratura italiana, où il se propose de publier, soit par lui-même, soit par des collaborateurs choisis, un nombre indéfini d'oeuvres intéressant la littérature italienne surtout ancienne, dans des textes aussi bien établis que possible et avec tous les commentaires dont ils sont susceptibles. La Navigatio Sancti Brendani, dont nous avons rendu compte (XXII, 579), forme le premier volume de cette Biblioteca. Le second vient de paraître. Ce sont les Rime de Dante da Maiano, publiées par M. Butacchi; nous en parlerons prochainement. Sont annoncés comme sous presse : Le poesie di Girardo Pateg da Cremona (Novati), Le rime di Bonaccorso da Montemagno e di Cino Rinuccini (Flamini), Poemetti storici inediti del sec. XIV (Rambaldi); comme en préparation : I sonetti del Burchiello (Rossi), Il monologo drammatico ne' secoli XV e XVI (Novati), Documenti minori della epopea brettone in Italia, etc. Les volumes, très élégamment exécutés, sont publiés à Bergame par l'Istituto italiano d' arti grafiche. Nous souhaitons le meilleur succès à l'entreprise si digne d'encouragement de notre très distingué collaborateur et ami.

- M. A. Salmon s'est chargé de reprendre la publication des Coutumes de Beaumanoir, que C. Boser avait entreprise avec M. R. Dareste.

– M. Wolfram von Zingerle prépare une édition du roman de la Dame à la licorne (ms. B. N. fr. 12562).

On annonce une édition critique des œuvres d'Adam de la Halle par M. R. Berger, à Berlin.

- M. James D. Bruner, chef du Department of Romance languages à l'université de Chicago, prépare une édition nouvelle de Huon de Bordeaux.

- M. Warnke, connu par son édition des lais de Marie de France, met la dernière main à une édition critique des fables qui paraîtra également dans la Bibliotheca Normannica dirigée par M. Suchier. M. Warnke est en possession de tous les papiers du regretté Mall et les a notablement complétés. Il travaille depuis plusieurs années à cette œuvre difficile, qui est enfin à peu près terminée.

- M. Densusianu a proposé à la Société des anciens textes français, qui l'a acceptée, une édition de la branche du cycle narbonnais connue sous le titre de la Prise de Cordres.

- MM. W. Förster et G. Paris vont donner pour la Société des anciens textes une édition de trois petits poèmes du cycle de la Table Ronde, dont l'un, Gliglois, est inédit, les deux autres, la Mule sans frein et le Chevalier à l'Épée, ont été publiés par Méon.

Livres annoncés sommairement :

Recherches sur l'origine de la conjonction « que » et des formes romanes équivalentes. Thèse présentée à la Faculté de philosophie de Zurich pour l'obtention du grade de docteur par Jules JEANJAQUET. Thèse acceptée par la Faculté sur la proposition de M. H. Morf. Paris, Welter, 1894, in-8, 100 p. Si j'ai tant tardé à annoncer ici la très remarquable thèse de M. Jeanjaquet, c'est que j'espérais toujours pouvoir lui consacrer le compte rendu étendu auquel elle a droit. Mais les mois s'écoulent et je ne trouve pas le temps nécessaire, temps qui ne saurait être court, car les problèmes soulevés par le jeune philologue neuchâtelois ne peuvent être discutés qu'avec beaucoup de réflexion et à l'aide de nombreuses lectures. Je me décide donc à dire ici simplement deux mots de ce travail, qui est un début excellent dans la philologie romane. La thèse essentielle de l'auteur, c'est que la conjonction française que (ainsi que ses équivalents romans) est non pas quid, comme on l'admet depuis Diez, mais quem, qui, après avoir à peu près absorbé toutes les autres formes du pronom relatif, aurait aussi absorbé la conjonction quod. Cette théorie est exposée avec beaucoup de force et justifiée avec une grande érudition; on hésite cependant encore à l'accepter, tant à cause de la difficulté qu'offre le passage du sens qu'à cause de certaines objections phonétiques (comme le qui sarde) que d'ailleurs l'auteur est le premier à signaler. L'avenir dira si elle doit décidément triompher. En tout cas elle fait grand honneur à l'initiative intellectuelle et au savoir de l'auteur. Ce morceau capital est précédé d'une introduction fort intéressante sur l'extension de quod en latin classique et sur quod, quo, quomodo, cum en roman (si en roumain), et suivi d'une recherche non moins fructueuse sur quam et quia dans les langues romanes (extension de quare; le roumain ca). — G. P. Predigten des h. Bernhard in altfranzösischer Uebertragung, aus einer Handschrift der königlichen Bibliothek zu Berlin herausgegeben von Alfred SCHULZE. Tübingen, 1894, in-8°, xx-442 p. (203e publication du Cercle littéraire de Stuttgart). Ce volume contient tous les sermons de saint Bernard que renferme le manuscrit Phillipps de Berlin (voy. Rom., XVIII, 526). La publication est faite avec le plus grand soin, précédée d'une courte introduction, accompagnée de notes judicieuses, et suivie d'une liste des passages bibliques cités qui comprend aussi ceux des sermons publiés par M. Förster. Nous avions exprimé le désir que l'édition du manuscrit de Berlin comprît aussi ces derniers, de manière à avoir réuni tout ce que nous possédons de l'ancienne traduction messine des sermons de saint Bernard. Nous regrettons moins que ce vou n'ait pas été exaucé maintenant qu'un troisième manuscrit, aussi ancien et précieux que les deux autres, vient d'être retrouvé (voy. ci-dessus, p. 155). Quand ce manuscrit sera à la disposition des savants, on pourra donner de cette traduction une édition définitive, munie d'un glossaire et accompagnée d'une étude complète. Souhaitons qu'il se trouve pour cette tâche un

