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leur triomphe, et il résultera du mélange monstrueux de tant d'intérêts blessés et d'espérances déçues une réaction plus horrible que la terreur même. La majorité de la Convention et le peuple n'auront changé que de despotisme. Cependant l'esprit et le génie de la révolution, luttant contre tous les obstacles, continueront d'illustrer la France; si les grands talens qui les dirigent du sein de la représentation nationale ne se sont point faits robespierristes dans un sens, ils ne se feront point thermidoriens dans un autre ; ils resteront eux-mêmes, pour la gloire de la République, pour l'honneur de ses derniers jours, pour la mémoire d'une époque la plus féconde en conceptions sublimes, et qui a été l'héritage de ses détracteurs. L'armée surtout ne cessera de bien mériter de la patrie; c'est elle qui fera pâlir l'histoire des anciens peuples par ses inconcevables prodiges, dont l'éclat dérobera aux Français l'aspect de la contre-révolution! Oui, l'affreuse contre-révolution est née au 9 thermidor nous la verrons marcher, s'abattre, se relever, grandir, et fouler en maître le sol de la République.

La France après le 9 thermidor se trouva dans un état d'agitation et de désordre qui ne peut se comparer à aucune époque de la révolution. La destruction était partout, et nulle part on ne voyait ni la volonté ni le génie capable de réédifier. Les ressorts de l'administration étaient brisés; les ordres étaient donnés sans force, reçus sans obéissance. Les intrigans, les fripons, les factieux, les agens de l'étranger même se, pressaient pour envahir les emplois vacans par la proscription ou la mort des patriotes. Le sang coulait dans le midi. Partout les portes des prisons s'ouvraient pour rendre la liberté à des nobles, à des émigrés, à des prêtres fanatiques; elles se refermaient pour la ravir aux républicains. Il suffisait d'avoir été révolutionnaire alors que tout le monde l'était, et de n'avoir point changé, pour être poursuivi, assassiné. Les tribunaux extraordinaires étaient suspendus, mais les partis se faisaient justice euxmêmes. Dans les spectacles, sur les places publiques, au

XIV.

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lieu de vive la République, haine à la royauté, on entendait à bas les terroristes, vive le roi; au lieu de ces chants immortels qui avaient provoqué et célébré tant de victoires, on vociférait des vœux de cannibale: on était peu touché de l'annonce d'un nouveau succès de l'armée ; on trépignait de joie à la nouvelle du sac d'une société populaire. Des chars brillans reparaissaient, des hommes étalaient sans honte le produit de leurs concussions, des femmes se montraient dénuées de décence et couvertes de bijoux : on admirait on revoyait la corruption; on croyait revoir un ancien ami.

Au sein de la Convention des révélations tardives et mensongères, de lâches dénonciations, des propositions absurdes, des considérations puériles; ceux qui quelques mois auparavant s'étaient fait une recommandation, une gloire d'avoir parlé ou pensé comme Robespierre à telle ou telle époque (et ces témoignages pusillanimes souillèrent cent fois la tribune), ceux-là se rappelaient alors qu'ils avaient improuvé, détesté le tyran, que même ils avaient osé le lui dire en face: seulement ils oubliaient qu'au premier mot ils s'étaient remontrés soumis, comme à l'occasion de la loi de prairial et de l'accusation de Danton : tous se disputaient l'honneur de la première résistance à ses volontés, du premier vote porté contre lui. Dubois-Crancé ne rougissait pas d'introduire dans la discussion une fade plaisanterie sur Cornélie Copeau (1), tandis que Fréron demandait formellement la démolition de l'Hôtel-de-Ville de Paris parce qu'il avait servi de refuge au tyran.

Ce premier moment passé, les thermidoriens songèrent à comprimer les partis qui les assaillaient. Tallien proposa le maintien du gouvernement révolutionnaire jusqu'à la paix : cet édifice était déjà mutilé. Louchet invoqua l'exécution de la loi des suspects, le retour de la terreur, s'appuyant

(1) Il voulait parler de la fille vertueuse du républicain Dupleix. menuisier, chez qui Robespierre demeurait, et dont il aspirait à devenir le gendre.

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Robert Lindet,

de l'assemblée législative, de la Convention, Ministre des Finances, etc, né à

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« Les représentans du peuple ont senti la nécessité de se faire représenter aux principales époques de la révolution le tableau de la situation de la France; ils se sont empressés de faire connaître les causes qui avaient préparé ou occasionné ces grands événemens : c'est un compte que nous rendons à la nation. Nous nous rappelons à nous-mêmes ce que nous

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