travailleur aussi bien préparé, aussi intelligent et aussi consciencieux que M. Schulze.

Lexique de la langue de Molière comparée à celle des écrivains de son temps, avec des commentaires de philologie historique et grammaticale, par Ch.-L. LIVET. Tome premier. A.-C. Paris, Imprimerie Nationale (H. Welter), 1895, in-8°, IV-532 pages. - Bien que ce grand ouvrage dépasse la limite chronologique où nous nous renfermons d'ordinaire, nous le signalons volontiers à nos lecteurs comme intéressant l'histoire de la langue française. Les rapprochements, en nombre considérable, institués par l'auteur entre la langue de Molière et celle de ses contemporains, font de ce livre un véritable trésor pour la connaissance du français au XVIIe siècle.

Die deutsch-französische Sprachgrenze in der Schweiz, von Dr J. ZIMMERLI. — II. Theil. Die Sprachgrenze im Mittellande, in den Freiburger-, Waatländerund Berner-Alpen. Nebst 14 Lauttabellen und 2 Karten. Bâle et Genève, Georg, 1895, in-8°, vi-164 p. Nous avons annoncé (XX, 638) la première partie de cet excellent travail; celle-ci a été retardée par une longue maladie de l'auteur. La troisième et dernière paraîtra prochainement, et contiendra des conclusions générales et des vues d'ensemble qui ne peuvent manquer d'offrir un haut intérêt.

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La leggenda di Traiano nei volgarizzamenti del Breviloquium de Virtutibus di Fra Giovanni Gallese [pubblicata da M. BARBI]. Pisa, 10 nov. 1895 (Nozze Flamini-Fanelli). Le Breviloquium de Virtutibus, de Jean de Galles, a été traduit quatre fois en italien; M. Barbi, qui prépare un travail sur les anciens volgarizzamenti d'ouvrages de ce genre, nous donne ici le texte et la quadruple version de la légende de Trajan. Le texte ressemble à celui de Jacques da Varaggio, sans en provenir; les traductions ont quelques additions intéressantes, qui rapprochent l'une ou l'autre soit du célèbre passage de Dante, soit des anciens commentaires de la Divina Commedia. Inventaires de Jean, duc de Berry (1401-1416), publiés et annotès par Jules GUIFFREY. Paris, Leroux, 1894, 1896. 2 vol. in-8. — Ces deux volumes sont le commencement d'une collection d'anciens inventaires entreprise par le comité des travaux historiques (section d'archéologie). La publication des inventaires du duc de Berry avait d'abord été confiée à feu Demay, qui mourut, laissant son travail inachevé. M. Guiffrey, chargé de reprendre l'œuvre interrompue, dut en réalité la refondre. Ce n'était pas une raison, toutefois, pour dire, dans l'introduction, des choses désagréables au bon Demay, qui en somme n'a plus aucune part à l'édition, et à qui il serait injuste de faire supporter la responsabilité d'un plan qu'on avait parfaitement le droit de changer. Quoi qu'il en soit, M. Guiffrey s'est en général bien acquitté de sa tâche et on lui saura gré du commentaire abondant et soigné qu'il a joint aux articles des inventaires, comme de la table très copieuse qui termine la publication. Ce qui, naturellement, nous intéresse le plus ici, ce sont les descriptions des livres qui composaient l'admirable

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